""
Ce qu'il y a de terrible quand on cherche la vérité, c'est
qu'on la trouve."
Rémy de Gourmont
1
- La bestialité propre aux hommes
2 -
Quelques exemples de bestialité humaine
3 - De la violence
et de la haine quotidiennes
4 - Konrad Lorenz et
la tribu des rats
5 -
Qu'est-ce que la force en politique?
6 - Qu'est-ce qu'un
territoire mythique ?
7 - Conclusion
1
- La bestialité propre aux hommes 
Lorsque
le général commandant en chef des forces aériennes de l'Etat d'Israël
, Dan Alutz , auteur du largage sur une maison de Gaza d'une
bombe d'une tonne qui a réduit quatorze personnes en bouillie , est
interrogé par un journaliste sur ses impressions à ce moment-là, il
prononce ces "paroles ailées" (Homère) : "Ce
que je ressens quand je lâche une bombe ? Simplement une légère secousse
dans l'aile (de l'avion) quand on fait partir la bombe".
Et il ajoute : "Je dors bien la nuit".
Supposons
que Dan Halutz, au lieu d'être installé confortablement dans le cokpitt
de son avion, soit obligé de se ruer dans la maison de ses victimes
, de bondir à la gorge du père et de lui trancher la veine jugulaire
d'un coup de dents; puis il se précipiterait sur la mère
et les enfants, et il leur arracherait le cœur et les entrailles avec
ses ongles. Dormirait-il alors aussi douillettement, alors que le résultat
aurait été à peu près identique pour les
victimes?

Chien
de l'armée israélienne en pleine action
C'est
pourquoi l'expression " l'homme est un loup pour l'homme " est
une insulte pour les loups .
En
effet, dans son essai L'agression, une histoire naturelle du mal
, l'éthologue autrichien, Konrad Lorenz montre que chez les animaux
normaux et en liberté, l'agression est une confrontation au corps à
corps, qu'elle est toujours ritualisée et ne se déclenche que d'une
manière prévisible et rationnelle. Alors que les animaux ne tuent que
dans des circonstances très précises, connues des belligérants et en
général utilitaires - recherche de la nourriture, défense du territoire
contre un intrus, non respect des codes de préséance dans un groupe,
etc. - le savant autrichien démontre que les explosions de violence
humaines sont beaucoup plus dangereuses, parce que les hommes ont perdu
les spécialisations instinctives qui , chez les animaux, provoquent
les réactions d'agressivité .
Cette
dérégulation des instincts est la source d'une violence anarchique et
disproportionnée. " Il y a toujours, écrit-il, un décalage
entre la portée effective des armes et celle du sentiment moral. "
Et il ajoute : " La distance à laquelle les armes à feu sont efficaces
est devenue suffisamment grande pour que le tireur soit à l'abri des
situations stimulantes qui, autrement, activeraient ses inhibitions
contre le meurtre. Les couches émotionnelles profondes de notre personne
n'enregistrent tout simplement pas le fait que le geste d'appuyer sur
la gâchette fait éclater les entrailles d'un autre humain. " (Lorenz,
op.cit)
Contrairement
à certaines idées reçues, le comportement " stupide et répugnant
" des " masses humaines " n'est donc pas une survivance des temps
archaïques et pré-humains. Il résulte, au contraire, de l'utilisation
des innovations technologiques qui ont réduit et même - comme le démontre
la réaction citée ci-dessus du haut gradé militaire israélien - anéanti
totalement chez l'homme les mécanismes inhibiteurs qui commandent l'agressivité
et donc le meurtre individuel ou les massacres de masse. Car "l'homme
qui appuie sur un bouton est complètement protégé des conséquences perceptives
de son acte". La Barbarie commence seulement . [1]
2
- Quelques exemples de bestialité humaine 
Dès lors, on comprend mieux comment des soldats d'une armée d'occupation
ont tué , depuis l'an 2000, un millier d'enfants palestiniens
qui ne représentaient pas le moindre danger pour eux ou pour leur
Etat.
Certains de ces enfants ont certes été victimes de la cohorte des Alutz
larguant des bombes d'une tonne sur des habitations ou ou de missiles
tirés dans la foule par des individus du même acabit . Ces victimes-là
se sont fondues dans les statistiques et sont comptabilisées sous la
dénomination de " dommages collatéraux ". [2]
Mais
d'autres enfants ont été abattus de sang-froid d'une balle dans la tête
ou se sont vidés de leur sang sous les yeux de soldats qui empêchaient
les secours d'approcher, comme le révèle le journal israélien
Haaretz lui-même , qu'on ne peut qualifier de journal
de propagande anti-israélienne. [3]

Soldat
de Tsahal menaçant un dangereux terroriste
Abir
Aramin a 10 ans. Elle sort paisiblement de son école en compagnie
de ses compagnes. Une jeep fortifiée des célèbres "garde-frontières
" d'un pays qui refuse de se donner des frontières , effectue lentement
des allers et retours devant l'école, provoquant la panique des petites
écolières qui s'égayent comme une nuée de moineaux. Un des rambos qui
sévissent habituellement aux check-points et dont la présence à cet
endroit à l'heure de la sortie n'a évidemment d' autre justification
que celle de terroriser les enfants, vise la tête de l'enfant blottie
contre le mur d'une boutique à travers un trou spécial fait dans la
vitre de sa jeep. Le carton est réussi, comme dans une fête foraine,
et la balle enrobée de caoutchouc fait exploser le cerveau d'Abir .
La jeep poursuit tranquillement sa route.

Abir Aramin,
10 ans
Ayman
Abou-Mahdi a lui aussi 10 ans. Il vient de rentrer de l'école. Il
est assis sur un banc près de sa maison. Un char passe et une balle
de mitrailleuse pulvérise la tête d'Ayman. Le char poursuit tranquillement
sa route.
Boushra
a 17 ans . La nuit est tombée. Elle va et vient dans sa chambre éclairée,
un cahier de grammaire dans les mains, révisant ses leçons en vue de
l'examen du lendemain . Un sniper réussit un joli exploit : une balle
atteint Boushra en plein milieu du front . A-t-il reçu les félicitations
de ses supérieurs pour ce tir particulièrement bien ajusté?
Jamil
Jabaji , 14 ans , a été tué d'une balle en pleine tête à Naplouse,
Taha Aljawi , 14ans et demi , blessé aux jambes, a été laissé
agonisant dans un fossé jusqu'à ce que mort s'ensuive; Ahmed Asasa
, 14 ans lui aussi, a été atteint d'une balle dans le cou alors qu'il
passait de sa maison dans celle de son oncle. Les soldats tiraient sur
ceux qui venaient à son secours. Il s'est vidé de son sang durant une
heure et demi avant de mourir. La liste n'est pas close. [4]
Et
pourtant, ces soldats-là n'étaient officiellement qualifiés ni de fous
dangereux, ni de criminels. C'étaient des soldats ordinaires, banalement
normaux, d'une armée régulière , qui se vante d'être "la plus
morale du monde", parfois des réservistes pères de famille.
D'ailleurs, aucun n'a été ni jugé, ni inquiété.
Certes,
on n'imagine pas que l'armée, en tant qu'institution principale
de l'Etat hébreu , donne officiellement des directives afin que
ses membres abattent délibérément des enfants,
fussent-ils palestiniens. Cependant, les témoignages sont là,
qui prouvent, d'une part, que la pratique n'est pas exceptionnelle -
et elle explique le nombre très élevé de victimes
- et d'autre part, que, n'étant pas sanctionnés, ces actes
qui sont pour le moins tolérés , finissent par devenir
une sorte de jeu de massacre, comme dans une fête foraine , sans
que les soldats qui s'y livrent se sentent psychiquement concernés.
Le
journaliste israélien Gideon Levy écrivait déjà
le 17 octobre 2004 dans Haaretz : " Who would
have believed that Israeli soldiers would kill hundreds of children
and that the majority of Israelis would remain silent? Even the Palestinian
children have become part of the dehumanization campaign: killing hundreds
of them is no longer a big deal." (Qui aurait pu croire que
des soldats israéliens tueraient des centaines d'enfants et que
la majorité des Israéliens feraient silence? Même
les enfants palestiniens font partie intégrante de la campagne
de déshumanisation : en tuer des centaines n'est plus une grande
affaire.) [5]
La
situation a empiré depuis le cri d'alarme du courageux journaliste
et non seulement la majorité des Israéliens continue de
faire silence , mais certains milieux religieux proches du gouvernement,
ont absous d'avance les auteurs de ces massacres, en ont théorisé
la nécessité et ont donc ouvertement encouragé
le passage à l'acte.
En
effet, selon le Conseil talmudique des rabbins et des sages de la
Torah, connu sous le nom de "Yesha", qui représente les colonies
juives de la Cisjordanie et de Jérusalem occupées, il est permis,
et même souhaitable, de viser et d'exterminer les civils non-juifs en
temps de guerre.
Les
Occidentaux ignorent tout des lois talmudiques et la manière
dont elle elles se traduisent dans le comportement de l'armée
d'occupation à l'égard des Palestiniens et plus généralement
à l'encontre de tous les "non-juifs" . Pour beaucoup
d'entre eux, l'Etat hébreu est un Etat miraculeux, la "seule
démocratie du Moyen-Orient", dont la renaissance apporterait
lumière et espérance à tous les opprimés
de la terre . Quelques informations élémentaires leur
permettraient de mieux comprendre les raisons des massacres de l'armée
israélienne en Palestine et aussi pourquoi les auteurs de ces
massacres ne sont jamais inquiétés.
Certes, le code pénal officiel de l'Etat d'Israël ne
fait pas état de différences entre les hommes , mais
les décisions des juges , dans la vie quotidienne , ainsi que
le comportement des soldats, sont largement influencés par le
Talmud et par les injonctions des rabbins qui établissent toutes
sortes de distinctions entre les infractions commises par un gentil
sur un juif, par un juif sur un gentil ou par un juif sur un autre juif.
Or de plus en plus de membres de cette armée sont très
religieux et viennent des colonies de Cisjordanie . Ce sont donc doublement
des occupants : en tant que colons et en tant que soldats. .
L'invocation du Président de la République française
à des "valeurs universelles" de la "nation
juive" a dû faire sourire dans sa barbe plus
d'un rabbin .
Remarquons en passant que notre Président a redonné une
nouvelle vie à l'expression "nation juive"
tombée en désuétude depuis la chute de Jérusalem
et la destruction du Temple par les légions de l'empereur Titus
il y a près de deux millénaires. Ou peut-être a-t-il
voulu établir un trait d'union discret entre la dispersion d'une
partie de la population de Jérusalem après la défaite
des combattants juifs devant Titus et la reconnaissance frénétiquement
réclamée par le gouvernement israélien d'un "Etat
juif" ethniquement "pur", c'est-à-dire,
pour parler clairement et sans langue de bois, débarrassé
de l'impureté que constitue l'existence des Palestiniens . C'est
pourquoi le parallèle est troublant entre la revendication des
autorités israéliennes et l'emploi par le Président
de la République française de l' expression "nation
juive", qui figure pour la dernière fois dans la
célèbre Guerre des Juifs de l'historien
du 1er siècle, Flavius Josèphe, contemporain des
événements (voir Livre VII, siège de Jérusalem
et attaque de Massada).
En
1973, une brochure officielle destinée aux militaires israéliens
pieux contenait les recommandations suivantes:
«Quand
au cours d'une guerre, ou lors d'une poursuite armée ou d'un raid, nos
forces se trouvent devant des civils dont on ne peut être sûr qu'ils
ne nous nuiront pas, ces civils, selon la Halakhah, peuvent et même
doivent être tués […] En aucun cas l'on ne peut faire confiance à un
arabe, même s'il a l'air civilisé […] En guerre, lorsque nos troupes
engagent un assaut final, il leur est permis et ordonné par la Halakhah
de tuer même des civils bons, c'est-à-dire les civils qui se présentent
comme tels.»
D'ailleurs
un précepte talmunique précise que "si un gentil
tombe dans un puits, il ne faut pas l'aider à en sortir",
même si le texte ajoute, magnanime, qu'il "ne fallait
pas non plus l'y pousser pour le tuer". En somme, il suffit
de le laisser se noyer, c'est-à-dire ne pas le tuer directement.
Mais au cours d'une guerre, "c'est une mitzvah [un
impératif religieux] de les [les gentils] tuer".
Certes,
le Talmud est un vaste ensemble de commentaires, qui ne contient pas
uniquement des textes d'exécration des non-juifs. Néanmoins,
ils y figurent aussi. De même que les mathématiciens ont
élaboré toute une géométrie à partir
des postulats d'Euclide - et notamment à partir du cinquième
de ces postulats - les docteurs talmudistes ont rédigé
au cours des siècles une somme impressionnante de commentaires
à partir du postulat, plus inébranlable à leurs
yeux que les axiomes euclidiens, que les Hébreux et
leurs descendants sont un peuple élu par un Dieu privé
, lequel veille tout particulièrement au confort et à
la prospérité de leur communauté sur cette terre,
et pourvoit à leur salut dans l'au-delà . Ce Dieu
serait prêt à tout, y compris aux pires horreurs, afin
de porter dommage , d'affaiblir et même d'exterminer les ennemis
de "son" peuple .
Le
cinquième postulat d'Euclide, dit "postulat des parallèles",
énonce, dans sa formulation admise et qui n'est pas la formulation
littérale, que « par un point extérieur à une droite donnée,
ne passe qu'une unique droite qui lui est parallèle ». Or, le savant
allemand Bernhard Riemann (1826-1866) n'a eu aucune difficulté
à démontrer que dans la
géométrie sphérique et sur des surfaces courbes, il n'existe aucune
droite parallèle à une droite donnée passant par un point extérieur
à cette droite. A partir de ce nouveau postulat, Reimann a créé,
par déductions successives, une nouvelle géométrie.
Or,
les travaux d'exégèse biblique sont aujourd'hui suffisamment
avancés pour déterminer à quel moment historique
précis, dans quelles conditions politiques et dans quel but a
été inventée la notion de "peuple élu"
. Plusieurs savants Reimann de l'exégèse ont établi
qu'un petit groupe sacerdotal a introduit progressivement cet axiome
"euclidien" dans le tissu composite de traditions , de pensées,
de croyances qui circulaient librement parmi les innombrables tribus
nomades qui se déplaçaient entre l'Egypte et la péninsule arabique plusieurs
millénaires avant les premières rédactions de ce
qui deviendra la Bible . On peut suivre à la trace dans le texte
définitif la manière dont ces ajouts tardifs ont bouleversé
dans un sens étroitement communautariste l'esprit et la morale
universels qui animaient les premiers écrits . Des bribes, que
les rédacteurs tardifs n'ont pas réussi à gommer,
surnagent ici et là , rendant certains passages contradictoires
ou constituent des doublons.
Mais
il est toujours pénible de renoncer à des "avantages
acquis". C'est pratiquement impossible lorsque ces "avantages
psychologiques acquis" se sont bétonnés dans
les cerveaux de leurs bénéficiaires au fil des siècles
. C'est ainsi qu'ils assurent aujourd'hui à un groupe humain
particulier une domination de fait sur un autre peuple. Il est plus
difficile de changer de psychologie que de géométrie.
C'est pourquoi, de fil en aiguille et de déduction logique en
conséquence fatale , à partir des notions de "peuple
élu" et de "territoire donné par un dieu"
on en arrive à justifier une occupation , puis à quasiment
annexer la Cisjordanie; et de recommandations talmudistes en comportements
relâchés sur le terrain, on voit des soldats d'une armée
régulière tirer sur des enfants pour l'unique raison qu'ils
ne sont pas juifs.
Or,
une occupation est assimilable à une guerre permanente et il n'y a pas
d'âge pour entrer dans la catégorie des " ennemis du peuple juif
". Une des dernières recommandations figurant sur le site israélien
"Ynetnews" du journal Yediot Aharonot, stipule
que "selon la loi juive, en temps de guerre, il n'existe pas de
'civils innocents' [dans le camp] de l'ennemi" et
que "toutes
les discussions sur la moralité chrétienne affaiblissent l'esprit de
l'armée et de la nation et nous coûtent le sang de nos soldats et civils
" . Le même conseil avait déjà publié une décision analogue
: il conseillait à l'armée israélienne "d'exterminer l'ennemi"
et de "ne pas hésiter à massacrer les civils ennemis".
Quant
aux conventions internationales et aux lois interdisant de prendre délibérément
pour cibles les civils en temps de guerre, le conseil les stigmatise
avec mépris sous le terme de "moralité chrétienne". [6]
Comme
l'écrit le poète et helléniste israélien
[7], qui refusa de participer
à la délégation de son pays, "invité
d'honneur" du salon du livre à Paris au printemps 2008,
afin de ne pas cautionner la politique "colonialiste , belliciste
et criminelle" de l'Etat hébreu:
La
marque de Caïn ne paraîtra pas
chez le soldat qui tire
visant la tête d'un enfant
sur un repli du terrain près de la clôture du camp de réfugiés...
"
Aharon Shabtai " Culture ".
De nombreux témoignages de soldats commencent enfin de pointer le bout
de leur plume dans la presse écrite française. Ils révèlent
que les actes de cruauté gratuite des forces d'occupation à
l'égard des simples civils sont en augmentation, tant en nombre
qu' en intensité (voir le Monde du 31 mai 2008
sous le titre: D'anciens soldats israeliens racontent les dérives
de l'occupation à Hébron.)

"Israël
a le droit de se défendre..."
Voici,
parmi des dizaines de récits bouleversants, celui d'une jeune recrue
rapportant le comportement de son unité au cours d'une ronde de routine:
" On était à bord d'un véhicule, on passait simplement dans une
rue. Un gars de 25 ans se trouvait par là. Comme ça, sans raison, qu'on
ne vienne pas me dire qu'il y avait une raison. Il n'avait pas lancé
de pierre, rien. Tac, une balle dans le ventre… On lui tire une balle
dans le ventre et il est là à agoniser sur le trottoir et nous continuons
à rouler, indifférents. Aucun ne le regarde deux fois… ". [8]
3
- De la violence et de la haine quotidiennes 
Une
troupe d'occupation n'est pas une armée classique. Face
à "l'étranger" dont il veut s'approprier le territoire,
le léger vernis de civilisation qui semble séparer l'homme de l'animal
vole en éclats et l'instinct brutal et primaire du néolithique réapparaît,
venimeux, destructeur, implacable. Comment expliquer autrement que par
une haine à couper au couteau, une haine indéracinable qui trouve sa
source chez la bête humaine luttant pour la conquête d'un lopin du temps
de l'âge de la pierre taillée, le comportement d'un officier israélien
face à un petit enfant de quatre ans étranger à sa propre horde, pour
employer le vocabulaire de La Guerre du feu ?
" Six heures du matin. Rafah est sous couvre-feu. Y a pas un chat
dans les rues. Seulement un petit enfant de quatre ans qui joue dans
le sable. Il bâtit une espèce de tour comme ça dans la cour de sa maison.
Celui-là se met tout à coup à courir et tous, nous courons avec lui.
Il était du génie. Nous courons tous avec lui. Il attrape le gosse.
Noufar, je suis un fils de pute si je ne dis pas la vérité. Il lui a
brisé le bras, ici, à l'articulation. Il lui a cassé le bras à hauteur
du coude. Il lui a cassé la jambe ici. Et il a commencé à lui marcher
sur le ventre, trois fois. Puis il est parti. Nous étions tous bouche
bée, le regardant, choqués… Le lendemain, je repars en patrouille avec
lui et déjà les soldats commençaient à faire comme lui. " [8]
Et
pourtant , des êtres hautement civilisés ont existé
depuis des siècles sur la planète . Mencius, un
sage chinois qui vécut il y deux millénaires et demi semble
répondre au barbare de Tsahal. Il écrivait au IVè
siècle avant notre ère :
«C'est
pourquoi je dis que tous les hommes ont le sens de la compassion : un
homme remarque soudain un enfant qui est sur le point de tomber dans
un puits ; immanquablement il s'inquiète et s'apitoie, non pas pour
gagner la faveur des parents de l'enfant, ou pour chercher l'approbation
de ses voisins et de ses amis, ou par peur d'être accusé s'il ne le
sauvait pas. Ainsi nous voyons qu'aucun homme n'est dénué du sens de
la compassion, ou du sens de la honte, ou du sens de la politesse, ou
du sens de ce qu'il faut faire ou ne pas faire. Le sens de la compassion
est le début de l'humanité, le sens de la honte est le début de la vertu,
le sens de la politesse est le début de la bienséance, le sens de ce
qui est bien ou mal est le début de la sagesse. Tout homme a en lui
ces quatre principes, de même qu'il est pourvu de quatre membres. Aussi
l'homme qui se répute incapable de les exercer se détruit-il lui-même.»
Si certains croient encore en des principes d'humanité et d'éthique
universels, ils ont du souci à se faire. Le sage chinois
était un grand optimiste . Il ne savait pas que le réflexe
tribal et les lois qu'il sécrète anéantissent toute
compassion et toute humanité et rabaissent les hommes en-deça
du règne animal. Car, comme
le démontre l'éthologue Konrad Lorenz, les mammifères adultes
normaux éprouvent une inhibition spontanée face à un petit de leur propre
espèce . Le
vieux chien le plus féroce n'attaquera jamais le chiot naïvement
insolent qui lui mordille les pattes.
Jane
Goodall avait observé que le réflexe de protection d'un
bébé est également répandu chez les chimpanzés
ou les gorilles. Or, dans le témoignage ci-dessus, on voit que l'officier
israélien est totalement dépourvu de ce réflexe primaire du mammifère
supérieur et ce d'autant plus qu'il n'est même pas psychologique
protégé par la "distance" que crée
le meurtre indirect par impact lointain dont parle Lorenz . Pour que
l'officier israélien se déchaîne avec une telle
cruauté , il faut que, dans son esprit, ce petit enfant ne fasse
pas partie de l'espèce humaine . C'est pourquoi il se rue donc
sur lui comme s'il s'agissait de détruire un cafard ou un dangereux
prédateur.
D'autres
soldats de Tsahal n'hésitent pas à immortaliser leur trophée
dans leur "chasse au palestinien" et posent, souriants,
pour une photo-souvenir, un pied sur la "bête"
anéantie.

Trophée
de chasse : pause-photo
Ces comportements nous renvoient des millénaires en arrière à
une époque où n'existait aucune solidarité entre
les hommes autre qu'étroitement tribale - la fameuse "compassion"
qu'évoque le sage Mencius . Ils rappellent les descriptions romancées
de Rosny aîné , dans La Guerre du feu où
l'on voyait les hordes à peine humanisés des Oulhamrs,
des Nains rouges ou des Wah s'acharner à tuer tous les étrangers qu'ils
surprenaient près de leur horde car, comme disait le vieux Goûn
dont semblent s'inspirer le soldats de Tsahal, "il vaut mieux
laisser la vie au loup qu'à l'homme; car l'homme que tu n'as
pas tué aujourd'hui, il viendra plus tard avec d'autres hommes
pour te mettre à mort". Il suffit de remplace le mot
"homme" par le mot "Palestinien" pour actualiser
la phrase.
En martyrisant
l'enfant qu'il voudrait écrabouiller de son gros brodequin clouté,
c'est le futur combattant, ainsi que le problème général que pose à
son Etat et à lui-même l'existence même du peuple palestinien
que l'officier israélien cherche à anéantir .

Un
soldat de Tsahal tenant en joue un groupe de redoutables "terroristes"
palestiniennes. Ne pas se fier aux collerettes en dentelle et remarquer
le regard féroce de la "terroriste", à gauche
sur la photo.
Ces
exemples permettent de comprendre pourquoi les déchaînements
de violence contre la population palestinienne sont la norme et non
l'exception . Ils renvoient à la définition que les éthologues donnent
de l'agression gratuite qui caractérise la dérive d'une bestialité typiquement
humaine . Elle se manifeste lorsque tout est permis et qu'il
s'agit d'infliger à une victime innocente un dommage intentionnel maximal
sans aucune raison rationnelle et sans bénéfice immédiat.
Les enfants, souvent très jeunes, n'ont pas besoin d'un long apprentissage
pour se comporter en bourreaux et pour exercer un "impérialisme
au quotidien " qui consiste à maltraiter impunément tout élément
d'une race qu'on lui a appris à considérer comme inférieure et à
mépriser.

Exemple
de l'éducation d' enfants israéliens
La
psychologie collective du groupe s'est sédimentée au fil des siècles
à partir des directives et des préceptes contenus dans les commentaires
talmuniques de l'Ancien Testament qui règlementent, en réalité,
la vie quotidienne des Israéliens. Comme le montre ce témoignage
d'un soldat , à l'occupant armé jusqu'aux dents face à des civils désarmés,
lorsque tout est permis, le pire devient non seulement possible,
mais certain:
"
Ce qui est le plus important c'est que ça te dégage du joug de la loi.
Tu sens que c'est toi la loi. Tu es la loi. C'est toi qui décides, qui
tranches… Comme si au moment où tu quittes cet endroit appelé Israël
et que tu entres par le barrage d'Erez, dans la Bande de Gaza, tu es
la loi. Tu es dieu. "

Coup
de matraque au visage d'une Palestienne par une soldate de Tsahal dont
la mimique est éloquente
4 - Konrad Lorenz
et la tribu des rats 
Konrad
Lorenz éclaire une fois encore notre lanterne . Supposons, dit-il,
qu'on en appelle à un "observateur extra-terrestre" qui serait
un " éthologue " bien informé. Il nous expliquerait que "
l'organisation sociale des hommes ressemble
beaucoup à celle des rats qui, eux aussi, sont, à l'intérieur de la
tribu fermée, des êtres sociables et paisibles mais se comportent en
véritables démons envers des congénères n'appartenant pas à leur propre
communauté. "
Un
pilier des médias, et également professeur de philosophie , comme
Alain Finkielkraut, a pu écrire sans état d'âme dans le
journal Le Monde , qu'il "appartient à la plus
vieille tribu du monde".
Nous voilà bien au cœur du sujet évoqué par le savant autrichien. La
tribu , le clan, la horde, l'ethnie ou la race, tous ces termes ont
en commun de renvoyer à un groupement humain clos et localisable sur
un certain territoire. En effet, qui dit tribu, dit territoire,
car les hommes partagent avec tous les animaux, des rats à nos proches
cousins, les singes, le critère primaire et primordial d'appartenance
à un territoire .
Or,
dès qu'il est question de territoire, donc de frontières, l'agressivité
entre dans la danse. Car la défense d'un territoire s'exprime, depuis
la nuit des temps, par un instinct destructeur, un rejet et même
une haine viscérale des étrangers. Ce sentiment est si puissant, tant
chez les animaux que chez les hommes, que ces derniers acceptent de
mourir ou de tuer pour défendre leur bien le plus précieux : la terre
. C'est ce que les sociétés humaines appellent la défense sacrée
de la patrie.
Comme
le résumait Buffon à propos du loup : " Cet animal est très méchant,
quand on l'attaque, il se défend ". Traduite en langage militaro-politique
israélo-américain, cela donne : " Les Afghans (
ou les Irakiens, ou les Palestiniens) sont très
méchants (ce sont même d'horribles " terroristes
"), quand on les attaque (pour les voler, les tuer, les
piller, les spolier) , ils se défendent. "
Contrairement
aux animaux qui , en général, demeurent confinés dans le territoire
qu'ils ont choisi ou conquis, les animaux humanisés ne connaissent pas
de limitation naturelle de leur territoire. Leur instinct les pousse
à s'augmenter encore et toujours. Les guerres de conquête
ou la constitution des empires dont l'histoire a retenu le nom, ne sont
pas simplement dûs à la lubie ou à un ego surdimensionné
de leurs dirigeants du moment - par exemple à l'action personnelle
de Louis XIV, de Charles Quint, de Napoléon , de Jules César
ou d'Alexandre le Grand. Ces conquérants ont été
les catalyseurs de l'impérialisme latent de leurs peuples
respectifs et l'expression de la puissance de leur nation à ce
moment-là.
L'exemple des Etats-Unis d'Amérique et d'Israël aujourd'hui
- les deux ne faisant qu'un , l'Etat hébreu étant un maillon
essentiel de l'impérialisme américain au Moyen-Orient
- cet exemple, dis-je, prouve que, même avec des dirigeants médiocres,
un Etat économiquement et militairement puissant peut devenir
un empire .
Or,
il existe en Israël une mythologie rédemptionniste de
la terre qui est le moteur caché de la colonisation forcenée
et qui joue un rôle de démultiplicateur de l' impérialisme
spontané de cet Etat . Selon l'idéologie officielle du
sionisme, une terre est "rédimée",
c'est-à-dire "rachetée", donc
"sauvée", lorsqu'elle devient une "propriété
juive" . Par une inversion perverse du vocabulaire,
une terre possédée par un non-juif - en l'espèce,
évidemment, par un Palestinien - est une "terre occupée"
, même si les ancêtres de notre Palestinien possèdent
cette terre depuis des siècles. C'est pourquoi les expulsions,
les transferts et autres formes de vol pur et simple selon les lois
en vigueur dans les démocraties, permettent de "rédimer"
la "Terre d'Israël" en la purifiant de la souillure
que représente le fait qu'elle soit cultivée et habitée
par des non-juifs, autrement dit, par des Palestiniens.
La
colonisation n'est donc pas un accident de parcours annexe, auquel une
injonction internationale pourrait mettre fin. Elle est le coeur même
de l'idéologie, non seulement des sionistes purs et durs, mais
tacitement de l'ensemble des Israéliens. Elle explique la multitude
d'interdits bureaucratiques qui pourrissent la vie des Palestiniens,
y compris de ceux qui sont , nominalement et officiellement , citoyens
de l'Etat hébreu: interdiction de travailler sur des terres "juives",
interdiction d'en acquérir ou d'y résider, interdiction
d'emprunter des routes réservées aux seuls juifs, etc.
5
- Qu'est-ce que la force en politique? 
La
politique ne connaît qu'un certain type de force, celui que les
physiciens appellent la " force résistante ". L'expansion impériale
ne s'arrête que lorsqu'elle rencontre un mur - c'est-à-
dire une résistance - ou qu'elle déraille - c'est-à-dire
qu'elle s'auto-détruit. La première et la plus classique
de ces forces est la résistance
des peuples envahis ou conquis, mais ce n'est pas la seule. Ainsi, grâce
à ses petites roquettes artisanales qui ne font pas de gros dégâts,
mais créent la panique dans les localités frontalières,
Gaza la vaillante et la résistante tient tête à
un occupant monstrueusement armé . Malgré les tentatives
de l'occupant de l'affamer , de l'empoisonner ou de la terroriser, elle
vient de réussir à lui imposer un cesser-le-feu , ce qui,
dans ce type de rapport de force constitue une quasi victoire .
Les
colons européens ont bafoué tous les traités qu'ils ont signés avec
les Indiens d'Amérique du Nord et du Sud et ont fini par exterminer
le plus grand nombre des autochtones amérindiens , puis à parquer
les survivants dans des enclos appelés "réserves".
Sur
le même modèle, Israël détruit tout ce qu'il peut détruire en Palestine
occupée, déverse ses bombes sur la population civile, assassine
les civils, dynamite les maisons, déracine les arbres, stérilise
les champs en les défonçant au bulldozer, affame un million
et demi de Gazaouis et , à l'image des réserves indiennes des USA, parque
les Palestiniens de Cisjordanie dans des enclaves fermées . Un membre
espagnol du Parlement Européen en tournée au Moyen Orient, David
Hammerstein, a pu écrire que "la situation à Hébron
est barbare et [que] la ville vit en-dessous des formes
les plus affreuses de l'occupation " .
[9]

Légalement,
les destructions de maisons sont considérées comme un crime de guerre
selon les Conventions de Genève de 1949.
L'Etat
hébreu commet ces atrocités tout simplement parce qu'il le peut, c'est-à-dire
parce qu'il ne rencontre aucun obstacle sérieux qui l'empêcherait de
le faire, compte tenu de la psychologie qui est la sienne .
Certes,
ce petit Etat de cinq millions d'habitants est la quatrième puissance
militaire mondiale et dépasse donc l'arsenal de la France. Son
gigantesque équipement ultra moderne, tant nucléaire que
classique , financé et alimenté en permanence par les
Etats-Unis ne l'empêche nullement de faire retentir la terre et
les cieux de ses gémissements et de ses lamentations sur les
"menaces" dont il est l'objet de la part d'ennemis
qui ne possèdent qu'une microscopique proportion de cette puissance
militaire. En même temps, il brandit très haut le bouclier
les grands malheurs dont il a été la victime en Europe
durant la seconde guerre mondiale afin de réactiver constamment
un sentiment de culpabilité destiné à éteindre
toute veilléité de critique. Car la "Shoah"
est devenue la véritable religion des Israéliens . Les
commémorations et les pèlerinages sont devenus rituels
dans toutes les écoles . [10]
L'insulte
ignominieuse d'antisémite qui stigmatise immédiatement
les audacieux commentateurs qui oseraient formuler la moindre critique
de cette politique en décourage plus d'un, notamment aux Etats-Unis
- mais pas seulement - où l'omerta la plus complète est
de rigueur sur les campus universitaires et dans tous les médias
dominés par de puissants lobbies de cet Etat.
C'est
pourquoi la véritable force d'Israël est politique. Elle
réside dans la complaisance à ses exactions de ce qu'il
est convenu d'appeler la "communauté internationale"
et dans le soutien indéfectible des Etats-Unis, qui lui assurent
une impunité totale sur la scène internationale .
Voir : Chroniques
de la Palestine occupée: 7 - Ils ont crucifié Marianne en Palestine
ou Les nouveaux exploits de Tartuffe
Pendant
que cet Etat gémit et crie au loup sur le devant de la scène,
il jouit béatement de sa puissance dans les coulisses. Dans un
ouvrage récent, un ancien Premier Ministre de 1954 à 1956
, Moshé Sharett, avoue qu'Israël se crée lui-même
volontairement de nouveaux ennemis afin de mener à bien ses projets
de conquêtes :
"Israël
n'a pas d'obligations internationales, et pas de problèmes économiques.
La question de la paix n'existe pas. Le glaive doit être l'instrument
principal, sinon unique, d'Israël pour maintenir son moral élevé et
garder sa tension morale. Dans ce but, Israël doit inventer des dangers
en adoptant la méthode "provocation-et-revanche". Et, par-dessus tout,
souhaitons une nouvelle guerre avec les pays arabes, de manière à ce
que nous nous débarrassions de nos problèmes et acquérons notre espace.
Comme l'a dit Ben Gourion, cela vaudrait le coup de payer un million
de livres à un Arabe juste pour lancer une guerre." (26 mai
1955, 1021) [11]
Cette
heureuse stratégie lui a permis, en quinze ans, depuis les fameux
accords d'Oslo de 1993, de doubler le nombre des colons en territoire
palestinien , de construire d'innombrables routes de contournement et
d'enfermer hermétiquement la population palestinienne dans des
banthoustans ironiquement qualifiés de "Secteurs d'autonomie
palestinienne"; et depuis la conférence d'Annapolis
de novembre 2007, qui était censée permettre de lever
un grand nombre des obstacles , contrôles et autres checkpoints
qui pourrissent la vie des autochtones et les empêchent de subvenir
à leurs besoins, l'occupant a construit 51 nouveaux points
de blocage et de checkpoints . On en compte actuellement 607.

Le
manque de réactivité des responsables officiels de l'Archipel
du Goulag palestinien dont on ne sait si leur collaboration avec
l'occupant est le fruit de leur candeur politique , de leur faiblesse
mentale ou de leur trahison - ou des trois à la fois - n'est
évidemment pas de nature à freiner l'avancée inexorable
du rouleau de l'impérialisme israélien. Malgré
les assassinats et les tourments quotidiens des Palestiniens, ne voit-on
pas son responsable officiel promener une mine rigolarde aux côtés
des bourreaux de son peuple dans les multiples réunions internationales
auxquelles il participe avec une gourmandise évidente.

Les
meilleurs amis du monde: Mahmoud Abbas, G.W.Bush, Ehud Olmert
Voir :
Chroniques de la Palestine occupée
: 2 - La collaboration consensuelle Rencontre de M. Mahmoud Abbas
, Président de l'Autorité palestinienne et du responsable des autorités
d'occupation israéliennes , M. Ehud Olmert
Voir : Israël
et son cadavre
Comme
il n'y a pas eu de réaction internationale sérieuse après
les nettoyages ethniques de masse de 1948 ou de 1967, cette politique
se poursuit inexorablement depuis soixante ans et progresse d'année
en année en intensité et en monstruosité . Avec
la construction du mur , les destructions, les massacres quotidiens
et le génocide larvé du million et demi d'habitants de
Gaza, elle a atteint un point irréversible . L'ONU s'est bien
fendu d'innombrables condamnations , toutes demeurées sans le
moindre effet sur le terrain . Il faut avoir entendu l'ambassadeur d'Israël
à Paris de l'époque - Elie Barnavi - balayer d'un revers
de la main et sur un ton méprisant l'une des dernières
condamnations en la qualifiant de "rituelle"
pour mesurer leur effet sur les politiciens de cet Etat .
Telle
la locomotive décrite par Zola dans La Bête humaine
, le train du sionisme lancé sur les rails de son rêve
fou a d'ores dépassé toutes les gares qui auraient pu
l'arrêter sans dommages pour ses passagers et a rendu impossible
toute paix fondée sur la loi internationale , parce que tel
était en réalité son objectif véritable.
Car l'Etat hébreu conduit par les machinistes du sionisme poursuit
inlassablement un seul et unique but : conquérir mètre
carré par mètre carré toute la terre de
sa géographie mythique.
Or,
c'est là qu'on retrouve la folie de ce rêve, fou comme
tous les rêves: son objectif ne peut être atteint sans qu'intervienne
on ne sait pas quel procédé miraculeux ou satanique, la
disparition ou l' évaporation de quatre millions de Palestiniens.
C'est pourquoi , face à l'objectif du rêve sioniste, toutes
les solutions politiques dites "rationnelles" ont à
peu près autant de chances d'être suivies d'effet que le
projet d' aligner des noix sur un bâton.
Voir
Chroniques de la Palestine occupée: X
- Israël et son cadavre

-
Sur la mythique solution de "deux Etats vivant côte à
côte" dans la paix des braves
Qui peut imaginer sérieusement , après la comédie
burlesque à laquelle a donné lieu l'évacution des
huit mille squatters de Gaza, que cet Etat évacuerait paisiblement,
parce qu'un "ON", représentant une informe et
impuissante "communauté internationale" le lui
demanderait, cinq cent mille colons fanatiques illégalement installés
en Cisjordanie et lourdement armés? Qu'il détruirait sa
Grande Muraille condamnée par toutes les instances morales et
légales de la planète sans que cela fasse bouger un cil
des responsables de cette entreprise et qu'il sacrifierait les gigantesques
constructions et investissements divers qu'il a réalisés
afin de bétonner et de cadenasser sa purification ethnique; puis,
qu'il reviendrait paisiblement aux fameuses "frontières
de 1967" qu'il n'a jamais reconnues? Et enfin, cerise sur le
gâteau, qu'il accepterait de partager "sa" capitale,
alors qu'il s'efforce frénétiquement, par toutes sortes
de mesures vicieuses sur le mariage, les logements, le droit de résidence,
etc. , d'y mener une féroce et drastique purification ethnique?
[12]
-
Sur la non moins mythique solution d'un Etat binational , dans lequel
"Israéliens et les Palestiniens jouiraient de droits
égaux"
Qui peut imaginer sérieusement que le "peuple élu"
qui a fait de l'appartenance juive LE pilier de sa politique
depuis sa création, accepterait de se commettre à égalité
avec une race qu'il juge inférieure et mettrait fin d'un claquement
de doigt au rêve sionisme qui l'anime de voir un jour un "Etat
juif" ethniquement pur s'étendre sur "Eretz
Israël" , alors que chacune de ses actions
et de ses décisions porte l'empreinte de ce projet ? Après
avoir expulsé par la force des centaines de milliers de Palestiniens
en 1948 et en 1967et continué de le faire en tapinois en utilisant
toutes les perfidies bureaucratiques imaginables, comment seulement
imaginer qu'il accepterait d'être "englouti"
, comme il dit, par le tsunami d'un "retour des réfugiés"
et d'en assumer les conséquences financières à
court et à long terme?
Il faut renvoyer les rêveurs à la lecture de Konrad Lorenz
sur les relations qu'entretiennent les tribus de rats.
Comme
l'écrit lucidement le poète israélien Aaron Shabtai
: "Le
problème n’est pas l’Etat, mais la terre. Ici les journaux en
parlent ouvertement, chaque jour, et beaucoup plus qu’en Italie et en
Europe : les colonies, la confiscation du territoire, le contrôle de
l’eau par les autorités israéliennes, tout cela augmente de jour en
jour. Voilà les faits, très différents de la propagande employée par
le gouvernement : les Palestiniens n’ont plus de territoire."
[13]
Aaron
Shabtai est tout de même exagérément pessimiste
... pour un court laps de temps encore. En effet, les Palestiniens peuvent
actuellement s'ébattre dans trois zoos ne commnuniquant pas entre
eux, grillagés et quadrillés de checkpoints . Mais comme
les vols de terre se poursuivent inexorablement et que les colonies
fleurissent comme champignons après la pluie, viendra un jour
où la densité de ces réserves égalera, puis
dépassera celle de Gaza. Et alors ...?
On voit que le mur ou le déraillement qui sont au rendez-vous
du train fou du rêve sioniste se rapprochent dangereusement.

L'histoire
enseigne que seul l'échec bloque l'expansion impérialiste
naturelle des peuples . Louis XIV a fini par perdre les provinces conquises
en Helvétie et en Wallonie, Napoléon a terminé
sa vie sur l'ilôt de Sainte-Hélène, la révolte
de son armée a mis fin à l'extraordinaire épopée
d'Alexandre en Asie, il ne reste rien de l'empire de Charles Quint et
après l'échec de la guerre du Vietnam, l'Amérique
est en passe de devoir admettre qu'elle subit le même type de
déroute en Irak et en Afghanistan et que son rêve de "remodeler
le grand Moyen Orient" est à ranger dans le magasin
des rêves morts-nés, au rayon des "embryons desséchés"
qu'évoque Eric Satie .
C'est
pourquoi l'apparente phase ascendante de l'expansion impériale
d'Israël est trompeuse . Comme la locomotive de la Bête
humaine, le train du grand rêve sioniste est lancé
dans une fuite en avant désespérée , mais le comportement
de l'officier israélien piétineur et tortionnaire d'un
petit enfant palestinien cité ci-dessus , est révélateur
du mélange de fureur, de folie et d'impuissance face à
l'impasse dans laquelle il sent confusément que conduit cette
politique . Son issue ne peut être qu'une guerre permanente ou
l'auto-anéantissement .
C'est
donc bien autour de la notion d'occupation d'un territoire que
s'organise l'histoire et la politique des hommes en général
et celle d'Israël plus que toute autre. La conquête ou la défense
d'un territoire est une histoire de guerre et de mort, une histoire
symbolique.
Or,
Israel n'est pas un Etat ordinaire , Israël est une mythologie
qui a cru pouvoir se réincarner dans l'histoire.
6
- Qu'est-ce qu'un territoire mythique ? 
Un
territoire n'est pas une simple addition de kilomètres carrés ; un territoire
est un mélange complexe de terre et de songe confondus.
Tous
les peuples possèdent une géographie mythique qui donne son identité
et son ciment à la tribu. Elle est la puissance magique qui permet la
fusion entre le " surnaturel " et le quotidien. Face à cette
réalité mythique, les arguments de plate politique rationnelle sont
de peu de poids .
Plus
que toute autre terre au monde, le Moyen- Orient est le berceau des
grands songes de l'humanité. L'actuel conquérant et prédateur de la
Palestine historique est une illustration exemplaire de la puissance
de l'imaginaire dans la politique.
C'est pourquoi il est capital de connaître, de décrypter
et d'analyser l'imaginaire théologique des peuples et de leurs
dirigeants afin d'en prévoir l'évolution et les conséquences.
Le
cerveau humain fonctionnant simultanément sur deux étages - le niveau
terre-à-terre du réalisme politique quotidien et celui de l'imaginaire
mythologique - il est impossible de comprendre le premier sans décrypter
le second et sans analyser leurs interactions réciproques. En Israël,
la Bible et surtout ses commentaires - les écrit talmudiques
- unissent le groupe qui s'en réclame et créent des liens
impossibles à démêler entre l'enracinement psychologique , symbolique,
culturel, imaginaire et physique qui se sont concrétisés
dans le rêve sioniste de regrouper sur la terre de Palestine des juifs
dispersés dans tous les pays du monde et notamment depuis la destruction
du Temple par les garnisons de Titus.
La
dichotomie politique est plus spectaculairement vraie pour l'Etat hébreu
que pour tout autre Etat de la planète, car la Bible et surtout
ses commentaires sont la véritable patrie d'Israël. Ils
sont le territoire mental et la "demeure psychique "
dans lesquels il a vécu pendant les années dites de la
"dispersion" . Depuis que ce peuple a retrouvé
par la puissance des armes une forme d'incarnation nationale dans la
géographie réelle - incarnation qui s'est accélérée
après les persécutions dont il a été la
victime durant la seconde guerre mondiale, mais qui leur est largement
antérieure - il projette sur le monde qui l'entoure la géographie
mentale qu'il porte dans sa cervelle depuis deux mille ans .
Ayant
vécu dans les vapeurs d'un rêve messianique durant des
siècles, cet Etat plaque aujourd'hui cette réalité
imaginaire sur le monde politique dans lequel il s'est propulsé
et il prétend non seulement substituer sa réalité
mythologique au monde dans lequel il a débarqué armé
jusqu'aux dents et fort du soutien militaire et financier des banquiers
anglo-saxons, mais imposer ses phantasmes théologiques à
la planète entière .
C'est
ainsi qu'aujourd'hui même , dans les pseudo " négociations "
auxquelles se prête rituellement le gouvernement israélien afin de gagner
du temps, il affirme tranquillement que " le droit international
n'a rien à voir " avec la guerre qu'il mène contre le peuple
palestinien, parce q'il possède " un titre de propriété sur Eretz
Israël " (la terre d'Israël). Il ne s'agit donc pas pour
lui de " rendre des territoires " , mais de consentir
généreusement à " en donner " .
Cette
mythologie fumeuse vient d'être confortée par le discours
du Président de la République française qui, lors
de son discours devant le parlement israélien a parlé
de "Terre Promise" par "l'Eternel"
à "Moïse" . M. Nicolas Sarkozy a même
cité un verset de la Bible afin de donner plus de force à
son propos: "Et l'Eternel dit à Moïse: Monte
sur cette montagne et regarde le pays que je donne aux enfants d'Israël.
" Le Président français et les dirigeants
actuels de l'Etat d'Israël ne nous disent pas si Moïse avait
une bonne vue et jusqu'où s'étendait son regard!
Lorsqu'un
responsable politique de premier plan d'un Etat laïc en arrive
à considérer qu'un texte théologique vieux de deux
millénaires et demi fournit l'acte de propriété
d'une terre , toute personne raisonnable est en droit d'éprouver
une légitime inquiétude et même une véritable
panique à la fois sur le degré d'information du locuteur,
sur le fonctionnement de son cerveau et sur les conséquences
politiques de ce genre d'argument.
Or
les instances politiques israéliennes auraient pu apprendre au
Président de la République française que Moïse
avait un oeil d'aigle et que son regard perçant portait quasiment
jusqu'aux confins de l'univers connu à cette époque en
Palestine. Par la grâce des autorités rabbiniques qui voyagent
, comme dans les allées de leur jardinet, dans les circonvolutions
de la cervelle de l'homme qui , il y a deux millénaires et demi,
était censé parler à Jahvé face à
face, nous découvrons que la "Terre d'Israël"
qui "appartient" aux Juifs depuis qu'elle leur
a été "donnée" par "l'Eternel"
comprend : au sud, tout le Sinaï et une partie de la basse Égypte jusqu'aux
environs du Caire ; à l'est, toute la Jordanie, un gros morceau de l'Arabie
Saoudite, le Koweït, et, en Irak, le sud-ouest de l'Euphrate ; au nord,
toute la Syrie (Liban compris) et une vaste portion de la Turquie (jusqu'au
lac de Van) .
On
comprend que les coups de boutoir répétés de l'armée
israélienne contre le Liban et son activisme aux côtés
des USA en Irak s'inscrivent dans la logique de ce plan .
Je
ne sais s'il est consolant pour les Palestiniens de voir que l'impérialisme
israélien ne fait que s'aiguiser les dents sur la Cisjordanie
et que le projet grandiose du "Grand Israël" annoncerait
une guerre de mille ans... pour le moins!

7
- Conclusion 
Voir
dans des récits inventés, imprécis et parfois contradictoires des documents
historiques ou des titres de propriété représente
à peu près le même genre de performance intellectuelle que de
considérer que l'Iliade et l'Odyssée
contiennent les mémoires réels et la biographie objective d'Athéna,
de Zeus et de Poséidon et fournissent à Ulysse , à Télémaque
et à leurs descendants un titre de propriété définitif
sur l'île d'Ithaque..., même si on peut glaner dans ces oeuvres
des informations indirectes sur l'histoire de la Grèce.
Il
en résulte que les Palestiniens sont aujourd'hui les victimes
collatérales de la rédaction d'un vieux code de théologie
et de morale rédigé il y a plus vingt-cinq siècles
par les prêtres héréditaires d'une petite tribu
de nomades du sud de l'actuelle Palestine . Ce code établissait
un monothéiste tribal avec à sa tête le Dieu "le
plus puissant" parmi tous les dieux (Exode,
15,11), et dans lequel des chapitres entiers et notamment Les
Nombres et le Lévitique contiennent des
injonctions féroces à l'égard des non-juifs.
Avant
que les lévites le transforment en un monothéisme local
avec à sa tête un dieu pour les seuls juifs , le
Livre des morts de l'ancienne Egypte retrouvé dans les tombes
royales datant de 2600 avant J.-C., soit deux millénaires avant les
premières rédactions de la Bible, présentait pourtant une expression
parfaite d'un monothéisme universel qui fut celui des tribus nomades
hébraïques primitives et qui aurait pu donner naissance
à une morale universelle:
"
Tu es l'unique, le Dieu des premiers commencements du temps, l'héritier
de l'immortalité ; par toi seul engendré, tu t'es toi-même donné naissance;
tu as créé la terre et tu as fait l'homme. "
*
1 - Pour
reprendre le titre d'un ouvrage de Manuel de Diéguez
. Voir son site 
2 - Les
soldats israéliens ne tirent pas sur les enfants, par Aya Kaniuk

- http://www.ism-france.org/news/article.php?id=8831&type=analyse&lesujet=Enfants
3 -
Abir Aramin, 10 ans, tuée à la sortie de son école, à Anata 
http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=621
4
- Des enfants de l'âge de Taïr lundi 12 février 2007 - Gideon Lévy -
Ha'aretz 
http://www.info-palestine.net/impression.php3?id_article=808 www.info-palestine.net
5
- Killing children is no longer a big deal by Gideon Levy Haaretz (Israeli
newspaper) Oct. 17, 2004 
"The plain fact, which must be stated clearly, is that the blood of
hundreds of Palestinian children is on our hands."
http://www.revisionisthistory.org/palestine59.html
6
- Voir Le Conseil talmudique d'Israël a statué : "En temps de guerre,
il n'y a pas de civils innocents " par Khaled Amayreh umkahlil.blogspot.com
, 4 août 2006 
-Source: http://www.thepeoplesvoice.org/cgi-bin/blogs/voices.php/2006/08/04/talmudic_council_in_war_time_even_enemy
Traduction de Petrus Lombard, in Questions critiques
, http://questionscritiques.free.fr/religion/edits_talmudiques_crimes_de_guerre_Israel_040806.htm
7- A quoi sert la littérature sans résistance, Aharon Shabtai 
http://www.europalestine.com/spip.php?article2692
8 - Des
soldats israéliens racontent ce qu'ils ont vécu " On tire comme des
dingues ", Dalia Karpel, 21 septembre 2007, Haaretz 
http://www.stopusa.be/scripts/texte.php?section=BRBI&langue=1&id=25457
9 - Selon
un parlementaire européen, la situation à Hébron est "barbare". Par
Maan News 
http://www.ism-france.org/news/article.php?id=9113&type=communique&lesujet=Colonies
10-
" La Shoah comme religion ", Libération, 11 septembre 2000 
http://www.estherbenbassa.net/EBdocsPDF/Libe11092000.pdf
11-
Un Premier Ministre israélien confirme qu'Israël crée volontairement
des ennemis. Par Wake Up From Your Slumber 
http://www.ism-france.org/news/article.php?id=9206&type=analyse&lesujet=Sionisme
12- Voir
L'occupation par la bureaucratie Par Saree Makdisi 
http://www.ism-france.org/news/article.php?id=9306&type=analyse&lesujet=Nettoyage%20ethnique
13-
Aaron Shabtai : " C'est de la propagande : c'est pour ça que je ne serai
pas au Salon du livre de Paris" 
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=8013
Le 8juillet 2008