L'agonie du Dieu-dollar
De profundis clamavi ad
te, Domine,
Domine, exaudi vocem meam...
1 - Un pays de Cocagne
2 - Des trous dans le monteau d'or
3 -
Petit conte édifiant, poétiquement
intitulé: SWAP SWAP SWAP, CDO, CDS
4 - Apocalypse now
5 - Sytème Madoff : un vilain
soupçon d'hyper-fraude
6 - Bernard Madoff : coup de théâtre,
la loi Sarbanes-Oxley l'atout dans la manche
!
7 - Il pleut des dollars
par paquets de plusieurs milliards
8 - Les casinotiers de la finance mondiale
9 - La fabrication de l' argent : comment
ça marche
10 - La mort programmée du Dieu-Dollar
et l'immoralité des nouveaux "barons voleurs"
11 - Apologue
*
1
- Un pays de Cocagne 
Il était une fois un pays plus heureux que celui de Cocagne que la légende
situe près de Naples et dont une montagne magique occupait le centre.
Crachant à profusion du macaroni, des saucisses et de la viande, ce
Vésuve alimentaire plongeait ses habitants gloutons dans la félicité.
Un pays plus béni des dieux qu'Argos, dans lequel la mythologie nous
apprend que Danaé, la belle captive fut fécondée par le roi des dieux
métamorphosé en une pluie d'or qui ruisselait à travers les barreaux
de la prison dans laquelle son père l'avait enfermée.
Le
nouveau pays enchanté était bercé depuis soixante-dix ans par le zéphir
d'une pluie de billets verts . La brise d'une foi inébranlable dans
le nouveau Dieu que ce pays enchanté s'était offert et qu'il a réussi
à imposer à la planète entière à la force de ses muscles et de ses bombes,
a permis, pendant près d'un siècle, à ses habitants de flotter dans
la moyenne région de l'air, déconnectés des contingences des réalités
économiques et monétaires triviales qui maintiennent les autres
pays de la planète lourdement arraisonnés aux réalités quotidiennes.
Voir
: Premiers pas sur les traces du roi dollar
Mais
une grosse tempête s'est levée et s'est mise à secouer
de plus en plus rudement le pays de Cocagne de la finance internationale.
Hedge funds, Private equities, Subprimes, Monolines, Assets under
management (AUM), Credit default swaps (CDS),
Collaterised debt obligation (CDO)se sont
mis à danser une farandole endiablée dans nos cervelles
pétrifiées .

N'avions-nous
pas vu comment, durant des années, en bons moutons de Panurge,
aveuglés par la cupidité et se frottant les mains, les boursicoteurs
avaient pensé réaliser l'affaire du siècle, s'étaient
précipités sur la nourriture si alléchante que leur présentaient les
servants du Dieu-dollar et n'avaient pas senti l'odeur de pourriture
qu'elle dégageait? La Bourse flambait et la courbe des indices,
telle l'échelle de Jacob, semblait devoir monter jusqu'au ciel.
Mais lorsque la bulle a explosé et que la panique est devenue générale,
les mêmes moutons de Panurge se sont mis à vendre sans discernement
et à tour de bras toutes les valeurs de leur portefeuille, afin d'essayer
de récupérer quelque argent, précipitant et amplifiant le désastre.
Le moral des financiers et son corollaire, la confiance
dans le fonctionnement du système, sont le vrai carburant du
système. Ils sont le baromètre infaillible qui fait de l'économie,
non pas une science , mais un appendice de la psychologie, dans
la sous-section de l'étude des passions et des humeurs
.
Voir: La "main
invisible du marché": Une histoire de "bulles", de "subprimes" ,
de "monolines" et autres merveilles de la "finance structurée"
2
- Des trous dans le manteau d'or 
"
L'Empereur marchait en tête de la procession sous le magnifique dais,
et de la rue, aux fenêtres , on s'extasiait: "Comme les nouveaux habits
de l'empereur sont beaux ! La traîne du manteau, quelle merveille et
comme elle s'étale avec splendeur!" Personne ne voyait rien, mais personne
ne voulait le laisser paraître , de crainte de se montrer indigne de
sa fonction ou stupide. Jamais l'empereur n'avait connu un tel succès
vestimentaire.
"Mais il n'est pas
habillé du tout , il est tout nu!", s'écria un enfant dans la foule."
( Les habits neufs de l'empereur , conte d'Hans
Christian Andersen, publié pour la première fois en 1835. )
Pendant
que les financiers, les économistes, les politiciens, les spécialistes
de tout poil de la chose monétaire se relaient aujourd'hui en une longue
procession et essaient de faire croire au monde qu'ils continuent de
tenir réellement entre leurs mains la "merveilleuse traîne"
du système bancaire international qui, depuis des lustres, "s'étale
avec splendeur" sous les yeux éblouis des badauds à leur fenêtre,
un enfant crie dans la foule : "Mais le Dieu-Dollar n'est pas
habillé du tout, il est tout nu !"
De profundis clamavi ad te Domine. Dieu-Dollar,
écoute ma voix ... implorent les fidèles.
Le marché finit toujours par remonter et par battre de nouveaux
records " leur répond l'écho. Quelques trous malencontreux
sont, certes, apparus dans le sublime manteau d'or, mais restez stoïques
et laissez passer la tempête, claironnent leurs grands prêtres
sur toutes les ondes et les télévisions de la terre. ll
suffira de raccommoder la précieuse étoffe avec quelques centaines de
milliards de dollars prélevés dans la poche des contribuables et le
tour sera joué.
Car
le mythique fleuve Pactole existait bel et bien, mais les pépites d'or
s'étaient métamorphosées en milliards de billets verts qui fécondaient
généreusement l'Empire depuis la fabuleuse invention, le 23 décembre
1913, de l'escroquerie du millénaire qu'avait été
la création de la FED (Federal Reserve System) et de sa
monnaie privée, système perfectionné à
partir du 15 août 1971 par la décision d'une brochette
d'alchimistes qui avaient sévi sous la présidence Nixon
. Ils avaient réussi à faire croire au monde entier que
leur papier verdâtre imprimé à volonté avait
la même valeur que de l'or bel et bon qui garantissait depuis
des siècles la stabilité des monnaies nationales et qu'ils
avaient rabaissé au rang de "devise barbare".
Voir :
Voyage circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte
de la caverne d'Ali-Baba
Cette escroquerie financière initiale avait permis à ses
heureux bénéficiaires de métamorphoser leur nation en
Picrocholand belliqueux des temps modernes. Comme le roi Picrochole,
célébré par Rabelais qui, à la tête de ses armées attaquait à
tout vat ses voisins et qui mena l'inoubliable " Guerre des fouaces
" dans le Gargantua , les Etats-Unis, première
puissance militaire de la planète, attaquent, bombardent, détruisent
, pillent et volent sans vergogne et tous les Etats de la planète
dont ils convoitent les richesses et envoient au diable les lois internationales.
[Voir note1]
Ouvrons
les portes de la guerre
Certes, les habitants de ces contrées enchantées ont la bosse du commerce.
Mais ils pouvaient d'autant plus aisément accumuler des richesses qu'ils
s'étaient attribué un privilège monétaire
exorbitant qui leur permettait de satisfaire tous leurs désirs et d'imposer
leurs lois commerciales au reste du monde. A tous les coups l'on gagne,
jubilaient-ils en se frottant les mains, tout heureux d'avoir réussi
à flouer la planète entière
En
effet, grâce à la fabuleuse escroquerie monétaire
dont bénéficiait l'Empire, un gigantesque royaume des
ombres grouillait, s'épanouissait et prospérait dans les sous-sols des
forteresses bancaires. La termitière fonctionnait quasiment en vase
clos. Une ingénierie subtile, minutieusement mise au point et constamment
réactualisée réglait et conditionnait la vie politique et sociale du
pays et telle une colossale hydre de l'Herne aspirait par ses mille
bras et ses mille têtes les forces vives de la quasi totalité
de l'univers.
Voir : Aux
sources de l'escroquerie de la Réserve Fédérale - Le machiavélisme
des hécatonchires de la finance internationalehécatonchires
Mais
il semble que telle la machine de la Colonie pénitentiaire
de Kafka, le grand meccano financier se soit emballé. Devenu
fou il est en passe d'enfoncer dans le front de ses servants la grande
aiguille mortelle d'une banqueroute-récession-déflation-escroqueries
en tous genres, qui risque de faire exploser la machinerie bancaire
tout entière .

A
l'école d'Andersen, j'ai suivi, avec les yeux de l'enfant dans le conte
du génial Danois, les tribulations d'un Dieu aujourd'hui moribond et
qui tint le monde entier sous sa férule durant près d'un siècle.
3
-
Petit conte édifiant, poétiquement
intitulé: SWAP SWAP SWAP, CDO, CDS

Il
était une fois trois petits cochons spécialisés
dans la production de légumes. Dans les contes de fées,
les petits cochons ne se contentent pas de manger des légumes,
ils peuvent aussi les cultiver. Mais un petit cochon reste un petit
cochon avec une cervelle de cochon, si bien que l'un a produit beaucoup
trop de poireaux. Des tombereaux de poireaux remplissent sa réserve
et lui restent sur les bras. Ils commencent à pourrir doucement. Ses
compagnons se trouvent dans la même situation, l'un avec des carottes,
l'autre avec des navets. Les clients se font rares, ils sont saturés
de légumes, gémissent-ils en choeur! Que faire? Eurêka,
a un jour crié le chef des petits cochons - on sait que dans
tous les troupeaux, il y a un chef - créons un système d'échanges, créons
un SWAP légumier et nous séduirons davantage de clients.
Ni
une, ni deux, sitôt pensé, sitôt réalisé. Ils mirent donc en commun
leur production et la répartirent en petits paquets dans l'espoir de
l'écouler plus commodément. Mais un petit cochon reste un cochon, comme
il est dit plus haut, et ils en profitèrent pour écouler également
et en tapinois tous leurs légumes pourris et fanés. Certes, ces denrées
n'étaient plus consommables. Mais, pffftt, même s'ils n'étaient aujourd'hui
que des sortes de "dettes" aussi peu négociables que les hypothèques
non remboursables des subprimes, il fut un temps où ils avaient
été des légumes frais et pimpants.
Ils
baptisèrent cette jolie escroquerie titrisation et offrirent
un intérêt attrayant pour ces obligations d'un nouveau genre afin d'attirer
les amateurs. Ce fut la ruée, car les clients des petits cochons
ne sont pas aussi intelligents que les petits cochons . Ils se font
piéger à tous les coups par des râteliers remplis
d'aliments et oublient de regarder le mélange qu'ils avalent.
Après
ce premier succès, nos rusés lascars,
de plus en plus audacieux, entreprirent de perfectionner le système.
Comme il leur restait encore des stocks de marchandise invendable, ils
décidèrent d'inventer un effet de levier et de mettre sur le
marché des obligations assorties d'un intérêt encore plus élevé
portant sur le bénéfice qu'ils auraient potentiellement retiré de la
vente virtuelle de leur marchandise pourrie.
Nous calculerons, dirent-ils, le montant que nous aurions retiré de
la vente potentielle de nos surplus, nous transformerons cette espérance
de bénéfice en obligations que nous mettrons sur le marché. Ainsi nos
acheteurs pourront échanger, (to swap) non pas directement
nos légumes qui sont trop pourris pour être directement vendus ou consommés
- autrement dit les titres, tout aussi pourris, des dettes hypothécaires
que leurs propriétaires étaient trop pauvres pour parvenir à les rembourser
- mais les éventuels bénéfices que les vendeurs auraient retiré de leur
commerce.
Ces CDO (collaterised debt obligations) rencontrèrent
le succès espéré et leur rapportèrent gros, personne n'étant assez curieux
pour ouvrir les paquets et en vérifier le contenu.
Nos
petits cochons, de plus en plus gras, le teint de plus en plus rose
et la queue frisottante battant la mesure au rythme de la douce musique
des écus tombant en grêle dans leur bauge, jubilaient.
Tant que les bénéfices s'accumulaient, les clients ne
pipaient mot et surtout pas les organismes officiels chargés
du contrôle des titres, et qui s'étaient eux-aussi précipités
sur ce juteux râtelier. Achat, vente, remise rapide dans le circuit,
les CDO circulaient de main en main, gonflaient à chaque changement
de propriétaire et s'accumulaient avantageusement en une fringante pyramide
dans les bilans des banques les plus huppées de la planète entière.
Mais
comme l'imagination frauduleuse de tous les petits cochons de la planète
financiaro-légumière ne connaît pas de limites, et à l'aune de
leur propre cupidité, nos ingénieux suidés réussirent
à s'attirer la complicité d'une brochette "d'ingénieurs
quantitatifs" qu'ils nourrissaient grassement - il les appelaient
affectueusement des quants. Ils les chargèrent de la mission
d'élaborer un montage financier fumeux judicieusement camouflé
sous de savantes équations mathématiques. Ceux-ci réussirent
le prodige de mettre à leur disposition des équations
si compliquées et au cheminement si tortueux que personne n'était
réellement capable d'en comprendre le sens; eux-mêmes s'y
perdaient.
Mais, alleluiah! ce labyrinthe mathématique réussissait
le prodige de créer automatiquement et quasiment par magie des
"produits dérivés", si bien que
nos petits cochons applaudirent d'autant plus bruyamment cet exploit
que le nom choisi créait un malentendu très favorable
à leur commerce. En effet, ces obligations ne dérivaient
- au sens de "ne découlaient" - que de la logique interne
des équations produites par les quants et ne "dérivaient"
nullement d'une quelconque réalité économique concrète
à laquelle elles auraient pu être rattachées, pas
même aux légumes pourris. Elles ne circulaient que dans
la stratosphère de l'imagination cupide des cochons-boursicoteurs
et de leurs acolytes mathématiciens. Ils se souvenaient de l'astuce
des gros suidés qui, en leur temps, avaient donné à
leur organisme chargé de créer la monnaie le nom de "federal"
(Federal Reserve System) pour faire croire qu'il représentait
le gouvernement fédéral américain, alors que celui-ci
ne "fédérait" - c'est-à-dire ne regroupait
- que les douze circonscriptions géographiques réparties
sur le territoire qui, ensemble, constituaient l'organisme privé
des banquiers créateurs de leur monnaie tout aussi privée,
le dollar.
Voir :
Aux
sources de l'escroquerie de la Réserve Fédérale - Le machiavélisme
des hécatonchires de la finance internationalehécatonchires
, chap. IX
Comme ils nourrissaient cependant une méfiance légitime les uns
à l'égard des autres, nos astucieux petits cochons ne s'arrêtèrent
pas en si bon chemin et inventèrent alors le troisième étage de leur
fusée financière, une sorte de contrat financier bilatéral ou trilatéral
de protection entre acheteur et vendeur qu'ils baptisèrent CDS (credit
default swaps) . Titrisé
et flanqué d'un rendement encore plus alléchant il fit merveille lui
aussi .
...
Et les titres s'empilaient, s'empilaient, s'empilaient ....

Swap, swap,
swap, CDO, CDS
...Et c'est
ainsi que le Dieu-Dollar est grand! chantaient en choeur ses fidèles
en entassant les bénéfices de leurs Swaps!
*
Il
est, en effet, à remarquer qu'aucune valeur réelle n'a jamais été échangée,
les opérations ayant toujours porté sur des bulles et des pyramides
virtuelles. Ce sont elles qui ont fait les beaux jours des spéculateurs
et qui sont aujourd'hui disqualifiées et vilainement traitées de "produits
toxiques". C'est ainsi que des créances colossales, impossibles
à rembourser puisque ne reposant sur aucune garantie réelle,
se sont accumulées dans le ciel de la finance internationale en un gros
nuage noir annonciateur d'orages dévastateurs.
4
- Apocalypse now 
Thomas
Jefferson écrivait déjà en 1802 " Je pense
que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés
que des armées prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour
que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes
les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens
de toute possession,d'abord par l'inflation, ensuite par la récession,
jusqu'au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans
toit, sur la terre que leurs parents ont conquise "
[" I believe
that banking institutions are more dangerous to our liberties than
standing armies… If the American people ever allow private banks
to control the issue of their currency, first by inflation, then
by deflation, the banks and corporations that will grow up around
the banks will deprive the people of all property until their children
wake-up homeless on the continent their fathers conquered. "]
Or,
nous assistons à un phénomène étrange: chaque
jour, le gouvernement américain inonde la planète de toujours plus de
liquidités et de crédit facile. Et pourtant, le Dieu-Dollar semble résister
à la tempête. Devant ce spectacle sidérant, nous nous interrogeons,
candides et curieux : " Mais d'où peut bien sortir tout cet argent
dont on cachait l'existence au bon peuple ? Les Etats-Unis auraient-ils
brusquement découvert la source du fleuve Pactole ? Leurs dirigeants
avaient-ils amassé des trésors sous les matelas de la Maison Blanche
ou les sortent-ils de leur chapeau? "

Comment
expliquer autrement que par son statut divin le fait qu'à l'heure où
une tempête monétaire fait rage, provoquée précisément par la rapacité
des fidèles et d'un haut clergé du Dieu-Dollar submergé de monnaie,
que l'inondation de liquidités dans un pays qui en était déjà gorgé
se poursuive ? Comment expliquer que dans un pays où la masse de la
monnaie augmente de 15% par an, soit cinq fois plus rapidement que la
production des biens et services que le dollar est censé acheter aux
Etats-Unis, que cette monnaie dévaluée soit encore cotée à la hausse
?
Certes,
la crédulité des financiers et des boursiers est incommensurable et
au moins égale à leur rapacité. Pendant près de quarante ans, ils ont
aveuglement fait confiance aux décisions de la FED. Messieurs
Greenspan et Bernanke n'étaient-ils pas les prophètes
dont ils recueillaient pieusement la moindre parole? L'habitude aidant,
ils continuent sur leur lancée. Mais à l'heure où le gouvernement
américain emprunte 1,2 milliard de dollars par jour pour compenser un
déficit commercial de 70 milliards de dollars et qu'une dette de 76,62
milliers de milliards de dollars plombe le budget, continuer à faire
confiance à une "monnaie de singe", comme l'a qualifiée
la Chancelière d'Allemagne, Mme Angela Merkel, relève quasiment
de la débilité mentale.
L' International Herald Tribune vient de révéler que,
lors d'un test sur les principes élémentaires de l'économie, des ignorants
obtiennent de meilleurs résultats que des étudiants en science économique
et monétaire, ce qui en dit long sur la nature de cette pseudo science
dont on apprend ainsi que son étude accroît "l'ignorance
savante" de ceux qui s'y adonnent. Grandet
ou Le Faiseur de Balzac qui ouvrent le lecteur aux motivations
non seulement des avares, qui thésaurisent d'une manière
maladive, mais des grands requins présents dans toutes les mers
des Sargasses de la planète financière et qui savent flairer
et exploiter les courants porteurs de la "bonne affaire",
sont d'un meilleur secours. Le grand psychologue de l'âme et des
rouages de la société qu'était Balzac permet une
meilleure appréhension des mouvements anarchiques des bourses
mondiales que bien de savants manuels d'économie et de prophètes
auto-proclamés de la chose financière.
Un
personnage typiquement balzacien vient d'ailleurs de débarquer
avec fracas dans l'actualité. On comprend un peu mieux, dans
ces conditions, qu'un maître-nageur né dans dans le Queens,
un quartier pauvre de New-York et sans le sou au départ de sa
carrière, mais astucieux, rusé et doué d'une capacité
d'adaptation et de séduction peu communes comme Bernard Madoff,
présenté aujourd'hui comme l'escroc du siècle,
ait pu si longtemps et si facilement charmer et séduire le monde
de l'argent.
Et qu'apprend-on brusquement? Qu'après s'être hissé
au rang de directeur de la seconde bourse de New-York , le NASDAQ,
ce pilier de la communauté juive de New-York et de Floride aurait
tranquillement, pendant quarante ans, mis sur pied et fait fonctionner,
au nez et à la barbe de la SEC (Securities & Exchange Commission,
le régulateur des marchés financiers) une entreprise familiale prospère
fondée, dit-on, sur une escroquerie pyramidale élémentaire,
mais inusable, pour la coquette somme de 50 milliards de dollars et
par laquelle l'argent des nouveaux-venus payait les intérêts
des investissements illusoires des anciens.

Un
peu de culture littéraire française permettrait d'abord
aux innombrables commentateurs financiers de savoir que ce montage classique
ne date nullement de l'italo-américain Ponzi en 1920, et qu'il
est déjà celui décrit par Balzac dans sa pièce
de théâtre Le Faiseur jouée pour la
première fois après sa mort en 1851.
Mais la candeur
- ou la stupidité - des fidèles du Dieu-dollar est telle que le journaliste
français qui commentait cette nouvelle sur la troisième chaîne de télévision
française a eu ce commentaire dont on ne manquera pas de goûter le sel
: "Cette arrestation choque la communauté financière, car Madoff
était connu pour son honnêteté et son sérieux"! Ciel! On n'ose
imaginer ce que cet honorable chevalier de la finance au sourire engageant,
désormais assigné à résidence et muni d'un
bracelet électronique, aurait conçu s'il avait été malhonnête
! Heureusement pour lui qu'il n'a pas volé une poignée
de dollars dans un distributeur: il serait en prison!
... Alleluia
! Et c'est ainsi que le Dieu-Dollar est grand !
5 - Système
Madoff : un vilain soupçon d'hyper-fraude 
En
lecteurs avisés de Balzac, le grand spécialiste de la
traque des sources de revenus de ses personnages, un vilain soupçon
nous envahit. Nous nous interrogeons sur le récit à dormir
debout ou le scénario digne d'un épisode édifiant
de la Légende dorée, qui fut servi avec
brio par la famille de l'ex-héros de Wall Street à la
justice, avalé sans problème par la presse mondiale et
régurgité tel quel et sans le moindre soupçon dans
les journaux et sur internet. Un parfum d'invraisemblance et de mise
en scène nimbe, en effet, une affaire qui aurait fait les délices
du grand Honoré de Balzac.
Imaginons
un conte qui après celui des Trois petits cochons s'intitulerait
Les trois gros roublards.
Scène
I : Le père en larmes troque l'habit du grand
grand requin de la finance pour celui de père repentant. La tête
baissée, sujet à une incoercible crise de vertu, il décide
brusquement de faire son mea culpa et avoue ses turpitudes financières
à ses deux fils effondrés. Indignation, cris, stupéfaction!
Les fils lèvent les bras au ciel, reculent d'un pas, horrifiés,
puis jettent un regard courroucé au pater familias accablé
et, sans plus barguigner, tels de vulgaires pionniers communistes
encouragés à dénoncer leurs parents, ils courent
dénoncer leur père à la police fédérale.

Greuze,
Malédiction paternelle, fragment du fils repentant (1778)
Scène
II : Margot devant son téléviseur est émue
aux larmes par la vertueuse famille et soupire de compassion devant
les pertes endurées par les pauvres milliardaires, les riches
associations juives et quelques-unes parmi les banques les plus huppées
de la planète, si confiantes, si naïves qui ne vérifient
jamais, comme chacun sait à qui elles confient leur argent, surtout
quand les gains, entre 12% et 20% tombent dans leur escarcelle avec
la régularité d'une horloge suisse depuis des dizaines
d'années. A leur tête, Elie Wiesel dans le rôle qu'il
connaît bien de victime, Stephen Spielberg, le médiatique
cinéaste et une foultitude d'associations dites "caritatives",
dont la fonction était principalement d'aider à financer
la colonisation en Palestine occupée, ainsi que des hôpitaux
et des écoles en Israël. Pleurons ensemble, mes frères!
Sauf que
..
-
Sauf que...les deux fistons, Marek et Andrew, participants à
ce qui est présenté comme l' arnaque du siècle,
étaient des co-gérants de l'affaire du papa - Bernard
L. Madoff Investment Securities LLC, longtemps l'une des principales
sociétés de Wall Street - et certainement pas comme portiers.
Ils étaient donc nécessairement co-acteurs et complices.
Et que dire des dizaines d'employés qui n'auraient, eux non plus
rien remarqué?
-
Sauf que ...la référence à la fraude Ponzi
est amusante . Celle-ci portait sur les variations de prix des timbres-postes
dans divers pays sur un laps de temps relativement court et concernait
surtout de petites gens, avides et faciles à berner. La fraude
Madoff serait non seulement à des années-lumière
de ce bricolage par son montant et sa durée - quarante ans -
mais outre que les participants sont peu nombreux par rapport à
une "chaîne pyramidale" classique, elle a "enchaîné",
si je puis dire, une partie du gotha des banques mondiales et la crème
des puissantes et riches institutions juives caritatives depuis Philadelphie
jusqu'à Miami qui possèdent une expérience financière
suffisante et une armée d'avocats avisés à leur
service pour savoir qu'il est impossible de garantir un tel rendement
régulier avec une gestion classique dite de "père
de famille" et surtout pour accepter les yeux fermés
de n'avoir jamais aucun relevé d'opérations, M. Madoff
se contentant d'affirmer qu'il possédait les fonds "en
liquide".
-
Sauf que ... M. Madoff est l'heureux propriétaire d'un
nombre impressionnant de maisons et d'immeubles à New-York et
en Floride - y compris en France - d'un bateau luxueux et de diverses
babioles de même nature, et qu'il semble lui rester quelques économies
- il reconnaît un reliquat de 200 millions de dollars et n'a eu
aucun problème pour payer la modeste caution de 10 millions de
dollars qui lui permet de vaquer tranquillement à ses activités
en liberté, même quelque peu "surveillée".
On imagine aisément que le confort matériel des deux fils
vertueux est assuré pour le restant de leurs jours. [Note
2]
-
Sauf que ...son affaire a bien été contrôlée
par le gendarme de la bourse, mais que celle-ci n'aurait rien vu d'anormal
et n'a jamais rien trouvé à redire. Il faut ajouter à
la décharge de la SEC (Securities & Exchange Commission)
que le fils du Ministre de la justice, Mark Mukasey, est l'avocat
d'un associé de Madoff, Frank DiPascali, l'un des plus hauts
responsables de BMIS, le fond de placement de Madoff, que la
nièce de M. Madoff est l'heureuse épouse d'un contrôleur
de la SEC et que M. Madoff lui-même en est devenu membre . On
n'est jamais si bien contrôlé que par soi-même ...
Et tout ce beau monde n'aurait rien vu, rien soupçonné
pendant quarante ans?
-
Sauf que... parmi les banques qui se disent bernées par
Bernie on trouve HSBC (Hong Kong & Shanghai Banking Corporation),
la quatrième banque mondiale, BNP Paribas, la Société
générale, Fortis, le Crédit Mutuel, Natixis, Royal
Bank of Scotland, Banco Santander, plusieurs banques suisses ou japonaises
spécialisées dans la gestion de fortunes, etc. des sociétés
d'assurance comme Axa ou Swiss Life. Il faudrait imaginer que toutes
ces banques sont dirigées par des incapables, qu'il n'existe
aucun système de contrôle ou de filtre interne avant d'engager
des millions, quand ce n'est pas des milliards de dollars dans un système
de gestion, ce qui est absurde et contraire au fonctionnement normal
des banques. Il faut donc en conclure que tout le monde était
au courant et connaissait parfaitement le mode de fonctionnement du
fond Madoff. Il vaut mieux passer pour idiot que pour escroc.
Mais,
en réalité, c'est la Bourse tout entière telle
qu'elle fonctionne aujourd'hui comme un casino mondial sur des emprunts,
des paris à la hausse ou à la baisse, des effets de levier,
des subprimes, des CDS et des CDO et autres produits dérivés,
qui est une gigantesque escroquerie et une forme légale de la
pyramide de Ponzi. Toute une mathématique déconnectée
de l'économie réelle a assuré à tous les
Madoff de la bourse et aux autres gérants de Hedge Funds domiciliés
dans des paradis fiscaux des rendements non pas de 10 ou 20%, mais de
100% et plus en quelques mois, quand ce n'est pas en quelques semaines.
Voir
Le culte du Veau d'Or et la Mondialisation
Kerviel
est désormais pestiféré parce qu'il s'est trompé
dans son dernier pari, mais il n'a fait qu'utiliser les moyens classiques
que lui offraient les règlements de la Bourse. Or, la chute de
toutes les actions et de toutes les obligations durant l'année
2008 et surtout les mouvements anarchiques des cotations ont rendu imprévisibles
les résultats des paris adossés à des effets de
levier, si bien qu'un pari hasardeux peut conduire très rapidement
à l'abîme et que 30% à 50% des grands Hedge Funds
domiciliés dans les Caraïbes ou dans d'autres paradis fiscaux
sont aujourd'hui en perdition et au bord de la banqueroute.
Tel
était probablement le cas du Hedge Fund L. Madoff Investment
Securities LLC.
M.
Bernard Madoff, tel un petit joueur de casino étrillé
par des pertes, a peut-être espéré pouvoir "se
refaire" avec un montage frauduleux bricolé dans les
derniers temps. Mais il est d'une invraisemblance absolue que ce système
ait fonctionné durant quarante ans au nez et à la barbe
de tous les investisseurs et des contrôleurs de la SEC, même
complaisants.

B. Madoff en
pleine action devant son armée d'ordinateurs
6 - Bernard Madoff
: coup de théâtre, la loi Sarbanes-Oxley, l'atout dans
la manche
-
... C'est là que nous retrouvons notre héros balzacien
dans la grande scène de l'aveu et de l'auto-accusation
ci-dessus décrite, scène probablement mise au
point avec l'armée d'avocats au service de ses sociétés,
à commencer par le fils du Ministre de la Justice, Mark Mukasey.
Comme
dans tout bon scénario, un coup de théâtre rompt
brusquement le déroulement ronronnant de la pièce et l'on
s'aperçoit que tout ce qui précède est à
interpréter différemment. Si cet épisode touchant
a été conçu, ce n'est pas pour des raisons morales
ou un quelconque remords du failli, mais parce qu'il était porteur
d'importantes conséquences juridiques. Lui seul permettait, en
effet, de transformer les clients d'un trader - et qui engagent
leur argent à leurs risques et périls - en "victimes
d'un escroc" - qui bénéficient de la protection
de la loi.
En
effet , depuis 2002 , la loi Sarbanes-Oxley, votée par
Congrès en juillet 2002 à la suite des scandales liés
aux affaires Enron et Worldcom, ratifiée par le Président Bush le
30 du même mois, prévoit, parmi de multiples injonctions censées
moraliser les activités des boursiers, une indemnisation des
investisseurs victimes d'actes répréhensibles (section 601).
Ainsi,
à partir du moment où il y a fraude avouée du
coupable et impossibilité de démontrer la ruse, puisque
la plupart des disques durs des ordinateurs auraient disparu - quelle
malchance, vraiment! - et que les quelques disques durs subsistants
se trouvent dans le plus grand désordre, les "victimes"
ont intérêt à se proclamer innocentes et à
faire bruyamment étalage de leur bonne foi. Conformément
à la loi, elles seront indemnisées. Puisqu'il y a aveu,
il n'est même pas nécessaire de chercher à prouver
des malversations, et donc à procéder à des enquêtes.
[Note 3]
Sans compter que les "victimes" peuvent, en cas de reconnaissance
du gouvernement américain de leur bonne foi dans la fraude, se
retourner en plus contre les directeurs des fonds Madoff, afin d'obtenir
de l'assureur - les Lloyds de Londres - de juteuses compensations.
En
fin joueur d'échecs et acculé au mat, ce dernier coup
ne sauverait pas Bernard Madoff de la déroute personnelle, mais
il lui permet de limiter les dégâts. Jouissant de la double
nationalité états-unienne et israélienne, il aurait
pu trouver refuge dans sa seconde patrie. Plutôt que la vie de
paria en exil à 70 ans, il a préféré assurer
un filet de sécurité à ses amis et co-religionnaires,
préserver l'honorabilité de ses fils et leur permettre
de continuer de jouir des petites économies amassées durant
les jours heureux. Car si le scénario se déroule correctement
- faisons confiance à leurs avocats - tous les particuliers et
toutes les associations juives qui avaient investi dans son fonds seront
indemnisées.
Les
véritables floués seront donc, au final, les contribuables
américains.
Voilà, n'est-ce pas, une jolie escroquerie à double tiroir
digne de la brillante carrière de ce personnage balzacien.
La Comédie humaine s'écrit sous nos yeux
.
Il
semble cependant que l'indemnisation ne concernerait que les "victimes
américaines", c'est à vérifier. Alors les
Européens seraient eux aussi, et une fois de plus, les dindons
de la farce. D'ailleurs un courtier français, René-Thierry Magon de
la Villehuchet, patron d’une société d’investissement qui vendait des
produits Madoff à de riches clients français, s’est suicidé...

Goya, Repentance
(fragment)
Bernard
Madoff fait aujourd'hui office de bouc émissaire chargé
de laver l'ensemble des financiers internationaux de leurs turpitudes.
On tient un coupable et un seul et chacun s'acharne à le rendre
le plus noir possible. En réalité, il n'est nullement
un accident. Miroir de la Bourse, il est à l'image idéale
que les financiers voulaient donner d'eux-mêmes ce que le portrait
de Dorian Gray est à la vertu , "une parodie ignoble,
une satire infâme et répugnante". En
révélateur du "prodige hideux" , l'image
de sérieux, d'efficacité et d'honnêteté d'honorables
financiers s'est muée sous nos yeux en une réalité
sordide, celle d'une poignée de privilégiés avides,
portés par l'idéologie de la mondialisation, le règne
du Dieu-Dollar et animés par une soif inextinguible d'accumulation
de richesses à tout prix.
Comme
pour le tableau du roman d'Oscar Wilde, aucune
moisissure extérieure, aucun poison minéral de la peinture
n'expliquent une altération qui serait accidentelle. Les
apparences sont sauves et la surface est intacte , mais "c'est
du dedans que l'horreur et la bassesse étaient venues. Par un
étrange phénomène de vie intérieure, la
lèpre du péché dévorait lentement le portrait.
La décomposition d'un cadavre dans une tombe pleine d'eau n'est
pas si effrayante." C'est pourquoi Madoff n'est pas un cas
particulier, un brebis galeuse au milieu d'un troupeau sain et immaculé
de financiers honnêtes. Il en est la quintessence.
Merci à Oscar Wilde pour cet éclairage de la réalité
sordide de la finance internationale .
Conclusion
balzacienne parfaitement immorale, mais une fois de plus vérifiable
: La bourse est une institution dans laquelle on confie aux loups
la surveillance des moutons et aux renards celle des poules.
...Et c'est
ainsi que le Dieu-Dollar est grand et que d'innombrables Madoff prospèrent
dans son environnement!
7
- Il pleut des dollars par paquets de plusieurs milliards 
La
pluie de billets verts continue de tomber dru. Les banques les plus
huppées tendent la sébille à tour de rôle et la planète retentit de
leurs appels et de leurs gémissements. " Encore, encore ! Nous voulons
des milliards, toujours plus de milliards ! ".
Et les milliards affluent sous la forme de plans de refinancement qui
se succèdent et s'empilent comme Pélion sur Ossa depuis les 700 milliards
du plan Paulson, d'ailleurs partiellement abandonnés en cours de route,
les 1 000 milliards que la FED serait prête à avancer ou même les 7
400 milliards recensés par l'agence Bloomberg .
Mais
même cette avalanche de milliards n'est qu'une goutte d'eau dans le
tonneau des Danaïdes des pertes réelles et colossales affichées
par le système bancaire mondial .
En
effet, la BRI (Banque des règlements internationaux) révèle que
les créances douteuses correspondant à des opérations du casino financier
auquel se sont livrées les grandes banques mondiales comme Northern
Rock (Angleterre), RBS (Royal Bank of Scotland), Bear
Stearns (New-York) , ING (Hollande), Fortis (Hollande),
Dexia (Belgique), UBS (Union de banques suisses), JP
Morgan Chase, Citicorp et Bank of America etc , ainsi que de grandes
compagnies d'assurance (AIG), de grands organismes de crédit
hypothécaire (Freddy Mac, Fannie Mae) représentent entre
675 000 et 700 000 milliards soit environ 15 fois la totalité
du PIB mondial , dont 179 000 milliards sont à imputer aux trois
principales banques américaines - JP Morgan Chase, Citicorp et Bank
of America.
L'encours
des fameux SWAP s'élève à lui tout seul à 55 000 milliards de dollars
ce qui représente à peu près la capitalisation de toutes les banques
de la planète.
Et
ce n'est pas tout, il faut ajouter à cette montagne de dettes impossible
à rembourser les 10 250 milliards de dollars milliards de la dette publique
de l'Etat américain, soit 30 % du PIB mondial annuel.

Petit
jeu : sachant qu'un billet de un dollar mesure environ 15cm
la totalité des pertes représenterait une distance de 10 125 000 milliards
de centimètres , soit 101 250 milliards de mètres, soit 101, 1/4 milliards,
de km.
Sachant que la circonférence de la terre est de 40 000km et la distance
de la terre au soleil de 150 millions de km le serpentin ferait 253
125 fois le tour de la terre et parcourrait 6 750 fois le trajet
de la terre au soleil.
...Pas
de doute, c'est bien la preuve que le Dieu-Dollar est grand !
Ces
chiffres donnent le vertige. Soignant le mal par le mal - mais ne sachant,
en réalité , à quel saint se vouer - les autorités politiques et monétaires,
notamment américaines, ajoutent une grosse louche de liquidités à une
crise provoquée précisément par une trop grande masse de liquidités
déjà en circulation. La FED ne vient-elle pas de ramener son taux entre
0 et 0,5%? Les vannes monétaires sont ouvertes.
La
situation est comparable à celle du propriétaire d'une petite bicoque
qui lutterait contre le débordement du Mississipi en ouvrant le tuyau
d'arrosage de son jardin pour nettoyer quelques dépôts de boue par-ci,
par-là sur les murs de sa maison.
Mais,
comme "il faut bien faire quelque chose", même si
le bénéfice prévisible est nul , insignifiant et
même contre productif. En effet, en bons moutons de Panurge, les
banques du reste du monde inondent, elles aussi,le système monétaire
mondial de devises et de crédits.
Or,
dans le même temps, " nous aurons un dollar fort ", clament haut
et fort les prêtres du Dieu-Dollar, ceux-là mêmes qui sont à l'origine
du désastre économique et monétaire qui secoue la planète entière. Et
le miracle se produit instantanément...pour quelques jours. Grâce à
la magie du verbe des grands prêtres du Dieu-Dollar , de la foi et de
la crédulité des servants et des fidèles, un dollar à
la dérive se raffermit sur l'heure et la Bourse de New-York, suivie
par les bourses mondiales, bondissent spectaculairement ... avant de
retomber encore plus bas dans les jours qui suivent.
C'est ainsi que Dieu créa le monde. Il dit " Que la lumière soit
" et la lumière fut. Car les investisseurs, sur la lancée de leur
foi ancienne, continuent de parier sur cette monnaie dévaluée - pour
combien de temps encore? - et payent pour avoir le droit d'acheter les
dettes du gouvernement américain qui se négocient avec un rendement
… négatif de 0,05%. Quand on connaît la légendaire rapacité des banquiers-boursicoteurs,
n'est-ce pas là un des plus spectaculaires miracles du Dieu-Dollar et
le signe de la méfiance que leur inspirent les autres formes
d'investissement?
Mais
la durée de vie d'un miracle n'est pas éternelle, comme Lazare lui-même
en fit l'amer apprentissage. Le dieu des Evangiles ne put empêcher sa
"résurrection" de n'avoir qu'un temps et le malheureux fit l'expérience
unique dans l'histoire de l'humanité d'être obligé de mourir deux fois,
et la deuxième fois, pour de bon.
8
- Les casinotiers de la finance mondiale 

La
preuve qu'un haut clergé bancaire planant dans la stratosphère dirige
ce nouveau Pays de Cocagne, c'est que le géant de l'assurance AIG
(American International Group) à peine renfloué à deux reprises
aux frais du contribuable de sa nation pour la coquette somme de 150
milliards de dollars, a vu ses cadres dirigeants se payer un séjour
de nabab dans un ensemble hôtelier de très grand luxe, sans doute pour
se récompenser d'avoir si mal géré l'entreprise et d'avoir cependant
réussi à soutirer un Himalaya de dollars aux citoyens de leur pays pourtant
déjà à moitié ruinés.
De
même, les principaux cardinaux-dirigeants de l'une des plus grandes
banques états-uniennes - Goldman Sachs , laquelle vient de mendier
10 milliards de dollars à l'Etat fédéral tout en
se payant une partie de la banque rivale, Lehman-Brothers - vont joyeusement
se partager le joli pactole de 12 milliards de dollars tirés d'une cagnotte
secrète dont ils s'étaient bien gardés de faire état.
Aucune autorité politique n'y trouve à redire et ne reprend immédiatement
les 10 milliards abusivement extorqués à la nation.
A
titre de comparaison, les politiciens au service du Dieu-Dollar se préparent
à injecter en tout et pour tout 17 milliards de dollars afin de sauver
les emplois de toute l'industrie automobile. Il faut dire que l'aide
sera accordée aux dirigeants, et pour trois mois, afin de leur
permettre de continuer de produire des véhicules que les gens
sont trop pauvres ou trop ruinés pour pouvoir se les offrir...
Or, les obligations des "Big Three" - General Motors,
Chrysler, Ford - représentent environ le quart de toutes
les obligations industrielles américaines. Avec celles des sous-traitants
et de tous les organismes liés à l'automobile, leur chiffre
s'élève au montant astronomique d'un milliard .
Ces obligations constituent en général les bases de portefeuille
des fonds communs de placement, des caisses de retraite privées,
des banques, etc. On peut aisément imaginer le séisme
que représenterait pour les simples citoyens la mise en faillite
de ces entreprises et l'effet de domino en cascade qui en résulterait!
Les
exemples édifiants continuent. Alors que la banque Merrill
Lynch n'a échappé à une faillite en septembre que pour avoir été
rachetée par Bank of America , son dirigeant M. Thain et
les quatre directeurs principaux réclamaient, pour prix leur calamiteuse
gestion durant l'année 2008 un modeste bonus de 10 millions de dollars
avant de rétro-pédaler piteusement devant le tollé provoqué par leur
demande.
Et
aussi, après avoir reçu 163 milliards de dollars du ministère des Finances
et dans l'attente de 250 milliards de dollars que l'Etat fédéral se
prépare à investir de nouveau dans diverses banques américaines en échange
d'une participation à leur capital, celles-ci se préparent, non pas
à prêter davantage aux entreprises ou aux particuliers et à injecter
des liquidités dans l'économie réelle, mais à utiliser 52% de ces subventions
au bénéfice des seuls actionnaires et au renflouement de leurs pertes.
Quant aux banques qui ont reçu la moitié des 700 milliards
du fameux Plan Paulson, elles refusent purement et simplement d'en justifier
l'utilisation.
... Et
c'est ainsi que le Dieu-Dollar est grand. Et c'est ainsi que ... Et
c'est ainsi...reprennent-ils tous en choeur les yeux au ciel et se
tenant la main, ne voyant pas qu'ils dansent sur un volcan !
- Oubliées les créances immobilières douteuses et dévalorisées, mais
titrisées entre temps, qui polluent toujours les bilans de la plupart
des banques mondiales et de toutes les institutions voraces et alléchées
par le miel empoisonné d'intérêts élevés,
-
Oubliée la faillite retentissante de Lehman Brother,
-
Oublié le danger imminent d'une crise des fameux SWAP et les 55 000
dollars de passif sur le point d'enfoncer un peu plus le système bancaire
dans la déroute.
Les
Européens essaient à leur tour de se montrer à la hauteur de cette gigantesque
immoralité financière. Ainsi, à Monaco, les dirigeants de Dexia ont
modestement fêté leur renflouement par la Belgique et la France en s'offrant
un dîner à 200 000 euros dans un palace. Le lendemain midi, le même
palace a accueilli les pauvres dirigeants de Fortis qui ont conduit
leur établissement à une quasi faillite et auxquels le renflouement
par les Pays-Bas et la Belgique a joliment ouvert l'appétit . En effet,
un déjeuner à 3 000 euros le couvert leur a permis de noyer leur déroute
dans le champagne.
9
- La fabrication de l' argent : comment ça marche 
Oyez,
bonnes gens, oyez, les Etats sont dirigés par des magiciens et les milliards
de dollars naissent spontanément sous leurs pas .
Prenons
l'exemple du gouvernement américain, le responsable de la débâcle bancaire
et aujourd'hui le thérapeute auto-proclamé du désastre.
Le prestidigitateur en chef est le Secrétaire au Trésor, Henry Paulson
- le Ministre des Finances. Ancien PDG de Goldman Sachs, la plus grosse
banque d'affaires de Wall Street, il est d'ailleurs toujours à la tête
d'un gros paquet d'actions de cette banque, estimé à 500 millions en
dépit de la crise boursière . Il se trouve qu'il est justement l'un
des principaux inventeurs du casino boursier qu'il est aujourd'hui censé
discipliner et d'en solder les pertes colossales . C'est donc au responsable
du modèle le plus injuste, le plus corrompu et le plus pervers qui ait
jamais existé sur la machine ronde qu'est confiée, pour l'instant
,la tâche de tenter de le sauver de la déroute.

Henry
Paulson
Le
successeur désigné de M. Paulson que le nouveau Président, M.
Barack Obama, introduira dans la bergerie de l'économie états-unienne,
Timothy Geithner, est également un loup réputé dans le milieu
financier. En effet, en tant qu'ancien responsable de la FED de New-York,
la plus importante parmi les dix régions fédérées regroupées sous le
nom de Federal Reserve System, il a été l'un des acteurs majeurs
de la crise et l'un des principaux responsables de la mise en place
des produits financiers aujourd'hui qualifiés de "toxiques".
En somme l'empoisonneur sera chargé de commencer à administrer
au pays le contre-poison destiné à le remettre sur pied...
dans un mois... et à condition que le patient soit toujours en
vie à ce moment-là ou assez vigoureux pour le supporter
.

Timothy
Geithner
Pour
obtenir les milliards généreusement distribués, l'Etat fédéral et son
magicien actuel et futur disposent de trois sources aussi dommageables
les unes que les autres pour la nation :
1 - Soit l'Etat
émet de nouveaux bons du trésor, destinés à la fois à payer les intérêts
des anciens et à augmenter la dette. Ce qui constitue une variante
légale de la cavalerie pyramidale des escrocs privés, si bien qu'une
bulle monétaire risque de transformer sous peu l'Etat américain en
un vulgaire Ponzi mâtiné de Madoff .
2 - Soit il emprunte
aux banques l'argent qu'il met ensuite à leur disposition afin de
les recapitaliser et de tenter de débloquer le flux de crédits en
direction des particuliers et des entreprises. Cette sorte de boomerang
monétaire crée alors un système délirant dans lequel les banques
sont à la fois les créancières de l'Etat et les bénéficiaires de sa
générosité. De plus, le gouvernement est doublement perdant, puisqu'il
paie aux banques un intérêt sur l'argent emprunté qu'il met
ensuite à leur disposition. Le Dieu-Dollar est vraiment généreux
avec ses servants !
3 - Troisième
solution: l'Etat fédéral emprunte directement à la FED
, laquelle fait " marcher la planche à billets " à grande allure.
Et il suit la voie déjà ouverte par le Zimbabwe , c'est-à-dire celle
d'une inflation galopante et d'une dévaluation de la monnaie. Cette
solution est d'autant plus tentante que les Etats-Unis peuvent impunément
rembourser leurs dettes avec une devise qu'ils impriment à
gogo.
Cette
dernière solution présenterait, en outre, l'avantage immédiat de minimiser
et de quasi effacer la gigantesque dette de l'Etat américain et au passage,
de ruiner les détenteurs étrangers de bons du trésor - notamment
la Chine qui en possède pour une valeur estimée à 1 400 milliards et
sa réserve totale en dollars s'élève à 2
000 milliards .Ce scénatio serait loin de déplaire à la caste
financiaro-gouvernementale des Etats-Unis.
Mais
l'inconvénient de cette solution n'est pas négligeable : à moyen
terme, elle risque de signer la ruine pure et simple de la crédibilité
et le prestige de l'Etat américain et d'accélérer l'agonie
du Dieu-Dollar. Malgré leur légendaire passivité
et leur soumission béate aux Américains, il se peut que
les Etats européens, menés par une Allemagne prudente
et lucide, réussissent à convaincre les grands Etats industriels
- la Chine, l'Inde, la Russie, les pays d'Amérique du Sud - de
créer une zone de stabilité monétaire libérée
de l'emprise du dollar. Cette perspective optimiste signerait la fin
immédiate de l'Empire prédateur et militariste américain
.
Or, il semble qu'après avoir expérimenté l'échec des deux premières
solutions, l'Etat fédéral et les banquiers privés qui possèdent la FED
soient contraints de jouer leur dernière carte et de parier sur l'inflation,
puisqu'ils viennent de rendre l'emprunt quasiment gratuit... Mais, ô
rage, ô désespoir, pour l'instant, les consommateurs ne
consomment toujours pas et les entreprises n'investissent toujours pas,
parce que les banques non seulement n'abaissent pas les taux des crédits
d'une manière visible, mais ne prêtent toujours pas, ou
quand elles le font, c'est au compte-goutte. De plus, leur frilosité
est confortée par la perte de valeur des garanties offertes par
les emprunteurs, notamment celles de la valeur des maisons. Banques
et organismes de crédit préfèrent donc se recapitaliser
eux-mêmes ou chouchouter leurs "pauvres" actionnaires
si rudement éprouvés par la crise. Ce comportement donne
raison au Ministre des finances allemand, M. Peer Steinbrück, qui
avait qualifié de "grotesque erreur" les choix
anglais et américain de tenter de lutter contre la crise par
la création monétaire.
... Et
c'est ainsi que Wall Street est grand et que les banquiers mènent
le monde!
Comme l'écrivait Josiah Stamp (1880-1941), Gouverneur de la Banque
d'Angleterre en 1920 : "Si vous désirez être les esclaves des
banques, et payer pour financer votre propre esclavage, alors laissez
les banques créer l'argent."
Et
l'empereur Napoléon 1er ne disait pas autre chose : "Lorsqu'un
gouvernement est dépendant des banquiers pour l'argent, ce sont ces
derniers, et non les dirigeants du gouvernement qui contrôlent la situation,
puisque la main qui donne est au dessus de la main qui reçoit. [...]
L'argent n'a pas de patrie; les financiers n'ont pas de patriotisme
et n'ont pas de décence; leur unique objectif est le gain."
10
- La mort programmée du Dieu-Dollar et l'immoralité des
nouveaux "barons voleurs" 
Qui
peut croire qu'une frêle digue de papier imprimé de 800 milliards par-ci
et de quelques autres centaines de milliards par-là résistera à l'avalanche
de dettes et de déficits accumulés par la gloutonnerie des financiers
face aux gains espérés dans les jeux du grand casino des produits dérivés
et dont le fonctionnement n'a nullement été réformé
et assaini? Qui
peut croire que les fourmis des banques centrales asiatiques vont sagement
et éternellement poursuivre leurs achats de bons du Trésor émis
par les voraces termites états-uniennes? Qui peut croire qu'elles
continueront à faire confiance à une monnaie dévaluée et à financer
les crédits des particuliers et des entreprises aux USA au détriment
des intérêts de leurs propres citoyens?
D'ailleurs
la Chine pourrait d'ores et déjà provoquer la chute du
dollar ainsi que la mise en faillite des Etats-Unis en mettant sur le
marché les gigantesques réserves de bons du Trésor,
que ceux-ci sont bien incapables de rembourser. Mais comme cette opération
l'appauvrirait elle aussi, tout en ruinant au passage l'Union européenne,
le Japon, les Etats pétroliers, la Russie et tous ceux qui, la
mondialisation aidant, ont accumulé cette monnaie qui brûle
aujourd'hui les doigts de ses détenteurs, chacun essaie de s'en
débarrasser en douceur et en tentant de l'échanger en
catimini et progressivement contre des biens réels.
L'avenir
du dollar est donc l'hyper inflation ou la banqueroute.
a
-
Né dans l'immoralité d'un complot de banquiers en 1909
dans le si symbolique îlôt Jekyll,
Voir
: Aux
sources de la puissance de l'empire : La conspiration de l'Ile Jekyll
- imposé à l'Etat fédéral américain,
à ses citoyens, puis au monde entier d'une manière perverse
et roublarde durant la nuit du 23 décembre 1913 par ces mêmes
banquiers,
Voir: Aux
sources de l'escroquerie de la Réserve Fédérale - Le machiavélisme
des hécatonchires* de la finance internationale
-
perfectionné par la décision du Président Nixon
du 15 août 1985,
Voir :
Voyage circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte
de la caverne d'Ali-Baba
le
règne sans partage du Dieu-Dollar touche à sa fin. Le
système, secoué par moult soubresauts et crises durant
près d'un siècle, agonise dans l'immoralité de
boursicoteurs voraces, de casinotiers de la finance et d'escrocs en
tous genres. Les nouveaux barons-voleurs sont à la manoeuvre
depuis la naissance de cette "monnaie de singe" et
la déroute boursière actuelle est leur oeuvre. Leur destin
rejoint symboliquement celui du héros de Robert Louis Stevenson
dans son roman L'étrange cas du Dr Jekyll et de Mister Hyde.
Après avoir voulu se faire passer pour de bons Dr Jekyll, philanthropes
admirés par l'univers entier, ils révèlent leur
véritable nature qui est celle de redoutables Mr Hide . Comme
dans le roman de Stevenson, Mr Hide a tué le Dr Jekyll et le
Mal a triomphé, pour reprendre la terminologie du XIXe siècle
.
Or,
en politique, la morale rejoint l'efficacité,
car aucune société, aucune politique ne peuvent se passer
d'éthique. En effet, le sentiment d’équité est le fondement
et le ciment de la cohésion des sociétés humaines. Il est si
primordial et si ancien que les éthologues l'ont observé
également chez les chimpanzés ou les singes capucins.
De récentes expériences réalisées sur un
groupe de chiens ont montré qu'il existe même chez les
chiens, qui manifestent leur mauvaise humeur en refusant de répéter
des mouvements lorsqu'ils s'aperçoivent qu'ils sont inéquitablement
récompensés en cas de réussite.
Comment,
dans ces conditions, imaginer que la société née
de l'idéologie de la mondialisation , dont la mise en
place a été accélérée par le remplacement
des ouvriers par des machines et
qui se traduit, en fin de parcours, par l'appropriation, par un tout
petit groupe de privilégiés placés aux commandes
du système global , de la quasi totalité des bénéfices
de la croissance, puisse durablement fonctionner?
Voir
: Le culte du
Veau d'Or et la Mondialisation
Imposée
au monde par les Etats-Unis après la mort du communisme , cette
idéologie est elle aussi à l'agonie.
Après
les crises qu'ils ont provoquées en 1893, en 1907, en 1929, les
nouveaux barons-voleurs rebaptisés banksters - banquiers-gangsters
- sont en passe de tuer la poule aux oeufs d'or. Telle la statue de
Saddam Hussein descellée de son socle et flagellée à
coups de chaussures par des Irakiens qui espéraient avoir été
libérés de la férule d'un dictateur, aujourd'hui,
c'est à la dictature des financiers internationaux que les peuples
sont soumis sur la planète entière et c'est au grand ordonnateur
de la religion du Dieu-Dollar que le monde réserve aujourd'hui
ses quolibets, ses insultes et ses savates par le truchement symbolique
d'un courageux journaliste irakien.

11
- Apologue 
Pour
ce qui est du modus operandi par lequel le Dieu-Dollar rendra
l'âme, je laisse la parole au grand prophète Dino Buzzati,
spécialiste de la destruction de toutes les Balivernas
qui furent un jour orgueilleusement édifiées sur la planète
et dont l'écroulement répond toujours peu ou prou au même
scénario .
*
"... Je grimpai sans difficulté quelques mètres
le long de l'encadrement d'un grand portail muré désormais.
Parvenu sur la partie supérieure, je voulus m'agripper de la
main droite à une sorte d'étoile de fer toute rouillée,
taillée en lance, qui protégeait une petite niche.
(...) Ce fer bien en main, je voulus grimper encore. Mais la lance
céda, se brisant d'un coup. Je n'étais encore, par chance,
qu'à quelques mètres du sol. Je tentai inutilement de
me retenir de l'autre main, perdis l'équilibre, sautai dans
le vide et me retrouvai sur mes pieds sans grand dommage, malgré
le choc assez rude. Et la lance brisée me suivit.
Presque au même instant, derrière la lance en fer,
une autre se détacha, plus longue, qui grimpait verticalement
du centre de l'étoile jusqu'à une sorte de console.
C'était sans doute un support placé là en guise
de rafistolage. Tout appui lui manquant soudain, la console céda
à son tour - figurez-vous une dalle de pierre large comme trois
briques - mais toutefois sans tomber: elle demeura en équilibre,
à moitié descellée.
(...) La console soutenait un poteau d'environ un mètre
cinquante, qui servait à son tour à étançonner
une espèce de balcon. (...) Le poteau avait tout simplement
été encastré entre les deux saillies, sans être
fixé au mur. Deux ou trois secondes après que la console
se fut déplacée, le poteau se plia vers l'extérieur
(...). Il plongea à terre.
(...) Et soudain mon cousin se mit à hurler: "Mon
Dieu, regarde! regarde!"
Je me retournai. Au-dessus du balcon, mais un peu plus sur la
droite, la muraille, compacte et régulière en cet endroit,
se gonflait brusquement. (...) Un bref frémissement se mit
à courir d'abord tout au long de la paroi; puis une longue
protubérance apparut; puis les pierres se disjoignirent, découvrant
leurs assises pourries, et une crevasse ténébreuse s'ouvrit,
béante, sous les éboulements poussiéreux. (...)
Un grondement lugubre s'élevait pendant ce temps des profondeurs
de l'édifice.
(...) Alors, la masse entière du bâtiment, y compris
les murailles de l'autre côté de la cour intérieure,
tout se mit lentement en mouvement, entraîné dans une
irrésistible ruine.
Un terrible grondement, semblable à celui de bombes
et de bombes lâchées par des centaines d'avions libérateurs,
la terre qui tremblait, un nuage de poussière jaunâtre
recouvrant rapidement cet immense sépulcre."
Dino Buzatti, L'Ecroulement de la Baliverna,
(traduction de l'italien par Michel Breitman) 
*
[Note1 ] : Je
renvoie à l'excellente étude d'un spécialiste des Picrocholiens. Son
analyse du grand ancêtre, Picrochole 1er, qui s'est illustré dans la
célèbre "Guerre des fouaces" , fait autorité. J'en donne
ci-dessous un extrait et je renvoie le lecteur à l'étude complète :"Dans
Gargantua, la guerre permet de mettre sur pied un massacre universel,
c'est-à-dire un chaos absolu, providentiel et gigantal, en vue d'une
démiurgie nouvelle. (...) Les armées de Picrochole, envahissant les
terres de Grandgousier, passent " sans épargner ni pauvre, ni riche,
ni lieu sacré, ni profane .(...) C'était un désastre incomparable qu'ils
faisaient. " (...)
Manuel de Diéguez
, Rabelais, Encyclopaedia Universalis, t.XIII (retour)
[Il s'agit bien là de la description
prémonitoire et parfaitement exacte du fameux "Chaos
créateur" censé produire le non moins célèbre
"Nouvel Ordre Mondial" ] .
Note 2 : Le document
original de l'accusation (en anglais)
http://news.lp.findlaw.com/hdocs/docs/madoff/20081211complaint.pdf
L'ordre du juge fédéral de bloquer les avoirs
et les comptes de Bernard Madoff (en anglais)
http://www.madoff.com/letters/Signedorder.pdf (retour)
Note 3 : L'article
308 de la Loi Sarbanes-Oxley permet d'indemniser les victimes des
infractions à la Loi sur les valeurs mobilières au moyen du Federal
Account for Investor Restitution (FAIR Fund). Ce fonds sert à retourner
aux épargnants les sommes récupérées avec les pénalités civiles dans
les dossiers de restitution de sommes détournées (disgorgement).
La décision d'imposer une pénalité administrative ainsi que le montant
exigé sont fixés par la cour. Les détails des recommandations sont disponibles
à l'adresse suivante : [ http://www.sec.gov/news/studies/sox308creport.pdf
].(retour)
Aline de Diéguez
29
décembre 2008