L'Europe des amateurs
et des connaisseurs de la politique étrangère des grandes
puissances découvre peu à peu les catastrophes diplomatiques
liées à l'incapacité naturelle et inévitable de la plupart
des chefs d'Etat élus par le vote populaire de s'initier rapidement
et sur le tard aux responsabilités, inattendues pour eux,
que leurs hautes fonctions les appellent à exercer sur la
scène internationale.
En deux ans, un
Président issu du suffrage universel s'est brouillé avec la
Chine à seule fin de faciliter la rotation, au Tibet, des
moulins à prière d'un bouddhisme dégénéré et indigne de l'Eveillé
- aussi Pékin tente-t-il de déposséder la France du rôle de
moteur privilégié de l'Europe politique qu'elle avait conquis
de haute lutte depuis le général de Gaulle et de remettre
l'avenir du Vieux Monde entre les mains d'une Allemagne encore
infirme, mais qui y a d'ores et déjà gagné douze milliards
d'euros de contrats; en deux ans, la France a compromis pour
longtemps ses relations avec la Russie à force d'agiter sottement
le drapeau d'une Géorgie aux mains de la CIA; en deux ans,
la France a tellement refroidi ses relations avec l'Allemagne
qu'elle sue sang et eau à les réchauffer; en deux ans, la
France, ignorante de ce que le monde anglo-saxon ne se ralliera
jamais au Vieux Continent a bêtement tenté de gagner l'Angleterre
à une cause qui lui est viscéralement étrangère; en deux ans,
la France a stupidement cru pouvoir s'attaquer aux accords
de Bretton Woods sans alliés fiables et sans préparation appropriée;
en deux ans, la France sautillante autour d'un Président
des Etats-Unis après l'autre a cru pouvoir
faire entrer Israël à la barbe de Mahomet dans l'union des
pays riverains de la Méditerranée; en deux ans, la France
des caïds de préau a soutenu le massacre israélien
de Gaza, puis le blocus qui affame un million six cent mille
hommes, femmes, vieillards et enfants dans la ville dont le
nom signifie Trésor en latin et en persan, ce qui permettra
à l'Amérique de M. Barack Obama de rafler la mise auprès de
la civilisation musulmane tout entière; en deux ans, la France
des petits fils de Talleyrand aura commis la dramatique bévue
de placer sous le commandement militaire de l'Amérique une
nation nucléaire dont le territoire s'est libéré depuis un
demi siècle des garnisons de l'étranger installées à perpétuité
dans tout le reste de l'Europe, ce qui n'a pas tardé à conduire
au grotesque: le 6 juin, ce ne sera pas la France qui recevra
le Président des Etats-Unis sur ses terres, mais ce dernier
qui trônera sur une parcelle américaine du territoire national
afin d'y accueillir une pâle et docile casaque de l'OTAN.
Un démagogue n'apprend
pas la politique étrangère tout subitement et la cinquantaine
passée. Aussi sommes-nous à la veille d'une révolution anthropologique
de la pensée politique mondiale, parce que nous redécouvrons
que les Romains ont tout dit d'une espèce ingouvernable: "César
conduit à la tyrannie, les notables aux factions et la démocratie
à la chienlit", ce qui n'est qu'une traduction franche
et sans fioritures de " existit ex rege dominus, ex optimatibus
factio, ex populo turba et confusio".(Cicéron)
Je me souviens
du sketch présenté à tout l'univers par un figurant de haut
rang de la IVe République tout gêné de se trouver aux côtés
d'Eisenhower et de Churchill à l'occasion d'un sommet mondial.
Ce notable de province ressemblait à un appariteur endimanché
que les chambellans du cosmos de l'époque auraient fait monter
par erreur sur les planches. Le spectacle des hobereaux locaux
dont les minusculités se jalousent à mort et dont aucune n'acceptera
la supériorité d'une fourmi sur une autre au sein de leurs
assemblées d'insectes avait permis de toucher le fond de l'abîme
de la médiocrité tranquille. Cinquante ans plus tard, un suffrage
populaire qui, depuis la République d'Athènes, ne se conquiert
jamais qu'à flatter l'encolure du plus grand nombre, conduit
tout droit à l'autre pôle du microscopique, celui du triomphe
des hâbleurs et des batteurs d'estrade à l'heure où une démocratie,
commence de répandre un parfum précurseur de la tyrannie.
Mais si l'espèce
simiohumaine échappe par nature à toute gouvernance rationnelle,
l'heure d'une mutation mondiale du génie politique a sonné.
Il y faut rien de moins qu'un recul nouveau de la réflexion
que les vrais chefs d'Etat devront conquérir à l'égard du
cerveau moyen de notre espèce, ce qui exigera la mise sur
pied d'une anthropologie critique certes encore dans les langes,
mais dont nous savons déjà que son courage la portera à se
demander ce qu'il en est de l'encéphale actuel des rescapés
du monde animal. Par bonheur, les circonstances sont devenues
favorables à une pesée de cet étiage, donc à une formation
politique entièrement nouvelle des hommes d'Etat. Malheureusement
l'acquisition des armes des pédagogues de la raison qu'appelle
le XXIe siècle exigera une initiation de nos anthropologues
aux secrets de l'immolation d'un congénère précieux que nous
offrons au soleil de la mort sur nos autels d'Incas. C'est
dire combien le néophyte que je suis demeuré n'est pas près
de percer le secret de nos dieux d'hier et de demain. J'ai
donc demandé à la Pythie de m'enseigner le discours que M.
Barack Obama devrait prononcer le 4 juin au Caire. La prêtresse
a bien voulu m'en dicter quelques bribes.
Je dois confesser
que j'ai également sollicité le secours d'historiens anciens
qui ont eu l'idée de génie de rédiger de leur propre autorité
des discours-clés qu'ils ont fait prononcer sans sourciller
aux hommes politiques les plus importants de leur temps et
qu'ils présentaient, grosso modo, en ces termes aux lecteurs:
"J'ai rapporté les paroles qu'il était le plus pertinent
de faire entendre dans les circonstances de l'époque."
Mais quelles sont
les "circonstances" qui caractérisent notre temps?
Toute la difficulté est de les placer dans un champ du regard
plus étendu que celui auquel les plumes contemporaines avaient
accès. Nous devons à Thucydide, à Tite-Live, à Tacite des
discours de visionnaires qu'ils ont attribués à Périclès,
à Scipion l'Africain, à Jules César, à Fabius Cunctator, à
Cincinnatus, à Hannibal, à Alexandre le Grand et à une poignée
de sénateurs romains qui n'avaient pas oublié sous Néron ou
Tibère que les esprits politiques de haut vol rivalisent avec
Socrate non seulement dans la vaillance de jouer leur tête,
mais également dans l'art de préparer eux-mêmes la ciguë de
leur immortalité.
Je me suis donc
efforcé de faire tenir à M. Barack Obama le discours du courage
suicidaire que les circonstances actuelles devraient inspirer
le 4 juin prochain au Caire à tout véritable homme d'Etat.
Je me suis dit qu'à l'heure où le monde entier va entrer dans
un affrontement titanesque avec l'Etat juif, il est naturel
que la Pythie sorte un instant de sa réserve et qu'elle dicte
à un souverain de passage le discours relativement seigneurial
qui répondrait à la logique souterraine qui régit la planète
de Descartes.
Discours
de M. Barack Obama au Caire, le 4 juin 2009
1 - Exorde
2
- L'Amérique aux yeux grands ouverts
3
- Une atrophie guérissable
4
- La mort émasculée
5
- L'apocalypse neutralisée
6
- La politique des toises et des arpents d'Israël
7
- Une terreur contrefaite et rusée
8
- Un certain René Descartes
9
- La civilisation de la torture
10
- Les bouchers de l'intelligence
11
- Le sacrifice
12
- L'assassinat sacré
13
- L'école de la mort
14-
Les Incas de la démocratie
1 - Exorde
Je
salue le fleuve dont le limon a fécondé la mémoire du monde, je
salue la doyenne de l'humanité, l'Egypte du voyage des morts vers
leur éternité. C'est une heure tragique et grandiose pour l'Amérique
que celle du pèlerinage de sa démocratie aux lieux où naquit la
première civilisation de l'immortalité de nos corps et de nos
esprits. Je suis venu des rives lointaines du Potomac vous exprimer
la gratitude de mon pays, mais aussi pour vous dire que votre
mémoire est redevenue le foyer vivant de la planète. Puisse l'Amérique
de la liberté assister à vos côtés à l'ascension de notre civilisation
vers son soleil. Nos démocraties ont besoin des leçons de politique
de vos tombeaux. Je vous demande de jeter sur le charnier de Gaza
le regard de vos pharaons.
Je vois la mort marcher à pas pesants dans les ruines de Gaza
; je vois la mort traîner des cadavres collés à la semelle de
ses souliers. Gaza éventrée, Gaza sous les bombes au phosphore
d'Israël, Gaza pulvérisée sous les yeux des démocraties du monde
entier nous rappelle que la mort est le flambeau de notre mémoire.
Je salue l'Egypte de la nuit et de la lumière de votre éternité.
2
- L'Amérique aux yeux grands ouverts 
Le
ciel de l'Amérique a les yeux grand ouverts sur les plaies qui
ensanglantent la terre, le ciel de l'Amérique éclaire le cimetière
de Gaza des rayons d'une étoile. Croyez-vous que l'éventration
d'une cité se cicatrisera toute seule, croyez-vous qu'une lumière
oublieuse servira de couture à cette plaie? Je demande au Nil
qui, depuis des millénaires, vous apportait nuit et jour le pain
de votre immortalité d'enfler son cours et de se changer en torrent
de la mémoire du monde. Puissent tous les peuples et toutes les
nations se pencher sur le sarcophage de Gaza. Mettons-nous ensemble
à l'écoute du sacre de la mort, tirons ensemble du lit du fleuve
la ville dont le nom superbe signifie Trésor dans la langue de
Darius et dans celle de la Rome antique. Si nous laissions béant
le sépulcre qu'Israël a creusé au cœur de l'Islam, il demeurerait
sans voix, le gouffre d'où monte la voix du dieu Liberté.
Si
nous devenons le soleil de l'Egypte éternelle, nous ne laisserons
pas un million et demi de nos frères mourir de faim et de maladie
sous nos yeux. Refusons de monter une garde complice aux côtés
des guerriers au regard glacé d'Israël, construisons ensemble
l'arche de la mémoire du monde, mettons tous les peuples et toutes
les nations de la terre à l'écoute de leurs tombeaux, faisons
de notre lumière le dieu de notre victoire sur l'oubli.
3
- Une atrophie guérissable 
Je suis le voyageur d'un jour, le visiteur de toujours, l'errant
d'hier et de demain. J'ai débarqué d'un continent tout neuf et
encore privé de mémoire ; et pourtant, je suis le porteur du fardeau
le plus lourd, celui d'appeler la civilisation du Nil au chevet
de la démocratie mondiale. Mais le néophyte qui vous parle cache
dans son coeur une motivation plus tragique encore que celle du
retour de l'Amérique au berceau de l'humanité civilisée, une motivation
qui tient à votre science des armes. J'observe que le drame auquel
les guerriers d'Israël conduisent le monde trouve ses ressources
dans l'infirmité native dont la cervelle des autres peuples de
la terre demeure frappée et dont ils se transmettent de génération
en génération les carences. La paralysie dont souffre leur évolution
cérébrale, il me semble que seuls vos sarcophages peuvent m'aider
à l'expliquer à l'humanité d'aujourd'hui. Car la nation du Nil
n'a pas la même relation aux armes de la mort que les autres peuples
qui se bousculent sur notre astéroïde. C'est pourquoi je dois
tenter de vous initier à la connaissance du glaive de la terreur
et de la folie qu'Israël brandit aux yeux du reste de notre espèce,
celle dont l'encéphale demeuré semi pensant me semble atteint
d'une atrophie guérissable à l'école de votre civilisation.
Car
le génie de vos tombes est aussi de s'être donné le cosmos pour
emblème. Vos pyramides ont fait de l'univers tout entier votre
armure. C'est pourquoi vous êtes également les précurseurs du
titanesque dans l'ordre de la guerre, les annonciateurs de votre
ascension au sidéral du trépas, les prophètes du nucléaire sépulcral
qui donne aux guerriers d'aujourd'hui l'explosion des entrailles
de la matière pour interlocutrice. C'est à cette fin que je vous
convie à peser la falsification des armes de l'apocalypse dont
vous n'êtes pas dupe, mais qui permet à Israël de terroriser
ses congénères sur les cinq continents.
4
- La mort émasculée 
Quand
nous avons lancé la première bombe atomique sur Hiroshima, nous
savions que le fantastique de la mort ne demeurerait pas longtemps
entre nos seules mains ; et nous nous réjouissions en secret du
dépérissement fatal de notre foudre alors solitaire, parce que
nos esprits les plus pénétrants et nos anthropologues d'avant-garde
voyaient clairement que la prolifération d'une mythologie de la
guerre fondée sur le suicide collectif des peuples et des nations
se révèlerait paradoxalement la clé du salut du monde. Aussi toute
notre angoisse se portait-elle seulement sur la question de savoir
si, au cours des mois ou des années pendant lesquels il nous faudrait
nous résigner à porter sur nos seules épaules le terrible fardeau
d'une omnipotence de l'absurde, donc lourde des périls attachés
à la démence du monde, nous allions réussir à tromper les prophètes
de notre sottise qui nous annonçaient qu'un pays armé de l'apocalypse
terminale ne saurait se fonder sur sa bonté d'âme naturelle pour
résister à la tentation de pulvériser ses ennemis. En revanche
nous avions la tête suffisamment solide pour savoir que des Etats
en possession du jugement dernier désarmeraient la fatalité :
jamais deux Lucifer de l'atome ne se feraient la guerre, puisqu'une
guerre suppose l'existence d'un champ de bataille sur lequel un
survivant vaporisé n'en ramasserait pas moins les ossements et
les cendres de son ennemi volatilisé dans l'atmosphère. Qu'est-ce
qu'une guerre dont l'issue ne laisse face à face que deux fantômes
sans mémoire?
Toute
la difficulté à laquelle se heurtaient nos stratèges était donc
de nous tenir à nous-mêmes la bride sur le cou face à des Pygmées
qui nous narguaient impunément. Souvenez-vous de ce que l'Amérique
de ce temps-là a démontré au monde entier qu'elle préférait l'humiliation
de la défaite la plus cruelle de ses armes à l'extermination instantanée
de ses adversaires devenus tout rieurs et moqueurs, puisque nous
avons capitulé dans la honte et la peur en Indochine plutôt que
de recourir au meurtre cataclysmique et de soustraire sur le mode
rugissant nos forces militaires à leur abaissement dans l'arène
des nations.
Et
voici que le refus de faire étalage de notre foudre a payé : nous
n'avons plus à invoquer les saints évangiles des démocraties tartuffiques,
nous n'avons plus à invoquer le ciel de notre Liberté contrefaite
pour lier les mains de nos fous, parce que notre temple s'est
vidé de ses cierges et de sa divinité de pacotille. Puisque nous
n'avons plus besoin des hochets et des colifichets de la piété
qui servaient de masques à nos meurtres, puisque nos ennemis se
sont hissés à leur tour au rang du dieu tueur qui nous a enfantés,
je salue l'heure de la délivrance où nos enfers se défient enfin
ridiculement entre eux; car maintenant, notre frousse nous protège;
car maintenant nos excommunications s'annulent les unes les autres.
Nous sommes enfin à égalité avec le souverain du Déluge et des
tortures infernales que nous avons émasculé à lui donner des rivaux.
5
- L'apocalypse neutralisée 
Mais un autre danger nous guette désormais : les dirigeants de
l'Etat d'Israël prétendent que l'Iran menacerait de rayer le peuple
juif de la surface de la terre et qu'à cette fin, les descendants
de Xerxès et de Darius disposeraient d'une arme apocalyptique
que nous avons pourtant neutralisée depuis quarante ans à l'aide
de huit nations désormais condamnées à se regarder en chiens de
faïence dans le vide de l'immensité.
J'ai
donc aussitôt demandé à Israël de signer, lui aussi, le traité
de non prolifération d'une arme réfutée, puisqu'inutilisable par
nature, afin de contraindre le minuscule David à reconnaître à
la face du monde qu'il possède la massue de Goliath depuis fort
longtemps et qu'il lui en coûterait aussi peu qu'à nous-mêmes
de demander au reste de la planète d'y renoncer tout en riant
sous cape d'un si bon tour du moustique vrombissant aux narines
du lion empêtré dans ses rets. Mais pourquoi Israël refuse-t-il
obstinément d'entrer la tête haute dans le club des grands manipulateurs
du ciel d'assassins que nos ancêtres s'étaient donné et qui ont
pris, il y a peu, le plus grand soin d'interdire à jamais leur
foudre onirique à tous leurs congénères après s'en être eux-mêmes
fort ouvertement rendus les seuls propriétaires?
Demandez-vous pourquoi Israël rejette avec indignation une duperie
qui profite depuis un demi siècle à tous les géants ; demandez-vous
pourquoi ce minuscule Etat fait valoir, les mains jointes et la
bouche en cœur, que la signature par l'Inde et le Pakistan du
traité de non-prolifération n'a pas empêché ces deux puissances
de porter à leur tour l'arme théologique en bandoulière et de
se dandiner fièrement sur la terre, accoutrés des pieds à la tête
de ce glorieux harnachement. La raison en est aussi simple que
la fronde de David: Israël est le seul Etat condamné à feindre
de ne pas se pavaner tout ceinturé de la foudre du suicide à deux
ou à trois. Et pourquoi éviter de parader aux côtés du roi d'une
noyade universelle, Jahvé le génocidaire? Parce qu'il est vital,
pour le "peuple élu", de jouer au Pygmée afin de détourner
l'attention des cinq continents du spectacle de son expansion
guerrière en Judée et en Samarie. Il lui faut donc tenter de faire
croire à tout l'univers qu'il se trouve suspendu au-dessus d'un
gouffre et que l'Iran s'apprêterait à le précipiter dans l'abîme.
Quel spectacle qu'une nation tout entière contrainte de se cacher
sous un masque de carnaval! Comment exorciser ce magasin de farces
et attrapes ? J'en appelle à l'Egypte des tombes qu'illumine leur
soleil intérieur, parce que la civilisation du Nil a fait du cosmos
le catafalque stellaire du genre humain tout entier. Vos feux
éclairent, aujourd'hui encore, le désir secret de l'humanité d'assassiner
le silence de l'immensité - il y faut le big bang d'une mort tonitruante.
6 - La politique des
toises et des arpents d'Israël 
Et
voici que la démesure même du sarcophage d'Amon-Ra ou de Tout
Ank Amon rappelle à l'univers de la mort mécanisée que l'âge de
la foudre thermo-nucléaire n'est que l'expression du rêve tombal
de rendre retentissante l'éternité. C'est pourquoi Israël voudrait
nous interdire de commettre le sacrilège, central à ses yeux,
de démythifier la foudre estropiée et manchotte que tout le monde
fait semblant de craindre, alors qu'il ne s'agit que du jeu ridicule
d'un singe faussement effaré par son pouvoir inattendu de se brûler
la cervelle et qui s'auto-terrorise à plaisir afin d'élever son
catafalque au pyramidal dans son imagination. Mais laisserons-nous
tuer le rire de l'intelligence, nous mettrons-nous à l'école des
descendants chuchotants des géants de la raison que furent les
Isaïe et les Ezéchiel? Oublierons-nous que le monde moderne repose
sur deux explorateurs juifs du génie d'un animal devenu semi pensant,
Einstein et Freud ? Le premier est descendu sans frémir dans les
secrets de la matière, le second a ouvert les yeux de son courage
sur les machineries de l'inconscient de la politique et de l'histoire.
Apprenons des Titans de l'Israël d'autrefois à plonger le couteau
de la raison dans l'inconscient cousu de fil blanc du peuple juif
d'aujourd'hui.
Mais
voyez comme une nation devenue infidèle à ses prophètes avait
cependant pris de l'avance sur une espèce couarde et tremblante
; car l'intelligence de cette nation livre maintenant la planète
à un effroi contrefait. Demeurerons-nous les otages internationaux
de la politique des toises et des arpents d'Israël ? Car voici
que le monde entier se précipite dans le gouffre de la sottise,
voici que le monde entier s'agrippe au mythe selon lequel deux
pithécanthropes mâtinés d'anthropopithèques se rendraient suicidaires
d'un même élan et pour le seul plaisir de rivaliser entre eux
dans le faux courage de se brûler la cervelle pour la galerie
; voici que nous refusons d'observer l'orgueil des nations à travers
les trous de leur manteau nucléaire.
7 - Une terreur contrefaite
et rusée 
Telle est la démence nouvelle de notre espèce qu'il me faut affronter
à la lumière de la civilisation du Nil, telle est la folie dont
il est de mon devoir de faire débarquer la spectrographie dans
la politique internationale, tel est le défi que me lance l'irréflexion
du genre humain et qui me contraint de vous dire, les yeux dans
les yeux, que le XXIe siècle appellera les hommes d'Etat à porter
un regard d'anthropologues sur l'histoire du cerveau simiohumain.
Si je ne brisais la cuirasse de la cécité dans laquelle Israël
aux abois tente d'enfermer les cinq continents, l'Amérique perdrait
toute possibilité de jamais conduire la civilisation mondiale
à son véritable avenir, celui qui appelle la planète de demain
à mettre l'islam à l'écoute de l'Occident et l'Occident à l'écoute
de l'islam. Mais l'arche d'alliance entre ces deux empires de
l'intelligence, c'est le peuple des sages du Nil qui la construira,
parce que l'Egypte est le lieu de rencontre de l'histoire avec
la méditation sur le soleil intérieur qui éclaire les vivants
et les morts.
J'ai déjà dit que cette espérance-là du monde civilisé tout entier,
Israël tente de l'asphyxier, parce qu'il lui faut à toute force
cacher son expansion sous la fausse armure d'une terreur aussi
contrefaite que rusée. Il me reste à dire que, de son côté, la
foudre inutilisable de l'Iran n'est, à son tour, que le dernier
soubresaut d'une épouvante aussi simulée que retorse. Il aura
fallu plus d'un demi siècle de gesticulation sous le faux sceptre
de la panique pour nous faire mieux connaître les ressorts vétéro-testamentaires
qui nous ont conduits à un affolement de nos entrailles
d'origine biblique et devenu planétaire à l'école de la physique
explosive d'Einstein. Mais maintenant, il est temps que la mappemonde
retrouve ses esprits, il est temps que les hommes d'Etat réapprennent
à marcher sur la terre, il est temps que le sens rassis recouvre
ses droits, il est temps qu'il soit permis à une humanité redevenue
pensante de réapprendre qu'elle a la tête solidement vissée sur
les épaules et qu'il lui appartient d'exorciser des fantasmes
de l'effroi ancrés dans le vieux mythe de l'apocalypse.
8
- Un certain René Descartes 
J'ai
donc demandé au centre d'études internationales et stratégiques
de Washington de m'apporter une étude détaillée des attrape nigaud
et des simulacres enfantins auxquels la planète des matamores
de l'atome s'est livrée. Elle m'a été remise en mains propres
il y a quelques jours seulement. L'évidence m'a été à nouveau
démontrée que, dès aujourd'hui, vu l'état d'avancement de l'armement
de l'Iran et notamment en raison du soutien technologique que
lui accorde la Russie dans la détection des missiles, ni Israël,
ni nous-mêmes - s'il nous arrivait de tomber dans la démence -
ne sommes en mesure d'attaquer l'Iran sabre au clair et d'empêcher
cette nation de conquérir le colifichet de prestige qui accorde
à un peuple le bénéfice tout imaginaire de précipiter son adversaire
et lui-même aux enfers. Israël devra donc se résigner tôt ou tard
à vivre aux côtés d'une nation aussi nucléaire que lui-même et
qui n'aura évidemment aucune envie de le pulvériser avec la certitude
de subir le même sort en retour.
Mais ce n'est pas tout : l'étude stratégique dont je vous parle
prend soin de me rappeler la certitude absolue des experts de
l'atome pseudo guerrier de toutes les nations du monde que personne
ne songera plus à attaquer l'Iran quand cette nation disposera
des armes à double tranchant qui dissuadent nécessairement aussi
bien nos ennemis que nous-mêmes. Quelle élévation morale, n'est-ce
pas, de menacer un adversaire avant qu'il ait trouvé le moyen
de se faire respecter, quelle haute éthique de la démocratie,
n'est-il pas vrai, que de se ruer hors du toril avant que le torero
ait revêtu son habit de lumière et n'ait agité son leurre devant
le mufle stupide de la bête.
Mais j'attire votre attention sur le scalpel de l'intelligence
qui commande la dissuasion bi face du fauve et du matador. Il
y a plus de quatre siècles, la France a donné naissance à un torero
de la logique, un certain René Descartes, qui a introduit la raison
naturelle et le bon sens dans la physique mathématique et dans
la géométrie analytique de son temps. Son "Discours de la
méthode" est demeuré fameux dans toute l'Europe. Ce philosophe
nous dirait maintenant que nous ne sommes pas encore devenus des
logiciens chevronnés, parce que nous disons à la fois que l'Iran
sera nécessairement rendu aussi invulnérable que nous-mêmes et
que cette invulnérabilité n'en sera pas moins tellement illogique
et contradictoire qu'elle rendra pulvérisable le reste de la terre.
Voyez à ce seul exemple l'abîme de la sottise dans laquelle Israël
tente de précipiter notre planète.
Je demande à la civilisation mondiale d'approfondir notre connaissance
de l'espèce dont le cerveau dichotomisé bascule sans cesse du
réel au songe et du songe au réel et qui se défait d'une pichenette
des raisonnements les plus irréfutables. Par bonheur, jamais le
quartet des sages composé de la Russie, de la France, de l'Allemagne
et de l'Angleterre qui a réussi, sinon à maîtriser, du moins à
mettre en veilleuse la folie d'Israël depuis 2006 et qui a négocié
à notre place avec l'Iran pendant tant de mois n'acceptera que
la démocratie mondiale déclenche une guerre nucléaire préventive
contre un Iran encore relativement désarmé. Mais j'avais besoin
de confirmer mon raisonnement par l'observation du fonctionnement
demeuré seulement semi cartésien de la boîte osseuse de l'animal
bipolaire.
9
- La civilisation de la torture 
Ne
croyez pas un instant que la plaie de Gaza se refermera sur l'oubli
des nations, ne croyez pas un instant que l'histoire s'entrecoupera
de meurtres d'un soir et qu'effacera le lendemain. Gaza saigne
dans mon cœur quand le parti démocrate m'interdit de fermer le
camp de tortures de Guantanamo, Gaza saigne dans mon cœur quand
des tortionnaires voudraient occuper une place honorable dans
l'histoire de l'Amérique, Gaza saigne dans mon cœur quand des
hommes politiques de mon pays poussent le cynisme jusqu'à qualifier
d'hypocrites les adversaires de la torture dans le monde.
Sachez
que les MacCarthy d'une Liberté pourrissante ne peuvent plus déserter
le champ de bataille de la délégitimation de la torture, sachez
que jamais l'Amérique de demain ne désinfecterait la plaie morale
d'avoir réhabilité l'estrapade sous le masque vertueusement enrubanné
d'une justice des Torquemada de la démocratie. Croyez-vous que
l'histoire maculée de boue des peuples et des nations d'aujourd'hui
sera racontable à nos enfants et à nos petits-enfants sur le modèle
d'une édulcoration pieuse de nos souillures, comme nous lisons
l'histoire ad usum Delphini de nos ancêtres dans leurs livres
gangrenés de fausses dévotions, croyez-vous que je puis
déshonorer ma nation et toute l'humanité de mon temps aux yeux
de la postérité? A partir de ce jour, les chefs d'Etat des grandes
nations sont condamnés à monter en première ligne sur le front
d'une civilisation mondiale aux prises avec son image salie à
l'échelle de la planète et qui a appris à se regarder dans le
miroir que lui tendent d'ores et déjà les vrais descendants d'Isaïe.
Il ne me suffira pas de rappeler son serment et le mien à toute
la classe politique de mon pays, le serment de défendre les valeurs
universelles dont notre Constitution a rédigé l'évangile et dont
nous sommes devenus dans le monde entier les porte-drapeau trop
faillibles: les images de notre civilisation qui nous assaillent
en tous lieux nous rappellent que nous sommes devenus politiquement
responsables de la rechute possible de l'Occident dans la barbarie
et qu'il n'appartient pas au Président des Etats-Unis de se fonder
seulement et pour mémoire sur les préceptes immaculés de nos législateurs,
mais de rappeler au monde entier que la torture a été abolie en
Europe il y a deux siècles et demi. Ne soumettez pas la terre
d'Abraham Lincoln à la salissure et à l'abaissement d'une honte
ineffaçable, n'humiliez pas à jamais l'Amérique. Mais si cette
épreuve-là devait m'être réservée, soyez sûr que je saisirai le
bistouri et que je couperai de mes mains le chancre de la torture.
10
- Les bouchers de l'intelligence 
Mais il y a plus : les hommes d'Etat d'aujourd'hui ne vivent pas
seulement dans une roseraie d'image riantes de la civilisation
dite de la Liberté , mais également dans un monde de la pesée
de nos têtes. Quand la chambre des représentants et le congrès
refusent l'emprisonnement des prisonniers de Guantanamo sur le
sol américain, parce que ce transfert mettrait en danger, disent-ils,
la sécurité de l'Amérique, je dois demander à la nation de Benjamin
Franklin si nous sommes retournés aux sorciers, si des esprits
maléfiques s'échapperont des enceintes de pierre de nos pénitenciers
et si, par l'effet d'une pestifération mystérieuse, nous combattrons
une armée de diablotins qui auront traversé les murs de nos prisons
pour empoisonner l'atmosphère.
Savez-vous
que la guerre de la science et de la raison est devenue l'enjeu
du combat politique le plus décisif de notre temps et que les
chefs d'Etat d'aujourd'hui ne pourront s'en laver les mains et
se déclarer irresponsables de la rechute des démocraties du XXIe
siècle dans le monde des magiciens et de leurs gris gris? Croyez-vous
que la tolérance laïque peut cautionner l'ignorance et la sottise
et que le culte de la liberté allèguera ses titres de noblesse
à légitimer le retour au paléolithique? L'histoire déroule la
pellicule d'un film dont le metteur en scène et le producteur
ont changé: nous sommes entrés dans un siècle des Eschyle, des
Sophocle et des Shakespeare du cerveau humain - un siècle où le
chef de la cité montera sur les planches pour tendre sa gorge
aux bouchers de la raison du monde.
11
- Le sacrifice 
D'où
je suis, je vous assure que je vois les sacrifices d'autrefois
jouer des coudes pour tenter de retrouver leur coulée. Le 4 mai
l'AIPAC ("American Israel Public Affairs Committee")
a tenu à Washington son gala annuel. Il y avait six mille cinq
cents convives de marque. Ils étaient venus de tous les coins
du monde fêter en tenue de soirée les épousailles de l'Amérique
des galas avec la bonne conscience tranquille de l'univers de
la Liberté. La planète entière des démocraties du Bien mangeait
en commun le pain bénit de son évangélisme politique. Les
visages étaient sereins, les mines pieuses, les sourires festifs.
Rien n'avait changé aux yeux des pharaons de l'innocence. Le Nil
leur apporte des alluvions dont le montant annuel s'élève à quatre
cent cinquante millions de dollars.
12 -
L'assassinat sacré 
L'Egypte
sait que le sacré et le politique sont nés d'un seul et même père,
l'assassinat dont les dieux exigent le tribut; l'Egypte sait qu'Amon-Ra
a retiré, mille ans avant Abraham les victimes humaines de ses
offertoires et les a remplacées par des victimes animales. L'Iphigénie
d'aujourd'hui s'appelle la Démocratie. Les tortionnaires se disent:
"Cette tempête qui nous empêche de hisser les voiles, comment
pourrions-nous l'apaiser? Serait-ce qu'un dieu en colère l'aurait
déchaînée afin de nous punir? Pourrions-nous entrer en grâce auprès
de lui si nous lui offrions un sacrifice ? Le Dieu des tempêtes
acceptera-t-il l'offrande de la torture de quelques-uns de nos
congénères sur ses offertoires?"
Depuis
six millénaires, le peuple du Nil est demeuré fidèle au refus
des sacrifices humains sur ses propitiatoires. Pas l'Europe. Les
descendants d'Agamemnon ont seulement réduit le monceau des sacrifices
humains des Incas; ils n'ont glorifié qu'une seule montagne du
sacrifice, qu'ils appellent le Golgotha. Sur l'offertoire de leurs
immolations, ils ne tuent chaque semaine qu'un seul de leurs congénères,
un certain Chrestos, dont ils boivent l'hémoglobine et dont ils
mangent la viande selon les dires de leurs sacrificateurs. Leur
victime est née d'un meurtre judiciaire ; mais, dès l'origine,
c'est le meurtre tout court qui a nourri tous les autels du monde.
Leur
offrande est une Iphigénie au masculin. Ils ont pris soin de la
rendre invisible et consentante. Leur Eglise leur interdit de
la consommer à titre seulement symbolique. Mais peu importe: depuis
l'assassinat de Martin Luther King, notre meurtre sacré est redevenu
extra judiciaire et nous présentons à nouveau l'offrande d'un
vivant aux dieux des Incas. Mon assassinat se passera des fioritures
judiciaires du Golgotha des chrétiens. C'est pourquoi je vous
ai dit qu'il est de mon devoir de tendre la gorge au sacrificateur.
Je serai votre œil, vos oreilles, votre voix. Ne craignez pas
que le monde paraisse courir à toute allure vers son sarcophage.
Mais rejetez les apprêts fallacieux d'un Président de parade sur
l'offertoire de la démocratie, refusez de vénérer une liberté
sous vitrine et qui se présenterait en bijou de vos idéalités
contrefaites. Croyez-moi, notre nation ne peut continuer de jouer
les appariteurs chamarrés d'une caricature de la Liberté, croyez-moi,
le Président des Etats-Unis ne saurait laisser la liturgie du
sacrifice passer en grand apparat d'un acte du drame au suivant.
Quelquefois Clio se prélassait d'un pas nonchalant sur la scène,
quelquefois, sa cadence tranquille plaisait aux récitants. Mais
le drame a toujours trébuché et culbuté d'une péripétie à la suivante,
la tragédie a toujours coupé le souffle aux spectateurs, le rideau
a toujours refusé de tomber, la pièce a toujours renoncé à s'achever
sur les planches.
L'homme d'Etat d'aujourd'hui a le devoir de presser le pas ; il
sait que la mort consentira à l'habiller du vêtement solennel
qu'on appelle un destin. Je recevrai à bras ouverts la haute leçon
de l'Egypte des Pharaons. Vous m'aurez permis de monter sur la
barque des accompagnateurs silencieux de votre éternité, vous
m'aurez donné à écouter le fleuve des siècles à vos côtés. Comment
vous parlerais-je d'au-delà de la mort si vous ne m'accordez la
grâce de faire entendre la voix de vos tombeaux ? Les balles qui
m'attendent ne m'ouvriront la porte de ma maison que parce que,
vous aussi, vous serez devenus les arbres et les fruits de votre
destin, parce que vous aussi, vous saurez que vos voix attendent
le coup de feu qui paraîtra vous faire taire afin de vous accorder
la haute écoute de votre résurrection.
13
- L'école de la mort

Je
vous disais que notre civilisation est née d'un fleuve qui vous
a nourri de sa fécondité pendant des millénaires, mais que vous
êtes également la première civilisation qui ait fait de la mort
un palais. Ce sont les pyramides qui vous ont enseigné que l'histoire
est la fille d'un dieu fidèle au rythme des saisons, ce sont vos
gratte-ciel de la mort qui vous ont appris que le Nil est le métronome
de votre mémoire. A son tour, l'Amérique d'aujourd'hui fera de
votre horloge du monde le diapason de son âme; à son tour, l'Amérique
sera le nautonier du temps que l'Egypte éternelle appelle à jeter
un pont fleuri entre le fleuve des vivants et le torrent arrêté
de l'oubli; à son tour l'Amérique quittera l'enfance des nations
pour épouser la lente maturation de l'encéphale de l'humanité.
C'est dans cet esprit que je vous redis avec simplicité, avec
discrétion, avec pudeur, que je ne demeurerai pas longtemps parmi
vous, parce que les hommes publics dont la silhouette et le destin
se réfléchissent désormais dans le miroir de l'humanité sur les
cinq continents sont appelés à se mettre les écouteurs de l'avenir
des sacrifices aux oreilles et de monter d'un pas ferme sur l'offertoire
qu'on appelle l'Histoire. Le Président des Etats-Unis a le devoir
non seulement d'entretenir des relations sereines avec le meurtrier
qui l'attend dans l'ombre, mais d'expliquer à la nation le marché
des hosties qui font l'histoire depuis la nuit des temps. Je m'efforcerai
de me montrer digne des donateurs qui ont payé à l'Amérique le
tribut de la mort. Sachez que l'histoire de l'alliance de l'espérance
et du meurtre dans laquelle nous entrons sera entièrement différente
de celle dont les générations qui nous ont précédés ont nourri
leur courage. Certes, la mort n'a pas entièrement achevé de changer
de couteau. Mais à l'heure où nos carnages s'étalent au soleil,
le sang des peuples a perdu la discrétion autrefois en usage.
Maintenant, le sacré n'a plus le même affûtage, maintenant le
salut d'un monde de sang bouillonne dans le temple du Bien et
dans l'enfer du Mal où la lame effilée des nouveaux oracles de
Manès s'aiguise sur la meule du langage meurtrier des idéalités
de la démocratie, maintenant des images en mouvement nous présentent
le spectacle de nos victimes égorgées, maintenant c'est à toute
heure du jour et de la nuit que nous avons à choisir entre la
cage de l'animal et celle de l'homme qui se disputent nos âmes
et qui font de nous leurs proies.
Quand
le film se déroule à un rythme accéléré sous les yeux du monde
entier, comment un Président aux yeux de chair demeurera-t-il
silencieux et les bras croisés? Je vois un écran géant recueillir
les regards des vivants et des morts sur une seule et même pellicule,
je vois les évènements historiques changer de taille, de nature
et de voix quand une seule caméra de Clio en transmet la mémoire
à la génération suivante, je vois les noms des victimes se graver
en lettres de feu dans l'esprit de tous les peuples et de toutes
les nations.
14-
Les Incas de la démocratie 
Par
bonheur l'histoire n'attend pas. Quand le temps semble ralentir
le rythme des sacrifices de sang, ne vous y trompez pas : la mort
ne cesse de trépigner à la porte et de jouer des coudes dans les
coulisses. Jamais sa coulée ne s'arrête. Le Nil se met seulement
en attente du déclic qui propulsera les peuples et les nations
vers le nouvel avenir de leurs cœurs et de leur intelligence.
A mon retour à Washington j'entendrai jour et nuit le tic tac
de l'horloge des Pharaons dont la lenteur comptera les gouttes
d'un silence trompeur. Israël guettera sa proie avec patience.
Puis, pour quelques secondes, l'opinion mondiale oubliera que
la vraie vie des nations est le missile de leurs autels. Les Incas
offraient le sang de leurs victimes du sacrifice à la gloire de
leur soleil. Depuis lors, les peuples reçoivent leur lumière de
l'éclat d'une seule potence. Le Golgotha a ratatiné l'offrande
des démocraties. Mais une faible déflagration suffira pour que
l'Amérique de demain se dise: "Quel était le garrot qui étranglait
le Golgotha minuscule auquel le monde s'était réduit? Pourquoi
Clio s'était-elle rabougrie à un seul gibet sur les cinq continents?
Qui empêchait les sacrifices de poursuivre leur marche à belle
allure?"
Quand
je monterai les marches de l'autel dans tout l'éclat du soleil
des sacrifices, vous découvrirez que le temps est révolu de donner
le change à l'école des festivals de la Liberté. Car bientôt l'Iran
innocenté par la réconciliation de son arme inutile avec l'inutilité
de la nôtre ne permettra plus à Israël de faire diversion à l'école
des contrefaçons de l'épouvante, bientôt il n'y aura plus de porte
dérobée pour quitter les planches de l'histoire et pour revenir
d'un bond sur la scène; bientôt Israël verra un Etat souverain
dressé à ses côtés, bientôt la communauté internationale lui demandera
gentiment de revenir aux frontières de 1967. Mais vous savez tous
que dix balles me porteront alors au royaume des bienheureux,
vous savez tous que seule ma mort mettra l'Amérique à l'écoute
de sa véritable histoire, vous savez tous que le destin des morts
est de raconter l'âme du monde, vous savez tous que, depuis des
millénaires , les victimes de l'autel sont les accélérateurs géants
du temps des nations et que la conscience des peuples se forge
sur l'enclume où les victimes s'appellent des offrandes. Bientôt
vous découvrirez de surcroît que la fécondation des hosties a
changé de cadence, d'élan et de souffle et que votre Président
n'est qu'un modeste successeur d'un juif d'Israël, un certain
Itzak Rabin.
Le
verrou de l'Histoire, un seul coup de feu le fera exploser : le
verrou de la peur à Gaza, le verrou de la sottise à Jérusalem,
le verrou de l'aveuglement dans mon pays, le verrou de la terreur
nucléaire au Moyen Orient sautera avec l'immolation d'un seul
homme sur l'autel des Incas de la démocratie.
Dernière
minute
Le
FBI enquête sur un appel par voie de presse à l'assassinat
de M. Barack Obama. L'auteur en est un mystérieux particulier,
ou un mystérieux organisme, ou un mystérieux groupe
de pression. Le sacrificateur caché est connu du Warren
Times Observer, qui a refusé de révéler
son nom. (Reuters et Nouvelobs.com du 30 mai 2009)
1er
juin 2009