*
Première lettre : Une science médicale des Etats
Deuxième Lettre : L'esprit de justice
de l'Etat
Troisième lettre : Le ciel du meurtre et la justice
des hommes
Quatrième Lettre : Les sacrifices de la France
sur les autels de la corruption
Cinquième Lettre : De la putréfaction du mythe
de la Liberté
Sixième Lettre : Que faire de Caïn ?
Septième Lettre : La maïeutique de l'esprit de
justice
Huitième Lettre : Kafka et les Jésuites
Neuvième Lettre : L'apocalypse de la Tiédeur
*
Première
lettre : Une science médicale des Etats 
Madame
le Garde des Sceaux,
Est-il
une seule civilisation dont la mémoire des siècles n'ait jugé
l'âme et l'esprit à l'écoute de sa définition du juste et de l'injuste?
Aussi, depuis vingt-cinq siècles, Socrate enseigne-t-il à tous
les peuples et à toutes les nations qu'il n'est pas de pesée plus
fondatrice de la raison et de la sagesse des Etats que la réflexion
des moralistes et des historiens sur les relations que le pouvoir
politique entretient avec l'esprit de justice . C'est pourquoi
la pensée occidentale est née à Athènes de la mise à mort d'une
victime de la justice d'Etat.
A quel moment
un événement relevant de la science du droit devient-il, de surcroît,
l'expression d'une politique ? Supposez qu'un huissier se laisse
acheter par un quidam et qu'il consente à lui remettre un faux
constat entre les mains à seule fin de lui permettre d'engager
une fausse procédure et de lui faire gagner un faux procès . Le
délit de prévarication dont un auxiliaire de justice assermenté
par la République, donc soumis à votre autorité par définition
, se sera rendu coupable à l'égard de l'Etat de droit dont vous
avez la charge ne ressortira pas encore à l'ordre de la politique,
mais seulement à l'administration banale de la justice répressive
. Mais si le citoyen lésé par le faux en écritures publiques évoqué
ci-dessus écrit à l'avocat de son adversaire et lui démontre,
preuves en mains, qu'il s'agit d'un faux grossier et s'il découvre,
à cette occasion, que le plaignant dolosif et l'huissier corrompu
ont agi de connivence avec un avocat acheté au préalable , le
cas deviendra-t-il politique ? Nenni. Certes, nos trois larrons
ont conclu un pacte délictueux et leur forfait prémédité n'aurait
pas disposé d'une rampe de lancement en mesure de le conduire
à un succès partagé s'ils n'avaient pas comploté. Mais, un tel
tremplin ne s'apparente pas au délit de conspiration . A quel
moment les fondements de la République seront-ils pris pour cible
au point que nos notables feront un trio de comploteurs au sens
pénal du terme.
Certes,
les barreaux obéissent à une déontologie professionnelle tellement
sévère qu'ils se trouvent dans une situation de dépendance à l'égard
de leur surveillant naturel et permanent, l'Etat de droit, de
sorte que la responsabilité de droit public de la Chancellerie
demeurera exclusivement pénale à leur égard . Et pourtant, une
nation dans laquelle des huissiers véreux s'allieraient avec des
avocats véreux afin de leurrer la candeur du peuple déclaré souverain
depuis 1789, une telle nation, dis-je, serait placée sous un joug
qui lui ôterait la vie. Néanmoins, nous ne sommes pas encore autorisés
à tracer une frontière sûre entre la science juridique et la science
politique .
Supposez
maintenant que la victime de l'huissier prévaricateur s'adresse
au Bâtonnier de l'avocat corrompu et qu'il découvre en lui un
complice de plus, aussi bien de son confrère que de l'huissier
dûment acheté par son " client " ; supposez ensuite que l'otage
de nos pieds nickelés porte plainte au Parquet et que celui-ci
se montre , à son tour, bien décidé à faire alliance avec nos
trois Rouletabille ; supposez ensuite que le prisonnier de nos
trois délinquants découvre qu'aucun avocat du for n'accepte de
plaider contre quatre adversaires à la fois - un Bâtonnier, un
confrère, un huissier et le Ministère public confondus dans un
seul et même délit de corruption de l'appareil de la justice républicaine;
supposez enfin qu'en désespoir de cause le citoyen livré à une
gangrène généralisée de l'ordre public diagnostique la tumeur
et la décrive avec minutie dans une lettre ouverte qu'il adresse
sur internet au Président du Tribunal du for , puis une seconde
à la Cour européenne de justice, puis une troisième à destination
du Parquet concerné, puis une quatrième à l'intention conjointe
du Premier Ministre et de vous-même ; supposez que ces documents
publics se trouvent diffusés par plusieurs grands portails ; supposez
qu'ils trouvent une audience de plusieurs milliers d'internautes
par jour et supposez que, par votre mutisme , vous paraissiez
écarter tout cela d'un revers de main, pensez-vous que, dans ce
cas, la rumeur aura fait débarquer la justice dans la politique
ou qu'elle demeurera silencieusement calfeutrée dans l'enceinte
des prétoires où les doges de Venise de la démocratie bénéficient
de la protection des ors et des lambris de la République ?
Vous
constaterez avec moi, Madame le Garde des Sceaux, que deux siècles
après la Révolution de 1789, la guerre de la République contre
les corporations héritées de la monarchie se poursuit, puisque
vous venez de supprimer l'ordre des avoués d'appel . Mais abandonnerez-vous
le combat contre la montée en puissance des corporations maffieuses
?
Dans ce
cas, vous serez appelée à vous livrer à une profonde méditation
de la question de savoir à quel moment un problème politique exige
l'invention d'une balance nouvelle - la balance à peser les civilisations
. Qu'est-ce que la corruption en tant que pathologie des peuples
et des nations ? S'il existe une science médicale des Etats, comment
en rédigerez-vous les diagnostics?
Je vous
propose quelques éléments d'une réflexion sur la capacité de l'Etat
de penser la justice à l'aide d'une connaissance de la
généalogie théopolitique des civilisations, c'est-à-dire du secours
d'une simianthropologie critique capable d'articuler la méditation
sur l'évolution du droit public et privé avec l'esquisse d'une
philosophie de l'Histoire . Car il se trouve que la justice est
le creuset de la raison et du destin des nations.
*
Deuxième Lettre
: L'esprit de justice de l'Etat
Madame
le Garde des Sceaux,
La pesée
de l'idée de justice est devenue la ciguë ressuscitative de l'Europe
à l'heure où la ruine du plus puissant empire de la terre avait
conduit une civilisation anéantie au culte désespéré d'une potence
. C'est que la ciguë, les Grecs l'appelaient une "pharmacie",
ce qui, dans leur langue signifiait aussi un remède. Permettez-moi
de vous entretenir de l'ambiguïté du poison qu'on appelle la pensée;
car l'âme d'une France dont vous tenez la balance de Thémis entre
vos mains voudrait apprendre de vous les ingrédients de la justice
qui tue et de la justice qui guérit.
Comment
s'appelle-t-il, l'arbitre que l'histoire a chargé de peser l'équité
et l'iniquité des lois? Serait-ce sur les épaules de l'Etat que
reposerait ce fardeau ? Dans ce cas, nous nous trouverions devant
une tâche difficile à remplir, mais dont l'accomplissement serait
tout à l'honneur de vos hautes responsabilités, celle de vous
demander quelle est la nature du personnage altier que nous appelons
prématurément l'Etat de droit et auquel sa vocation impose de
forger de génération en génération l'éthique en marche des nations.
Car si l'Etat portait le casque et la lance d'Athéna, il ne saurait
recevoir d'un tiers la mission toujours provisoire de penser la
justice ; mais s'il lui appartenait d'accoucher d'une civilisation
de la justice sans disposer d'aucun d'autre secours que de celui
de son propre appareil, il serait lancé dans une arène fâcheusement
séparée de l'histoire et de la politique. N'est-il pas inquiétant
que l'esprit de justice de l'Etat sursitaire n'ait pas de représentants
et de garants assermentés sur la terre, n'est-il pas inquiétant
que Socrate assure la parturition d'un Etat dont les organes de
la justice ignorent leur propre provenance ? Qui donnera à la
France sa semence, celle de sa justice, sinon une philosophie
à l'écoute d'un Etat dont l'équité devra accoucher de l'âme de
la nation ?
Et pourtant,
Madame le Garde des Sceaux, observez l'autonomie, la solitude,
la fierté, la souveraineté de l'Etat de droit quand il se demande:
"Qui m'avait donné le droit de vie et de mort sur mes sujets ?
Où était-elle, la justice qui légitimait ma justice? Pourquoi
Thémis me demande-t-elle maintenant de comparaître devant mon
propre tribunal ? Qu'ai-je à me sacrifier sur l'offertoire de
ma justice?"
Socrate
est un questionneur des immolations, Socrate est un interrogateur
de Thémis. Quelle singulière responsabilité que celle de la philosophie
du "Connais-toi" ! Ne doit-elle pas alerter un Etat en attente
de l'esprit de justice dont il sera un jour habité ? Car si l'esprit
de justice ne peut entendre que la voix de sa propre souveraineté
et si ce sera donc au cœur de sa propre puissance que l'Etat devra
se charger des chaînes de sa justice , qu'en sera-t-il du souffle
des lois qui donneront à la France la voix de sa vérité?
*
Troisième
lettre : Le ciel du meurtre et la justice des hommes
Madame
le Garde des Sceaux,
L'Etat
a fini par s'appliquer à lui-même le plus vieil édict de l'éthique:
"Tu ne tueras plus". Quel dieu s'est-il incarné en l'Etat pour
qu'après plusieurs millénaires de plein et franc recours au meurtre
judiciaire, la France ait mis au fourreau l'épée d'une justice
dégoulinante du sang des coupables? Comment se fait-il que
l'Etat moderne se soit tout subitement résigné à se soumettre
au commandement qu'il avait donné à ses sujets depuis la Genèse,
alors qu'il n'est pas de prérogative plus fondatrice de la souveraineté
des Etats et à laquelle ils se montrent plus attachés que celle
de se soustraire aux lois qu'ils ont promulguées? Si l'Etat
est devenu le haut-parleur d'une loi dont la sagesse désarme son
omnipotence et s'il n'a pourtant reçu de personne d'autre que
de lui-même l'ordre de plier le genou devant sa propre législation,
qu'en est-il de la fragilité et de l'autorité alternées des dieux
d'autrefois, puis de l'enseignement sévère des trois dieux uniques
auxquels la France prête encore une oreille distraite, mais dont
elle refuse désormais de recevoir des ordres?
En vérité,
les Célestes anciens tuaient déjà au nom de la pureté de leur
justice. Puis les trois traînards dont chacun n'a pas tardé à
se proclamer unique aux côtés de ses frères ont fait, eux aussi,
de la sainteté de leur justice l'arme privilégiée de leurs crimes
les plus impavides . Ne croyez pas, Madame le Garde des Sceaux,
que l'abolition de la peine de mort ait fait trépasser le génocidaire
du Déluge: non seulement il partage désormais avec ses deux compagnons
le camp de concentration gigantesque qu'il a installé sous la
terre, mais, depuis deux millénaires, la pieuse cruauté du retardataire
des chrétiens surpasse celle de ses pairs; car celui-là cède à
la nécessité de faire assassiner son propre fils sur ses autels
afin de se procurer jour après jour et pour ainsi dire sou par
sou le tribut des endettés de l'éternité.
C'est pourquoi
je vous demande à nouveau de vous interroger sur le mystère du
désarmement salutaire des Etats civilisés. A-t-on jamais vu un
souverain du funèbre abandonner sans contrepartie le sceptre qui
l'arme du prestige de son immortalité? Puisque la plupart des
peuples se sont défaits de l'arme de l'égorgement, c'est assurément
que leur pérennité en a été récompensée de quelque manière . Observons
donc ensemble comment les trois dieux uniques enrubannaient leurs
couteaux et demandons-nous pour quelles raisons l'Etat moderne
ne chapeaute plus ses crimes de sang de l'auréole de sa sainteté,
alors qu'il pourrait faire valoir la permanence de sa vocation
de rehausser la gloire du bien public dont il se voulait le modeste
co-adjuteur aux côtés des autels de son souverain invisible. Pourquoi
la majesté de l'ordre des cités et la grandeur de sa réflexion
théologique sur l'ordre céleste ne se prêtent-elles plus main-forte?
N'avaient-elles pas scellé la Sainte Alliance de leur justice
avec la corde des pendus? Pourquoi l'Etat de droit a-t-il renoncé
à sculpter la doublure de son sceptre dans le bois d'un gibet?
Vous pensez
bien, Madame le Garde des Sceaux, que si je vous entretiens de
l'esprit de l'Etat sans ciel et de l'âme qui inspire l'appareil
de la justice sur la terre, c'est que la question des relations
que la République entretient avec la "spiritualité" de
l'ordre public a débarqué dans la politique à l'école de la corruption
de Thémis . L'heure a sonné à l'horloge des civilisations de redécouvrir
que la justice écrit désormais l'histoire de l' "esprit"
que nos ancêtres appelaient, faute de mieux, le "divin".
Aussi l'Etat moderne est-il appelé à se souvenir de ce que le
premier témoin de la corruption native des cités humaines a payé
à la mort un tribut dont l'écho retentit depuis vingt-cinq siècles
sur tous les autels de la raison .
Mais
qu'est-il advenu de la corruption des Etats s'ils ne sont plus
corrompus par la peine de mort ? Auraient-ils retourné la peine
de mort contre eux-mêmes ? "Corrompre" renvoie au latin
"corrumpere" , briser, dissoudre. Un Etat corrompu se corrompt
en ce sens qu'il se réduit à un tas de ruines. Et pourtant, il
ne disparaît pas sans laisser de cadavre . Suivons sa dépouille
mortelle à la trace. Où va-t-elle se cacher ?
Car la science
historique moderne n'a pas de chapelle où ses orants pèseraient
l'hostie des laïcs, leur justice. Qu'en est-il d'une République
privée de méditants de la Liberté ? Si la raison est la ciguë
qui porte remède à l'auto-anéantissement des Etats privés d'autels,
ne faudra-t-il pas que la France naisse des cendres de ses vrais
défenseurs ? Mais alors qu'en sera-t-il d'un Etat appelé à boire
la ciguë ? Quels sont le pain et le vin, quels sont la chair et
le sang du sacrifice socratique?
*
Quatrième
Lettre : Les sacrifices de la France sur les autels de la corruption
Madame
le Garde des Sceaux,
Tout au
long de ma missive précédente j'ai essayé de trouver une chaise
de paille dans un couloir du ciel de la République . Ce n'était
pas une mince affaire d'observer longuement le trône sur lequel
la déesse Liberté s'est assise ; et comment vous vous agenouillez
à ses côtés sur le prie-Dieu des droits de l'homme ; et quels
embarras votre piété rencontre à offrir à l'humanité le fleuron
de l'esprit de justice si le bienfait de l'abolition de la peine
de mort devait conduire à la corruption de l'Etat de droit.
Souvenez-vous
de la mauvaise odeur des sacrifices qui montaient des autels d'autrefois
. En ce temps-là, la sainteté des Etats fleurait bon les cadavres
des victimes humaines, puis animales immolées aux idoles du simianthrope.
Puis, ces dévotions ont tout subitement été qualifiées de meurtres
sur tous les offertoires des peuples civilisés ; mais il se sont
poursuivis en catimini au sein du mythe chrétien de la transsubstantiation
du pain et du vin de l'autel en chair et en sang de la victime
du sacrifice. Souvenez-vous donc sans cesse de ce que les assassinats
les plus pestilentiels, mais bien rentés, nourrissaient les officiants
de la religion et de la politique simiohumaines, souvenez-vous
sans cesse de ce que les meurtres les plus nauséabonds sont encore
tenus pour les plus sacrés , souvenez-vous sans cesse de ce que
la peine de mort était, hier encore, le gage de la bonne santé
des Etats et leur fontaine de jouvence - et voici que la France
du "Connais-toi" vous a confié une réflexion spéléologique sur
les nouveaux sacrifices dont elle présente désormais les offrandes
sur les autels de la République des droits de l'homme, les oblations
à la corruption. Mais si la France ne reçoit plus que de sa propre
cléricature les clés de la "vie spirituelle" des évadés
de la nuit animale, celle qui enseignait au Dieu tueur: "Si
tu ne renonces à tuer, tu demeureras le Dieu des singes" ;
si les prêtres de la France dont vous présidez le sacerdoce se
prosternent devant le veau d'or des modernes, la Corruption ,
comment formerez-vous les hauts dignitaires de la pensée qui renverseront
cet autel et comment rédigerez-vous les tables de la loi sur le
mont Sinaï de la France de la justice ?
Nous croyions
revenir de loin . Et voici que les offrandes de la République
à la déesse de la Corruption nous contraignent à réfléchir aux
métamorphoses des meurtres sacrés sur le mont Thabor des démocraties,
voici que notre simianthropologie change nos offertoires en propitiatoires
du "Connais-toi" dont il vous appartient d'accoucher la nation
de la justice, voici que les sacrifices humains à l'idole vous
appellent à construire le microscope des sciences humaines de
demain, celui qui observera les entrailles du Veau d'Or des modernes
. Comment formerez-vous les hauts dignitaires de la pensée qui
renverseront cet autel et comment rédigerez-vous les Tables de
la Loi sur le mont Sinaï de la France de la justice ?
Sans doute
comprenez-vous mieux maintenant, Madame le Garde des Sceaux, pourquoi,
dans ma lettre précédente, je vous ai discrètement entretenue
de la danse de la République autour des autels de la corruption,
et de la mauvaise odeur de l'Etat, et des relations que la démocratie
entretient avec l'odeur tenace d'un cadavre, celui du "Dieu" des
sacrifices de sang d'autrefois. Quel profit la politologie moderne
peut-elle retirer de sa connaissance simianthropologique du cerveau
et des entrailles de Dieu? Car si le démiurge biblique est mort
de vieillesse, il est d'autant plus essentiel d'étudier sa stratégie
de la purification du monde, celle qu'il a mise à l'épreuve de
deux mille ans de sa gestion de l'encéphale d'une créature qu'il
ballottait entre son ciel et son enfer.
*
Cinquième
Lettre : De la putréfaction du mythe de la Liberté
Madame le
Garde des Sceaux,
Si l'Etat
moderne se donne le commandement de quitter progressivement l'âge
zoologique des religions, donc de se donner pour témoin une divinité
un peu moins meurtrière que la précédente, c'est que l' organe
nasal du grand sacrificateur qu'il est à lui-même s'est développé
au point que l'odeur de ses autels d'autrefois l'incommode. Mais
les narines des augures se sont-elles affinées au point qu'elles
hument désormais les effluves du péché de corruption ? Car les
Etats qu'enivrent désormais les senteurs de leur propre putréfaction
boivent une ciguë qu'aucun alchimiste n'a encore réussi à changer
en remède. Il ne reste donc à la philosophie que de se changer
en une science des bonnes et des mauvaises odeurs qui montent
des offertoires de l'humanité.
Quel sera
donc le parfum de l'esprit de justice qui montera des propitiatoires
des Etats démocratiques - on les appelle maintenant des prétoires
- si lesdits Etats doivent se donner à tuer dans l'enceinte de
leurs propres tribunaux plutôt que d'enfreindre la loi qu'ils
ont proclamée et qui leur interdit désormais les meurtres pieux
au prix desquels ils achetaient autrefois l'odoriférance de leur
éthique et de leur politique du sang? Certes, le ciel de l'Europe
est devenu diablement pensotant. Chacun sait que nos conseillers
de sens rassis n'ont pas eu le loisir d'initier feu le créateur
biblique aux émanations de la justice que notre siècle attend
et dont le fumet appelle nos simianthropologues à observer les
victimes nouvelles qui montent sur les autels mondiaux de la corruption.
C'est désormais à détecter le bouquet de la putréfaction du droit
civil qu'il faut éduquer des Etats devenus acéphales ; c'est dire
que nous n'accoucherons pas en toute hâte d'un Etat pensant .
Vous n'avez
pas manqué de remarquer que l'homme à la ciguë a écouté la voix
du plus haut médiateur de l'éthique des lois de son temps, que
nous appelons d'ores et déjà l'Etat de droit . Néanmoins ce personnage
n'avait pas encore conquis toute la loyauté et la droiture auxquelles
les démocraties de notre temps le convient précipitamment; car
l'Etat de droit exerce désormais ses prérogatives dans un ciel
dont les arômes sont ceux de la Liberté. Mais puisque la République
ne dispose plus des exhalaisons, flagrances et fumets qui flattaient
les narines des bourreaux, ne faut-il pas se demander ce qu'il
serait advenu de fraîchin, relent et remugle du Dieu de l'épouvante
et de la torture devant lequel s'agenouillaient nos ancêtres s'il
avait porté ses effluences jusqu'à nos jours, et s'il lui avait
fallu sacrifier l'encens des tourments éternels de ses damnés
au parfum de sa justice dans la dislocation de l'Etat, comme si
les Républiques modernes étaient appelées à faire passer l'humanité
de la putréfaction du ciel biblique à la putréfaction du mythe
de la liberté . Et puisqu'il n'est pas de société sans récompenses
et sans châtiments - le droit de punir ne s'évaporera pas dans
l'Eden de la démocratie - comment allez-vous armer d'un droit
pénal intelligent une civilisation mondiale désormais livrée à
la corruption des sociétés civiles ? Le progrès n'aura-t-il rongé
la civilisation des gibets et des échafauds que pour en faire
la proie des vers?
*
Sixième
Lettre : Que faire de Caïn ?
Madame
le Garde des Sceaux,
Vous
remarquerez que la civilisation du pourrissement de l'éthique
de la justice civile aiguise déjà dans l'ombre les armes dont
elle frappera les derniers restes de la civilisation fondée sur
l'éthique du meurtre judiciaire. Alors, l'espèce humaine ne
saura que faire du glaive de sa raison émoussée ; et elle tentera
de décrypter à nouveaux frais son embryon d'encéphale . Mais entre
temps, ce sera bien en vain que l'Etat démocratique tentera d'emplir
sa poitrine du souffle d'un esprit de justice privé de cerveau.
Pris en étau entre le vieux tueur du Déluge qu'il aura mis sans
ménagement à la retraite d'un côté et une machine de l'Etat encore
inapte à servir de premier de cordée au simianthrope, la France
se trouvera armée d'une géhenne tellement amaigrie qu'elle rendra
les armes devant le nouveau Lucifer, le démon du pourrissement
de la Liberté. Comment cette déesse va-t-elle s'avarier, se faisander,
moisir et chancir ?
Quand le
despote du ciel a été dépossédé des armes les plus rancies de
sa justice , il ne reste à l'Etat civilisé qu'à entretenir à grands
frais les gigantesques armées de Caïn dont son propre croupissement
aura assuré la prolifération. Qu'en sera-t-il des Etats dans lesquels
Caïn en appellera aux droits de Caïn ? Qu'en sera-t-il des Etats
dont les Caïn se rassembleront en foule et citeront leurs juges
à comparaître devant les apologistes de leurs crimes s'il ne monte
des autels de la République d'autre encens que celui de la corruption
de sa justice? Comment allez-vous éduquer les Etats nidoreux et
punais que la démocratie aura couronnés d'une Liberté méphitique
? Que ferez-vous des Etats hircins qui se seront cassé bras et
jambes à tomber plus pesamment sur la terre que les pendus aux
"yeux cavés" de Villon? Où trouverez-vous le pédagogue du nouvel
esprit de justice de la France, où trouverez-vous le Socrate qui
vous forgera la hauteur d'âme et la raison de lumière des fidèles
que l'idole malodorante d'autrefois aura contaminés et empuantis
à leur tour ?
Par bonheur,
vous ne sauriez replacer la France sous le joug du Dieu mort ;
mais savez-vous que si la place Beauvau renonçait à sa vocation
de servir de laboratoire international à l'esprit de justice qu'attend
le monde de demain et sans lequel aucune civilisation ne saurait
durer, le droit pénal n'en demeurera pas moins, hélas, et à jamais,
le cœur battant de la politique du simianthrope ? Savez-vous que,
faute de remplacer les bourreaux anciens par des conquérants d'un
esprit de justice plus éclairé au sein de la civilisation mondiale
de la corruption de la société civile, vous courriez à l'effondrement
politique de la France ? Comment convertirez-vous le dieu simiohumain
des origines à la "lance pensive" de la déesse de la sagesse ?
Décidément,
je ne sais si c'est une chance ou un grand malheur, pour l'Etat
moderne , d'avoir perdu prématurément la hache et le billot de
l'exécuteur des hautes œuvres qu'il avait installé dans le ciel
sanglant des origines. L'arme de dissuasion demeurée rudimentaire
de l'idole - ses spécialistes l'appelaient "l'excommunication
majeure" - était tombée en quenouille entre les mains du successeur
de Saint Pierre, alors que le simianthrope n'avait encore ni le
nez qu'il fallait pour respirer à pleins poumons l'odeur de la
mort des civilisations, ni les papilles gustatives qui permettent
de déguster les fruits de la corruption du monde.
*
Septième Lettre
: La maïeutique de l'esprit de justice
Madame
le Garde des Sceaux,
Quel est
le problème politique majeur que rencontrera un Etat tombé dans
la moisissure pour s'être privé des armes terrifiantes de la justice
infernale dont le Dieu des trois monothéismes se trouvait doté,
quel est le problème politique et éthique majeur, dis-je, qu'un
Etat simiohumain de cet acabit aura le devoir de tenter de résoudre
dans l'angoisse et le courage de sa liberté si ladite liberté
se trouve mollement définie par des principes démocratiques vaporeux
et dont le vague est désormais censé assurer à lui seul la protection
des citoyens face à l'arbitraire d'une puissance publique en voie
de putréfaction?
Revenons
une dernière fois à la pesée de l'expérience politique des trois
Dieux des barbares, Jahvé , Allah et celui d'une potence. Certes,
leur éducation était tombée en panne ; mais comme je l'ai rappelé
ci-dessus, leur science du simianthrope nous demeure précieuse,
parce que le trio des vieux démiurges avait du moins appris à
décoder les relations biseautées que le sceptre des nations entretient
avec la moisissure de leur espèce de justice . La France des futurs
simianthropologues est donc appelée à décrypter non seulement
l'avenir proprement théopolitique de sa justice, mais l'esprit
d'une nation non encore initiée à sa nouvelle sainteté et peu
disposée à tirer les conséquences d'un pouvoir judiciaire dont
elle ne voit que l'affaiblissement . La civilisation de la "Liberté"
conduira-t-elle à un relâchement sans remède de la morale publique
et à la ruine des démocraties, dès lors qu'elles se trouveront
privées à la fois d'une divinité qui ne faisait pas de chichis
et d'une divinité d'avant-garde , donc devenue quasiment trans-animale,
mais encore dans les limbes ? Certes, la théologie armée des instruments
de torture de l'éternité s'est effacée des mémoires ; mais ce
sera rien de moins que l'esprit d'une justice en gésine qu'il
faudra apprendre à peser à l'échelle de tout le globe terrestre.
A ce titre,
quoi de plus éloquent, aussi bien dans l'ordre juridico-politique
que dans l'ordre de l'éthique, que le cas sur lequel j'ai attiré
ci-dessus votre haute attention. Car la justice de la France relativement
trans-simienne d'aujourd'hui se trouve à mi chemin de la simianthropologie
des nations: ou bien vous prendrez conscience de ce que des lois
adoucies à l'école de la corruption de la justice civile et de
l'Etat de droit appellent une initiation de longue haleine de
la magistrature assise et debout de la République aux tâches nouvelles
de l'éthique et de l'intelligence tant des peuples que de leurs
classes dirigeantes, ou bien Thémis obéira point par point au
modèle minutieusement exposé et prophétisé par Franz Kafka dans
La colonie pénitentiaire, où la corruption
se révèle l'héritière naturelle de la cruauté. C'est dire que
les plus grands philosophes de la politique simiohumaine de tous
les temps ne s'appellent pas Platon, Hobbes ou Montesquieu, mais
Homère, Eschyle, Sophocle, Rabelais, Cervantès, Molière, Shakespeare,
Swift , Kafka.
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Huitième Lettre
: Kafka et les Jésuites
Madame
le Garde des Sceaux ,
Comment
un Etat que Socrate aurait rendu souverainement méditatif, comment
un Etat que l'anthropologie abyssale des modernes aurait condamné
à boire la ciguë de la réflexion des simianthropologues, comment
un Etat qui aurait honni le ciel de la torture devant lequel se
prosternaient les ancêtres, comment un Etat qui aurait vraiment
terrassé le Dieu simiohumain des gibets et des échafauds, comment
un Etat qui aurait réellement remplacé l'idole vengeresse des
Anciens par un Dieu inconnu, un Dieu à inventer, un Dieu maïeuticien
de l'esprit de justice de la France, comment un tel Etat se fera-t-il
le pédagogue et le catéchiste d'une éthique judiciaire enfin privée
du monstre de la torture? Décidément, il appartiendra aux démocraties
du "Connais-toi" de demain de se mettre à la place du Dieu mort
et de lui donner une postérité cérébrale digne de l'introspection
socratique ; car si son trépas prématuré ne l'avait pas empêché
de renoncer à la foudre qu'il brandissait jour et nuit sur la
tête de ses vassaux, n'aurait-il pas découvert avec effarement
que, faute d'apprendre à régner sans gibet et sans corde, la civilisation
se noiera dans les eaux tièdes de la corruption ?
C'est pourquoi
les citoyens français de demain devront interpréter les modestes
conquêtes de l'esprit de justice de la République actuelle en
se mettant à l'écoute du glorieux destin qui attend leur raison
aux côtés d'un Etat dont ils espèrent qu'il deviendra, de génération
en génération, l'accoucheur d'une Thémis surhumaine. Si, tout
au contraire, vous les appeliez au relâchement progressif, puis
à la dissolution des lois dans la corruption de l'Etat - et cela
pour le seul motif que les crimes méritent désormais l'indulgence
dont la civilisation dite des droits de l'homme se fait une vertu
- alors la corruption de la justice et de son esprit ne serait
plus qu'un péché véniel. Alors les Jésuites de la République ne
dresseraient-ils pas en tous lieux les forteresses de leurs féodalités
tant à l'échelle nationale que locale et comment ne les rendraient-ils
pas imprenables? Comment la floraison de leur casuistique au sein
d'une justice française abâtardie ne tirerait-elle pas sa prospérité
de sa prolifération sous la protection complice de feu l'Etat
de droit? Ce sera donc d'une lucidité politique suraiguë qu'une
justice privée du sang des échafauds et du sang des autels aura
besoin si la corruption se nourrit d'un jésuitisme dont Bossuet
disait qu'il "met des coussins sous les coudes des pécheurs".
Savez-vous,
Madame le Garde des Sceaux que si une République appelée non seulement
à la réflexion, mais à la méditation du philosophe et à la contemplation
des saints sur l'avenir de sa civilisation de la justice, savez-vous
que si un Etat convié à enseigner à ses Parquets à combattre la
corruption n'avait pas de science de la maladie contagieuse qu'est
le laxisme judiciaire, ce serait en vain que la France aurait
désensanglanté la balance de Thémis. Ecoutez le récit de l'agonie
du monstre judiciaire dans Kafka : "La machine était manifestement
en train de se disloquer ; sa marche tranquille n'était plus qu'une
illusion. Mais la chute des roues dentées avait retenu toute l'attention
de l'officier ; et il en avait négligé un instant de surveiller
les autres pièces de la machine. Quand la dernière roue dentée
eut quitté la traceuse et qu'il se pencha sur la herse, il eut
une surprise encore plus désagréable : la herse n'écrivait plus,
elle ne faisait que piquer , et le lit, au lieu de faire rouler
le corps du condamné, le soulevait seulement avec des vibrations
qui enfonçaient les aiguilles dans sa chair. Le surveillant voulut
intervenir ; car enfin, ce n'était pas le supplice qu'il avait
recherché, c'était le meurtre immédiat." (La Colonie
pénitentiaire)
*
Neuvième Lettre
: L'apocalypse de la Tiédeur
Madame
le Garde des Sceaux,
Face à la
généralisation de la corruption, comment l'Etat de droit ne monterait-il
pas en première ligne afin de combattre de front les Parquets
que la régionalisation trop rapide de l'appareil de la justice
a amollis et reconduits sur tout le territoire national aux complaisances
à l'égard des féodalités de province? Pourquoi la royauté avait-elle
commencé de les vaincre avant que la centralisation administrative
de la France napoléonienne eût pris le relais du trône, sinon
parce que, depuis les origines, la lutte des nations pour leur
survie, n'est autre que le combat permanent et sans cesse renouvelé
pour leur unification, donc pour leur existence même .
Madame
le Garde des Sceaux, je vous le dis solennellement, si, en France,
les classements sans suite des Parquets se révèlent des actes
politiques destinés à saper l'identité nationale , si , en France,
les classements sans suite ne visent plus à désengorger les tribunaux
locaux de la prolifération des petits litiges , mais à renforcer
les féodalités locales jusqu'à habiliter la chute des corporations
dans des comportements maffieux, alors votre réflexion sur la
justice se révèlera rien de moins que le remède à la ruine de
l'Etat.
C'est pourquoi
seule la procédure dite "dans l'intérêt de la loi", vous
permet d'engager le vrai combat de la raison française, afin que
notre justice trouve les armes de l'intelligence qui lui permettront
de cesser de passer du vieux sang des échafauds au sang nouveau
des sacrifices que symbolise le pourrissement de l'Etat de droit
. Cette procédure de sauvetage est encore timidement utilisée,
mais une République éclairée en fera le chef d'Etat-major de la
lucidité politique française, parce qu'il s'agit de rien de moins
que de l'arme de guerre de la République contre sa dissolution
.
Mais comment
notre civilisation aurait-elle fermé les portes de fer des souterrains
des trois monothéismes si la réflexion de la France de la pensée
sur la justice ne nourrissait pas une philosophie de la résurrection
du "spirituel" ? Qu'en
est-il du "spirituel laïc" puisque l'idole d'autrefois
est décédée à l'école des saints de la raison ? Ne laissez pas
monter dans le ciel de la démocratie une idole plus dangereuse
que celle à laquelle les marmites infernales des trois dieux uniques
servaient de couronnes, une idole que l'Etat aura à redécouvrir
dans les décombres des fulminations bibliques, une l'idole des
immolations que les Saintes Ecritures appelaient la Tiédeur. Pourquoi
les tueurs anciens de l'idole, qu'on appelait des prophètes, ont-ils
nourri leur sainteté de visionnaires de l'intelligence à vomir
le péché de Tiédeur ? Pourquoi ont-ils fait des sottises de la
Tiédeur le pire ennemi de toute justice? Pourquoi ont-ils vomi
le dieu douçatres dont les narines humaient la fade odeur du sang
des autels ? Pourquoi ont-ils fait de la Tiédeur la bête immonde
de l'Apocalypse ?
Voilà, Madame
le Garde des Sceaux , une question dont la réponse ne résonne
pas sur les cordes du clavecin bien tempéré des Eglises du simianthrope
, mais au cœur d'un Etat de droit sur ses gardes. Vous avez à
tuer l'hydre de la Tiédeur au sein d'une nation que la République
a délivrée à la fois du sang séché des offertoires et du sang
frais de la justice humaine. C'est une tâche spirituelle d'enseigner
au peuple français à gravir le Mont Carmel d'une justice ennemie
des tiédeurs de l'encéphale simiohumain . Si la démocratie ascensionnelle
doit réinventer le "spirituel " , si, à l'écoute du Malraux
des "voix du silence", elle doit redécouvrir que le XXIe
siècle "sera spirituel ou ne sera pas ", quelle promesse,
pour les alpinistes de l'intelligence, que le politique ait à
réapprendre les secrets anthropologiques de la Tiédeur !
Qu'est-ce
donc qui fait de la Tiédeur du singe vocalisé à l'école de ses
évangiles de la corruption le symbole de la négation de toute
haute éthique? Qu'est-ce qui fait du visqueux, du gluant , de
l'insaisissable le signe des débâcles du "spirituel"? Peut-être
le pourrissement de sa justice est-il l'instrument de la vassalisation
secrète de l'Europe par un empire étranger? Peut-être l'asservissement
de la justice du Vieux Continent à la Tiédeur est-il le tombeau
d'une civilisation de myopes? Si la domestication de la France
par la corruption de sa justice plaçait l'Etat sous le joug de
ses fossoyeurs étrangers, le combat contre la Tiédeur ne serait-il
pas l'avenir de l'intelligence politique des nations ?
Que serait
la justice si elle ne demeurait à l'école de sa mémoire écrite
? Madame le Garde des Sceaux , nous vivons encore dans une civilisation
racontée par la plume . Déjà la République de la Tiédeur est clouée
au pilori de l'écriture ; déjà la République de l'esprit se réveille
au sein de la République des Lettres où, de siècle en siècle,
la France fait le saint l'apprentissage de son combat contre les
tiédeurs de la raison. Vous êtes appelée à changer le poison de
la Tiédeur en remède au sein de la nation qui, de Villon à Voltaire,
a fait du combat pour la justice le fer de lance de la France
de l'esprit. Votre haute fonction n'est pas au service de l'éphémère
: vous écrivez la biographie de la nation des "armes et des
lois". Je m'adresse à un acteur éternel de l'Histoire , la
Justice, je demande à cet acteur d'esquisser une effigie de votre
vocation et de votre destin. Puisse le miroir de la France qui
s'appelle la justice refléter vos traits. A vous d'y graver le
visage de la France.
Le
30 juin 2008