De nombreux hommes
politiques de droite et de gauche qualifient de "marché de
dupes" le projet de M. Nicolas Sarkozy d'aliéner la souveraineté
de la France, donc de trahir son âme et son esprit. M. Laurent
Fabius souligne que le Président de la République n'est pas
le propriétaire du destin de la nation. Mais l'essentiel n'est-il
pas de connaître les secrets anthropologiques de la tentation
de la vassalité politique? Pourquoi le genre simiohumain se
cherche-t-il un maître sur la terre ou dans le ciel? L'esprit
d'obéissance serait-il l'ultime secret théologique d'une espèce
épouvantée de naissance par un encéphale qui la désarrime du
monde?
Si
notre civilisation ne renouvelait pas la connaissance en rase-mottes
du genre simiohumain qu'elle a héritée d'une Renaissance superficielle,
si elle ne conquérait pas de spéléologie du cerveau effaré du
simianthrope, si elle ne saisissait pas la chance, si je puis
dire, de la vassalisation rampante dont elle se trouve menacée
pour retrouver le secret du "miracle grec" dont elle
est née, elle aura trahi sa vocation originelle de servir, de
génération en génération, de "siècle des Lumières" à
tout le genre humain. Mes lecteurs savent que ce
site n'est qu'un microscopique écouteur aux gages d'un espion
de l'avenir de la pensée critique et que mes services secrets
sont des guetteurs attentifs à débroussailler modestement les
chemins des grands esprits que retarderaient un instant les
ronces que leur génie perdrait son temps à écarter.
1
- Un exercice de politique-fiction : L'Amérique placée
sous le protectorat militaire de l'Europe
2
- La chute du royaume des cieux
3
- Naissance de la simianthropologie critique
4
- Le traité de l'Alliance atlantique est-il conforme au
droit international ?
5
- Où le terme de duperie commence de débarquer
dans l'anthropologie politique
6
- La démocratie de Manès et les premiers pas de la simianthropologie
critique
7
- La guerre des rédemptions
8
- La chute de l'utopie marxiste
9 - Une psychanalyse anthropologique de la duperie
10
- La spectrographie de la notion de duperie
en politique
A - La provincialisation de la géopolitique
B - La dissimulation enfantine
C - Les progrès de la dissolution de
l'Histoire dans le vichysme européen
D - Le picotin de la politique internationale
E - Qu'est-ce qu'une Europe unie et
libre
F - Le nouveau " Silence de la mer "
G - Attention, les enfants !
H - Le retour de Jahvé
11
- Comment débarquer parmi les esclaves sans déchoir ?
12
- De la loyauté en politique
1 - Un exercice
de politique-fiction : L'Amérique placée sous le protectorat militaire
de l'Europe 
Un
récit de politique-fiction n'est pas interdit au greffier de l'humanité
pseudo démocratique. Puisqu'une planète blasonnée de songes politiques
euphorisants se trouve désormais universellement placée sous le
drapeau d'une "Liberté" et d'une "Justice" d'une
myopie exemplaire, racontons dès les bancs de l'école aux enfants
de la grande Révolution le destin d'un empire européen qui aurait
sauvé le monde pour s' en être allé enseigner son catéchisme à
l'Amérique du Nord tout entière, afin de l'enserrer dans le réseau
strangulatoire de ses légions du salut et de la délivrance.
En
ce temps-là, deux nations résolument rédemptrices, l'empire soviétique
et la Chine, tenaient la dragée haute à notre astéroïde fatigué.
Fortes d'une sotériologie politique fondée sur la pendaison à
tout vat des propriétaires, elles avaient menacé d'envahir les
Etats-Unis et de mettre les cinquante Etats du Nouveau Monde à
l'école de leur messianisme. L'ex-Russie des tsars y était d'autant
mieux préparée qu'elle regrettait d'avoir vendu, pour une somme
dérisoire l'Alaska et San Francisco aux Etats-Unis à la fin du
XIXème siècle; et la Chine, alliée au Japon, était bien placée
pour attaquer les Etats-Unis par la côte du Pacifique.
Mais, en ces temps reculés, la vieille Europe occupait encore
le rang de la première puissance économique et guerrière du globe
terrestre. Aussi avait-elle cédé aux supplications de sa fille
d'au-delà de l'Océan, qui demandait ardemment à la civilisation
de Périclès et de Copernic de venir installer à demeure sur son
territoire des centaines de garnisons armées jusqu'aux dents et
qui dissimuleraient, en outre, la foudre d'un Jupiter de l'atome
dans leur manche.
Aussitôt
dit, aussitôt fait. Mais un seul Etat, la Californie, s'était
dotée du tonnerre d'un Zeus gaullien; et, forte à son tour de
la cuirasse d'une apocalypse onirique qui lui permettait, à l'entendre,
de pulvériser la mappemonde en moins de temps qu'il ne faut pour
le dire, Los Angeles avait fièrement demandé à l'Europe des fils
de Turenne et de Condé de déguerpir de son territoire sans faire
de façons. Par bonheur, la France, l'Allemagne, l'Angleterre,
l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Suède, le Danemark, la Finlande
et j'en passe n'avaient pas entendu de cette oreille les rodomontades
de ce matamore local; et elles s'étaient patiemment attachées
à corrompre les classes dirigeantes du Minnesota, du Vermont,
du Texas, de l'Alaska, de la Virginie, de l'Alabama, des deux
Caroline, du Dakota du nord et du sud, du Tennessee, de l'Indiana,
du New Hampshire, de la Floride, du Wisconsin, du Wyoming, de
l'Iowa, du Colorado, de l'Idaho, du Michigan, du Montana, de l'Idaho,
de l'Oregon, du Montana et même des Etats-clés de New-York et
de Washington. C'est ainsi que le Vieux Monde était parvenu à
légaliser par le biais de leurs Constitutions elles-mêmes la soumission
perpétuelle des Etats américains à la domination militaire de
l'Europe sur leur sol. La légitimation de l'occupation européenne
éternelle du Nouveau Monde par le canal de la loi fondamentale
des vaincus était la victoire la plus immortelle de la diplomatie
européenne depuis la proclamation de l'indépendance des Etats-Unis
en 1778.
2
- La chute du royaume des cieux 
Par
malheur, quatre décennies seulement après le succès à la seconde
mise sous le garrot du continent de Christophe Colomb, les deux
Eden de l'utopie économique - celui de l'ex-empire des Tsars et
celui de l'ex-empire du Milieu - sont tout subitement tombés en
quenouille; et leur poussière a endeuillé une humanité rendue
tout soudainement orpheline de son royaume des cieux. "Comment,
se demandaient tout déconfits Paris, Londres et Berlin, comment
éterniserons-nous maintenant l'asservissement des Etats américains,
la Californie exceptée, qui ont été évangélisés et béatifiés à
l'école de notre démocratie cuirassée? Le continent de Georges
Washington et d'Abraham Lincoln ne va-t-il pas se réveiller?"
Certes,
le Vieux Monde avait durablement affaibli ses finances à soudoyer
les classes dirigeantes de tant de petits peuples situés à cinq
mille kilomètres de ses côtes; mais tous les Américain proclamaient
maintenant d'un seul cœur qu'ils avaient définitivement adopté
le principe selon lequel leur "défense", comme ils disaient encore
par habitude, serait assurée à jamais par l'Europe. Mais pendant
combien de temps persévèreraient-ils dans leur soumission s'il
n'y avait plus aucun danger militaire à exorciser? Comment le
mythe de la délivrance et de la rédemption de l'Amérique sous
le sceptre militaire de l'Europe n'aurait-il pas commencé de battre
de l'aile?
Mais,
par bonheur, la Californie avait porté à sa tête un europhile
délirant. Ce candide Américain, qui ne comprenait pas un traître
mot à la géopolitique, avait proposé au Vieux Continent de replacer
docilement son Etat sous le drapeau de l'étranger. Pourquoi, disait-on
subitement à Los Angeles, n'entérinerions-nous pas à notre tour
et à jamais la présence militaire des glorieux descendants de
Salamine sur notre territoire? Pourquoi nos deux blasons ne marieraient-ils
pas gentiment leurs couleurs, puisque, de toutes façons, il n'y
a plus aucun ennemi extérieur à repousser? N'est-ce pas une grande
grâce que le Dieu de bonté, que nous appelons maintenant la Démocratie,
ait accordé à nos prières et à nos supplication de vaporiser nos
ennemis en chair et en os dans l'atmosphère? N'est-ce pas un signe
irréfutable de notre délivrance que le tranchant des glaives se
soit émoussé par miracle en Asie et que, si loin que notre regard
inspecte maintenant l'horizon, nos yeux ont peine à croire au
prodige de l'évanouissement du démon qui avait ensorcelé le peuple
russe et le peuple chinois ? Pourquoi, ajoutait le Californien
séraphique, ne pas faire candidement la paire avec notre souverain
européen, pourquoi ne pas partager avec lui le royaume de nos
prêtrises communes, pourquoi ne pas confondre à ses côtés les
occupants et les occupés, pourquoi ne pas collaborer à l'évangélisation
démocratique de nos Etats sous le sceptre de Voltaire?
3
- Naissance de la simianthropologie critique 
C'est alors qu'une science audacieuse est née sur le continent
de Darwin et de Freud, la simianthropologie critique, qui a commencé
d'enseigner un regard de l'extérieur sur l'espèce onirique de
naissance dont toute la politique et toute l'histoire ont basculé
dans un monde de songes. La variété des évadés d'un quadrumane
à fourrure à laquelle nous appartenons, disait cette discipline,
ne sont pas observables au microscope ; et les bésicles de leurs
politologues ne leur permettent pas de s'auto-décrypter à l'école
de leurs propres grimoires. Il faut donc demander à une Europe
de la raison de conquérir un regard du dehors sur la cécité des
Américains désormais asservis à nos armes. Qu'en est-il du cerveau
schizoïde du singe égaré par ses propres vocalises ? Qu'en est-il
de la dichotomie cérébrale qui livre cet animal à une servitude
aveuglée sous la férule du maître étranger qui l'éborgne?
4
- Le traité de l'Alliance atlantique est-il conforme au droit
international? 
Les
premiers escaladeurs du Mont Carmel de la simianthropologie se
disaient les uns autres : "Allons-nous racheter piteusement à
l'étranger les pouvoirs qu'il a usurpés? Allons-nous lui demander
de nous vendre une parcelle du territoire qu'il nous a dérobé?
Allons-nous nous placer sous le commandement du conquérant de
nos champs et de nos jardins? Allons-nous partager avec lui les
titres de propriété que nous avons reçus des mains de nos ancêtres
et qui, de génération en génération nous appartiennent de plein
droit ? Recevrons-nous d'autrui notre propre héritage ? Taillerons-nous
dans l'étoffe de nos propres vêtements les livrées de notre servitude
? En vérité, c'est un terrible marché de dupes que de se voir
accorder par grâce ce qu'on possède de naissance, c'est un honteux
échange de se voir délivrer des patentes par le voleur qui consent
à nous rendre une partie de nos biens et à nous garantir une possession
tranquille à condition que nous lui montrions patte blanche."
Ce
n'est pas dans les nues, disaient encore les précurseurs d'une
Europe socratique, qu'il est question de replacer la France républicaine
sous le commandement militaire des Etats-Unis. On sait que si
notre pays avait dûment accepté de se placer en temps de paix
sous un commandement militaire dirigé par un général étranger,
c'était en 1949, sous une quatrième République vassalisée à la
suite du renvoi de l'homme du 18 juin à Colombey-les-deux-Eglises;
on sait que notre démocratie avait dénoncé ce traquenard anti-constitutionnel
en 1966, huit ans après le retour du Général de Gaulle à la tête
de notre Etat.
Mais quel est le sens profond du mot duperie dont M. Alain
Juppé a usé ? Sa signification n'est pas aussi simple que le croit
la politologie traditionnelle. La nouvelle pensée critique exige
de peser sereinement le poids des mots devenus trop courants pour
ne pas avoir chu dans la banalité. Dès lors qu'il y a soixante
ans, il s'agissait déjà d'un "marché" et que ce caravansérail
du langage simiohumain s'est enrichi du terme de duperie,
il faut s'interroger sur les clauses secrètes auxquelles ces tractations
grammatico-diplomatiques ont abouti; car, dirait M. de la Palice,
ce marchandage de chancellerie conduit nécessairement à l'avantage
du dupeur ou à la confusion de la partie dupée. Quels sont donc
les termes d'une négociation construite sur les traîtrises et
chausse-trapes du langage de la politique? La France va-t-elle
se trahir elle-même à trahir l'Europe et va-t-elle se permettre,
de surcroît, de prendre la tête de cette trahison? Consultons
Talleyrand ou Louis XI; peut-être ces connaisseurs reconnus de
la duperie politique de haut vol nous diront-ils quels poids et
quelles mesures feront pencher dans tel sens ou tel autre le fléau
de la balance à peser la sagesse ou la sottise des nations.
5 - Où le terme de duperie
commence de débarquer dans l'anthropologie politique 
Deux
évidences dominent le paysage et s'imposent à l'observateur. La
première découle d'un examen critique de la nature même du traité
de l'Atlantique nord de 1949, qui, dans le langage ritualisé des
Chancelleries de l'époque, se définissait au titre d'une alliance
conforme aux usages qui régissent par temps calme les relations
entre les Etats souverains. Mais ce traité était-il pleinement
fondé sur un droit international routinier ou dérogeait-il subrepticement
aux conventions paisibles que les nations indépendantes ont coutume
de passer entre elles? En fait, il s'agissait de rien de moins
que d'une occupation militaire étrangement biseautée. Certes,
l'Europe s'asservissait à un Etat étranger, mais dans l'ambiguïté
et pour l'avoir dûment demandé. Comment caractériser la spécificité
militaire et politique d'une cote aussi mal taillée?
Il était sans exemple depuis les Romains que des troupes venues
paisiblement d'ailleurs fussent sédentarisées sur le territoire
d'une autre nation et qu'elles y fussent pacifiquement lovées
en garnisons armées jusqu'aux dents, et cela avec l'accord exprès
et empressé de gouvernements désireux de s'asservir pour le motif
que tout le monde voyait sous les traits de l'occupant un protecteur
bienveillant; mais il était également incroyable que les occupés
fussent tellement effrayés par un ennemi redoutable qu'ils se
montraient éperdument reconnaissants de ce qu'un grand peuple
eût consenti à venir les vassaliser et que l'évangélisateur eût
daigné venir s'incruster à demeure sur le territoire de ses suppliants.
Certes, les Gaulois menacés par Arioviste avaient appelé Jules
César à leur secours et celui-ci avait commencé par repousser
les envahisseurs helvètes. Mais l'Europe n'avait-elle rien
appris depuis deux millénaires? Ne savait-elle pas que les sauveurs
ne sont jamais que des conquérants déguisés et qu'il est plus
difficile de les faire repartir que de les faire accourir?
Le
piège politique qui donnait sa substance au traité de l'Alliance
atlantique de 1949 ne s'expliquait donc que par un autre piège
de même taille et plus crédible encore que le premier, à savoir
la croyance selon laquelle le paradis terrestre avait jeté son
dévolu sur la Russie, où un peuple libéré du servage depuis moins
d'un demi siècle, donc tout subitement sorti de l'âge féodal,
mais bien insuffisamment à ses yeux, avait fait table rase de
son passé d'esclave et tenté, à l'image des chrétiens du premier
siècle, d'abolir à jamais la propriété privée. De ce fait, tout
le monde était censé avoir conquis la liberté, la vraie, la séraphique,
celle qui réduisait les conquêtes pré-évangéliques de la Révolution
française sinon une grossesse interrompue, du moins à un accouchement
prématuré. L'an 1789 symbolisait maintenant un triste avortement
du fameux "processus historique", dont l'avènement annoncé
apporterait sur le mode expéditif le salut et la délivrance définitifs
au genre humain tout entier. Que signifie le terme de duperie
dans un monde livré depuis Voltaire à une lente remessianisation
du temporel à laquelle la mouture démocratique du mythe du salut
sert de Paraclet? Que devient la diplomatie rationnelle quand
une finalité para-théologique s'empare de la définition même des
mots-clés de la politique mondiale?
6
- La démocratie de Manès et les premiers pas de la simianthropologie
critique 
Soixante
ans après la signature du traité de 1949, la science historique
et l'anthropologie modernes demeurent muettes au spectacle des
grossesses eschatologiques, messianiques et sotériologiques dont
le genre simiohumain se veut la proie. Mais l'angoisse et la stupeur
des classes dirigeantes européennes à l'heure de leur découverte
du tragique désarmement intellectuel auquel elles se trouvent
livrées expliquent leur soumission tantôt délibérée, tantôt piteuse
et repentie à un César d'outre-Atlantique; car il était consolant
que la vie onirique de la politique fût prudemment canalisée par
un rêve démocratique rieur et bon enfant. Mais il était à craindre
que ce catéchisme reconduisît les foules aux délires des croisés
du Moyen Age ou à une résurrection larvée du culte de Manès, qu'on
conceptualiserait à l'école des principes de 1789. Déjà des esprits
perspicaces voyaient clairement que le Bien et le Mal avaient
fait leur nid dans les Saintes Ecritures d'une démocratie eschatologisée
sur le modèle biblique ; et ils se faisaient les Cassandre des
catastrophes politiques qui naîtraient fatalement des retrouvailles
précipitées du cosmos avec les évangélisateurs d'autrefois.
7
- La guerre des rédemptions 
Dans
cette guerre des rédemptions langagières, le général de Gaulle
avait relevé le défi que deux délires eschatologiques étroitement
associés lançaient à une France à laquelle Voltaire avait pourtant
commencé de retirer les bandelettes de ses idoles: il fallait
démythifier en premier lieu, disait l'auteur de La France et son
armée, le catharisme politique des convertisseurs russes de la
planète. La purification à laquelle ils procédaient par le massacre
systématique des possédants s'enracinait dans le resurgissement
d'un rêve apostolique de type vétéro-testamentaire fondé sur l'immédiateté
de l'avènement du salut - précipitation hébraïque que la résignation
chrétienne ne parvenait plus à refouler.
Il
était également indispensable de désacraliser le dérangement cérébral
propre aux démocraties sotériologiques dont l'hérésie, encore
larvée, aiguisait le glaive d'un messianisme américain dominateur.
On battait sur les rives de l'Hudson le fer des conquérants sur
l'enclume d'un édénisme politique non moins angélisé par son catéchisme
que celui du pseudo séraphisme marxiste. Pour cela, suffisait-il
au Général de Gaulle d'appeler un chat un chat? Pour demander
aux troupes américaines de déguerpir avec armes et bagages, il
fallait disposer d'une auréole aussi mythologique que celle des
deux géants du langage dont les songes et les masques s 'entrechoquaient
dans les nues. Aussi, la France avait-elle brandi un tonnerre
matamoresque et qu'on entendrait en tous lieux. Les théologiens
de l'apocalypse à la française le qualifiaient de "défense
tous azimut" et le créditaient de la capacité de désensorceler
aussi bien l'encéphale marxiste que le démocratique.
8
- La chute de l'utopie marxiste 
Mais
si le Général de Gaulle disposait d'une fulmination mythologique
non seulement plus terrorisante que le "grand soir" des
sotériologues de l'Est, mais plus cataclysmique que le Mal qui
armait les Etats-Unis d'une mythologie nucléaire empruntée à Manès,
la partie n'était pas gagnée pour autant. Car il convenait de
démêler l'écheveau des trois cosmologies parareligieuses qui soutenait
la première évidence politique évoquée ci-dessus, celle qui permettait
à l'Amérique d'arborer le masque pseudo irénique d'une démocratie
falsifiée à l'échelle de la terre et d'étendre la suprématie de
ses songes surarmés à la faveur d'une sotériologie réputée se
trouver incarnée à l'école de son glaive. Certes, les royaumes
de l'imagination théo-militaire fondent les empires depuis les
origines du temps mémorisé ; mais le mythe démocratique américain
a subi une décapitation redoutable de son eschatologie guerrière
quand l'utopie biblique d'en face s'est effondrée avec le mur
de Berlin.
Comment le statut fantasmagorique d'un OTAN tenu pour libérateur
allait-il survivre à la ruine de la mythologie adverse? Comment
les peuples et les gouvernements, hier épouvantés et tout tremblants
à la perspective d'un déferlement du prolétariat mondial sur l'Europe
n'apprendraient-ils pas à interpréter avec des yeux dessillés
et à l'école d'autres paramètres l'occupation militaire d'un Vieux
Monde domestiqué depuis 1949, dès lors le langage vertueux des
démocraties se révélait un masque tartuffique et que ce masque
se trouvait violemment arraché du visage de l'Amérique par les
premiers Molière de la simianthropologie critique ? On se demandait
ce qu'il allait advenir de l'art d'abêtir les populations et les
nations dans la maison d'Orgon du mythe de la Liberté si l'Europe
de la raison faisait seulement ses premiers pas et si la radiographie
demeurée incomplète du cerveau du simianthrope ne lui permettait
pas encore de débarquer dans la géopolitique. On se disait que
les peuples vassalisés par quatre décennies d'une mythologie de
la liberté n'allaient pas cesser sur l'heure de se boucher les
oreilles et de se mettre sur les yeux le bandeau de leur servitude,
même s'il n'y avait plus d'ennemi physique en vue, plus de péril
corporel à conjurer, plus de Lucifer à désarmer , parce qu'un
ennemi qui a disparu physiquement demeure longtemps flottant sous
la forme d'un spectre, d'un fantôme ou de vapeurs redoutables
dans l'encéphale embrumé du singe parlant.
9 - Une psychanalyse
anthropologique de la duperie 
Telles
sont les données qui, vingt ans après la chute du mur de Berlin,
posent aux commentateurs avertis la question cruciale de la future
définition anthropologique du terme de duperie. Car ce
vocable ne saurait se trouver livré à la pesée sur les plateaux
de la balance en usage dans la diplomatie classique, qui obéit
à la psychologie traditionnelle de la "conscience claire"
héritée du Moyen Age et qui se fonde sur une classification des
"facultés mentales" qui remonte à Aristote. Mais ce ne
sont plus les clauses écrites noir sur blanc dans les traités
qui qualifient la notion abyssale de duperie - il y faut
un décryptage de l'inconscient qui pilote les cosmologies narcissiques
dans lesquelles l'histoire s'enveloppe.
Voyez
comme l'examen des conditions pratiques du retour de notre pays
dans le carcan de l'OTAN soulève la question de la psychophysiologie
des vertiges auxquels le singe parlant est livré: car si ce retour
implique la réinstallation de bases militaires américaines sur
notre sol, rien ne serait plus contre-performant, aux yeux d'un
mythe du salut et de la délivrance fondé sur l'intervention purement
séraphique de la démocratie du Nouveau Monde, que d'étaler indirectement,
mais d'autant plus crûment aux yeux de tous les peuples du Vieux
Monde les régiments et les forteresses qui quadrillent leur territoire
depuis six décennies. De plus, ces places fortes sont armées de
bombes nucléaires devenues inutiles, mais fort peu surveillées
et qui demeurent pointées jour et nuit contre un ennemi vaporisé
depuis quatre lustres dans l'atmosphère.
Décidément, il ne suffit plus d'ouvrir le Larousse pour comprendre
le sens que la diplomatie et la politique modernes doivent donner
à un terme devenu un rébus anthropologique et qu'un humanisme
superficiel avait faussement banalisé. Qu'est-ce qu'une duperie
si, pour découvrir les arcanes d'une tromperie viscérale et devenue
une énigme anthropologique, il faut apprendre au préalable à peser
le cerveau cadenassé de chimères dont notre espèce demeure affligée
et fonder une science entièrement nouvelle, celle de l'examen
des ressorts du singe abstrait? Comment se fait-il que la politique
de notre astéroïde demeure prisonnière de fantasmes évanouis dans
le vide?
10 - La spectrographie
de la notion de duperie en politique 
A - La
provincialisation de la géopolitique 
Si
vous vous livrez à une spectrographie de l'article que M. Nicolas
Sarkozy et Mme Angela Merkel ont signé ensemble dans le Monde
daté du 5 février 2009, la notion de duperie en politique va se
ramifier au point que vous ne saurez plus très bien qui se trouve
dupé et qui joue le rôle du dupeur dans un petit tricot diplomatique
dont la courte vue stupéfiera les historiens de demain.
Il
s'agissait de préparer la "Conférence sur la sécurité"
du 7 février, qui est annuelle et à laquelle la France et l'Allemagne
allaient participer un peu plus solennellement que de coutume
du fait que les Etats-Unis ont exigé de l'Europe qu'elle commémore
solennellement, en avril 2009, le soixantième anniversaire de
la signature du traité d'asservissement du Vieux Monde au Nouveau
qui a inauguré un siècle entier de vichysme du Continent
de la pensée. Qui est dupe et à quelle profondeur de l'inconscient
de la médiocrité politique faut-il descendre si, répétons-le,
il n'y a plus de "sécurité collective" à défendre depuis
la chute du mur de Berlin en 1989, de sorte que la duperie,
consentie, c'est le centralisme occidental lui-même, qui interdit
à une Europe apeurée de prendre le large et de s'ouvrir résolument
aux pays émergents. Si Freud avait consacré sa vie à décrypter
l'inconscient politique de la domestication des nations par un
maître mythifié, l'Europe d'aujourd'hui disposerait d'une politologie
dont le scanner serait en mesure de réfuter les démocraties subrepticement
soumises à des Messies de leur propre asservissement.
Quel
était le but secret de l'entretien rétrécisseur de la planète
entre M. Nicolas Sarkozy et Mme Angela Merkel, sinon de banaliser
le retour de la France dans une OTAN catéchisée par son maître,
ce qui exigeait une provincialisation soporifique, lénifiante,
anesthésiante, édulcorante et dormitive de la politique du globe
terrestre. Pour cela, il fallait s'attacher à étendre en catimini
la notion factice de "sécurité" à l'ensemble d'une politique
réputée "américaine et européenne" - donc artificiellement
emmêlées pour la circonstance. Mais l'Allemagne est une pouliche
qui commence seulement de gratter le sol du sabot, qui ne ronge
pas encore son frein à l'écurie, qui ne piétinera d'impatience
que dans quelques années et qui, de toutes façons, demeurera éloignée
des champs de course aussi longtemps qu'elle demeurera entravée
par les deux cent quatre vingt dix-huit bases américaines campées
sur son haras - celles qui ont permis aux armées du Nouveau Monde
de se trouver subrepticement acheminées vers une Italie occupée,
elle, par cent trente sept camps retranchés de l'occupant, puis
embarquées à destination de l'Irak à partir du port de Naples.
B - La dissimulation
enfantine 
C'est
le souci de neutraliser la rude réalité du rapport effectif des
forces dans le monde qui a conduit M. Nicolas Sarkozy et Mme Angela
Merkel à feindre de chapeauter l'univers de conserve et même de
le contrôler bras dessus, bras dessous, à la manière des enfants
heureux de jouer dans un préau qui leur est réservé. Il fallait,
en tout premier lieu, faire semblant de trouver des motifs "d'insécurité
militaire" imaginaires ou éloignés du théâtre des opérations
artificielles de l'OTAN . "Les événements de ces derniers mois
suscitent des préoccupations. Un contexte d'insécurité se développe.
La guerre dans le Caucase a été le premier conflit militaire de
ce siècle en Europe. Au début de cette année, les affrontements
entre Israël et le Hamas ont rappelé l'instabilité au Proche-Orient.
Il n'y a toujours pas de progrès dans le règlement de la crise
nucléaire iranienne. Les attentats terroristes se poursuivent,
de même que la violence en Afghanistan et au Pakistan ou les affrontements
en Afrique, au Congo et au Soudan."
Observez
l'astucieuse stérilisation de l'histoire réelle qui permet à nos
enjôleurs vichyssois d'évoquer sur le mode énumératif et
en style administratif un prétendu "contexte d'insécurité"
global et de mettre sur le même plan les "affrontements
entre Israël et le Hamas" et la "guerre dans le
Caucase". Cette municipalisation truquée de la géopolitique
a pour finalité réelle un rapetissement et un aplatissement du
champ de course de l'histoire afin de permettre à nos comploteurs
un survol atlantiste de la planète, mais illusoire et en rase-mottes.
C - Les progrès
de la dissolution de l'Histoire dans le vichysme
européen 
Plus fort encore : il va falloir s'échiner à ranger de force
sous la rubrique de l'"insécurité" militaire des événements
radicalement étrangers par nature aux conflits armés : "Et,
en arrière-plan, nous faisons face aux turbulences engendrées
par la crise des marchés financiers et à celles de l'économie
mondiale, ainsi qu'au défi du changement climatique."
Puis la logique de la "duperie" inconsciemment nourrie
par le désir d'allégeance au souverain va ratisser de plus en
plus large : "Une politique de sécurité concertée est absolument
nécessaire. Pour nous, il est clair que notre politique de sécurité
doit être définie de manière plus large. Outre les questions proprement
militaires, elle doit prendre en compte la situation financière
internationale, les approvisionnements énergétiques ou les questions
migratoires." La France va pouvoir se glisser dans une
OTAN de fromagers complices où l'Elysée va jouer au coucou d'une
horloge suisse.
Mais
la médiocrité diplomatique commence de tisser la toile d'araignée
dans laquelle se prendront les moucherons. La méticulosité des
nomenclatures factices paraîtra encager les grands fauves et les
oiseaux de proie qui font l'histoire de la planète. Nous allons
assister à un cours de sixième à faire bâiller les enfants. Entrons
dans l'OTAN comme dans un gentil jardinet, entrons dans la politique
internationale à l'échelle de la pouliche allemande, cette championne
du monde de l'exportation de ses produits manufacturés, mais condamnée
longtemps encore à trembler devant Washington et Tel Aviv.
D - Le
picotin de la politique internationale 
Mais qui est dupe et où se cache le dupeur quand
on écrit : "Pour l'Allemagne et pour la France, face aux défis
actuels, l'Europe a besoin des Etats-Unis comme les Etats-Unis
ont besoin d'un partenaire européen fort"? Tout se ramène
à insinuer que le retour des Gaulois dans l'OTAN des ancêtres
se réduira au jeu bénin de reprendre une place un instant désertée
dans l'écurie du dérisoire mondialisé. Partageons le picotin de
la politique internationale avec une Allemagne bon enfant et sagement
domestiquée depuis Hitler.
Mais de qui se moque le pédagogue de la servitude si le fameux
"besoin réciproque" de la France et de l'Allemagne de se
partager le foin de la duperie prend le plus grand soin
d'effacer des tablettes de l'histoire jusqu'à la mémoire de l'évaporation
du péril soviétique et de son ascension ad astra ? "L'Europe
occidentale a connu soixante années de paix et de liberté - et
c'est aujourd'hui le cas dans presque toute l'Europe. Nous le
devons, bien sûr, à notre détermination, mais aussi aux Etats-Unis.
Une Amérique qui est restée à nos côtés et s'est engagée en faveur
d'une Europe libre et démocratique." Prions, mes frères, et
rendons grâce à notre sauveur : on ne saurait rendre plus séraphique
la partition, on ne saurait rendre plus bucolique le paysage,
on ne saurait mieux psalmodier des litanies à l'école d' Alice
au pays des merveilles !
E - Qu'est-ce
qu'une Europe unie et libre ? 
Mais
voici que l'apprenti-dupeur aux bras courts commence de
pointer le bout de l'oreille. Pardonnez au quai d'Orsay des myopes,
songez que Paul et Virginie ne sont pas encore baptisés à l'école
du tragique, soyez indulgents à Rousseau, car la naïveté de la
France champêtre est demeurée celle d'une politique mondiale revisitée
par les verts de l'OTAN : "Et nous, Européens, nous devons
parler davantage d'une voix forte et unie, ce qui exige de la
part des Etats membres un haut degré de cohésion dans le cadre
de la politique étrangère et de [la] sécurité commune.
De même, nous devons accroître et mettre en commun nos capacités
militaires et civiles au service d'une politique d'avenir pour
la sécurité de l'Europe."
Décidément
le marmot pseudo dupeur n'est pas expert en roueries. Il
ne sait ce qu'il se veut à seulement faire valoir qu'il se montrera
un vassal plus musclé que celui d'hier, mais qu'il deviendra de
surcroît plus docile encore à montrer ses nouveaux biceps à son
souverain. "L'Union européenne sera à l'avenir un partenaire
plus fort pour les Etats-Unis". Un valet a-t-il quitté sa
livrée à vanter ses services futurs ? Et voici que Talleyrand
et Vergennes n'ont qu'à bien se tenir: "Pour la première fois
dans l'histoire de l'Alliance atlantique, ce sont deux pays, nos
deux pays, qui convient leurs alliés pour[à]un sommet, celui du
60e anniversaire [de l'alliance] les 3 et 4 avril. C'est
un symbole fort d'une amitié franco-allemande au service de la
paix et de la sécurité. C'est également le symbole d'une Europe
désormais unie et libre." Qu'est-ce que l'Europe "
unie et libre", qu'est-ce que le service de "la paix et de
la liberté" si les cartes de la paix et de la Liberté sont
truquées ? Il a la vue courte, le petit Poucet qui court à toutes
jambes derrière un faux roi du monde.
F - Le nouveau Silence
de la mer 
"Soixante
ans après la fondation de l'OTAN, l'engagement d'assistance envers
un allié agressé, qui découle de l'article 5 du traité de Washington,
représente encore aujourd'hui l'essence même de l'Alliance. Nous
en avons tiré une conséquence supplémentaire après les attaques
terroristes du 11-Septembre. Afin de lutter contre le terrorisme,
nous nous sommes engagés avec nos alliés en Afghanistan. Car c'est
une des nouvelles menaces du XXIe siècle." C'est oublier que
l'article 5 n'assimile pas l'attaque d'un ou de deux kamikazes
contre un building à l'agression d'un Etat par un autre, c'est
oublier que le souverain a bondi sur cette "opportunité",
comme il l'avoue lui-même, pour entraîner ses vassaux à agresser
une nation, c'est oublier que les serfs sont victimes avant tout
de trous de mémoire, c'est oublier que le plus gigantesque trou
de mémoire, c'est l'oubli qu'on ne fait pas davantage jeu égal
avec l'étranger qui campe sur vos terres qu'avec l'hôte qui, dans
le Silence de la mer de Vercors, plaque les plus
beaux accords sur votre piano.
G - Attention,
les enfants !
Mais
il va devenir de plus en plus clair que ce discours pacifique
d'apparence a pour seule finalité d'étendre le glaive d'un OTAN
conquérant à la Russie de l'après-marxisme: "La guerre en Géorgie
durant l'été 2008 [Je corrige en passant les fautes de grammaire:
en français de l'Elysée on écrit "à l'été", "à l'automne", etc.],
a marqué une rupture. L'Union européenne a pu arrêter la spirale
de la violence et créer les conditions d'un processus de règlement.
Mais le recours à la force militaire, ainsi que la reconnaissance
unilatérale et contraire au droit international de l'Ossétie du
Sud et de l'Abkhazie, ont créé un problème de confiance avec la
Russie."
Attention,
les enfants, il est hors de question de jamais faire allusion
à la "spirale de la violence" à laquelle l'Irak et la Palestine
servent de théâtre, et surtout, gardez-vous d'évoquer d'autres
entorses au droit international que celles dont le maître de l'OTAN
vous demande de vous indigner; mais si vous suivez la trace des
trous de mémoire de la vertu, vous connaîtrez le chemin de la
mémoire des maîtres et des serviteurs de la "Liberté" et
de la "Justice" du monde.
H - Le retour de
Jahvé 
Et
voici que le Dieu de vérité surgit des coulisses. La récitation
de son catéchisme exige maintenant que l'humanité se trouve dupée
tout entière par Jahvé. Pour cela, apprenez de ses petits-fils
la véritable nature du roi du Déluge et de la fantasmagorie nucléaire:
"Nous appelons enfin à un renforcement du régime de non-prolifération.
Il est confronté actuellement au plus grand défi de son histoire
: le programme nucléaire iranien. Téhéran table ouvertement sur
l'absence de réaction internationale face à ses agissements. Nous
ne permettrons pas l'accès de l'Iran à l'arme nucléaire, car ce
serait une grave menace pour la paix mondiale. Nous comptons sur
une solution diplomatique Et, pour répondre à ce défi majeur,
nous sommes prêts à un dialogue que renforce [renforcera]
l'engagement des Etats-Unis, ainsi qu'à de nouvelles sanctions
très fermes."
Vous remarquerez, primo, que les Etats et les Eglises ne
démontrent jamais ce qu'ils disent - ils procèdent seulement par
affirmations dogmatiques. Vous noterez, secundo, que les
huit puissances nucléaires actuelles conservent farouchement leur
foudre inutile, alors qu'elles sont censées s'en défair; vous
prendrez acte, tertio, que seul l'Iran aux nerfs d'acier menace
de pulvériser ses huit compagnons surarmés, et cela sans craindre
de représailles; vous soulignerez, quarto, que toute réflexion
sérieuse sur le mythe de l'atome suicidaire est interdite sur
l'ordre de Jahvé. Qu'est-ce que la duperie, si c'est la
raison du genre simiohumain tout entier que l'Europe de Vichy
est appelée à duper à l'école de l'interdiction de penser
dont vous commémorerez la construction de la basilique le 4 avril
2009?
Décidément,
à fouailler les entrailles de la duperie, l'homme du "connais-toi"
pourrait bien nous entraîner à décrypter les mystères insondables
de la sottise du roi du Déluge, qui s'en est du moins repenti,
si vous en croyez ses confessions écrites. Comme le rappelle le
Colonel Alain Corvez, qui a dirigé la Finul au Liban: "L'emploi
de l'atome est tellement inenvisageable par les destructions qu'il
suppose, que les adversaires potentiels sont dissuadés d'aller
plus loin dans leurs menaces. A cet égard le document signé l'année
dernière par cinq anciens Chefs d'états-majors atlantiques, dont
hélas ! Un Français, préconisant l'emploi de l'arme nucléaire
de façon préventive pour lutter contre le terrorisme est un tissu
d'absurdités dangereuses, sans doute rédigé sur commande afin
préparer l'alignement de la France sur la stratégie mondiale américaine."
11
- Comment débarquer parmi les esclaves sans déchoir? 
Supposons que, dans la crainte d'un réveil subit de la lucidité
des peuples endormis de l'Europe, qui pourraient bien rouvrir
tout soudainement les yeux et porter le regard de leur lucidité
retrouvée sur la duperie dont ils sont les victimes, l'Amérique
renonçait à demander à une France pourtant venue à résipiscence
de réoccuper son territoire et de réinstaller, en bonne et saine
logique, le quartier général américain à Roquencourt près de Versailles.
Qu'en serait-il alors d'une Gaule redevenue maîtresse de son territoire
depuis quarante trois ans et brusquement replacée sous le commandement
militaire d'un empire étranger ? Sait-on qu'il existe cent quatre
vingt dix-huit garnisons américaines incrustées en Allemagne et
cent trente sept lovées en Italie? Sait-on que celle de Vicenza
s'est trouvée puissamment renforcée il y a deux ans sous le gouvernement
d'un Prodi livré aux assauts d'un M. Berlusconi alors dans l'opposition
et qu'elle sert de rampe de lancement à la conquête américaine
de l'Afrique? Sait-on que Naples demeure la base de la flotte
de guerre la plus puissante dont l'Amérique dispose au cœur du
Vieux Monde, celle qui, à elle seule, garantit à Washington la
maîtrise absolue de tout notre ancien Mare Nostrum?
Pour découvrir la signification anthropologique du docile retour
de la France dans le giron des vassaux européens du Nouveau Monde,
alors que la France est redevenue souveraine depuis si longtemps
sur son sol, il faut tenter d'élucider sans cesse davantage la
notion superficielle de "marché de dupes", alors que la
duperie jette maintenant la fierté d'une nation à l'encan.
Imaginons un instant que les Gaulois rendus tout honteux d'avoir
retrouvé leur souveraineté se glissent à nouveau en catimini dans
une coquille pleine à craquer de peuples garrotés par un César
mondial de la "Démocratie" et de la "Liberté". Dans
ce cas, quels poids et quelles mesures permettront-ils de peser
l'autorité et l'influence sur la scène internationale des peuples
de l'Europe domestiqués en raison de l'occupation militaire de
leur territoire par une nation étrangère? Pour l'apprendre, il
faudra construire la balance dont les plateaux recevront des substances
inconnues de la science diplomatique classique, telles que l'
"asservissement", la "servitude", la "traîtrise",
la "trahison", la "sottise", la "myopie", l'"ignorance".
Mais le constructeur de cette balance inconnue des marchands sera
une France mise à part, sinon à titre statutaire, du moins de
fait, puisqu'elle n'aura ni province à replacer sous le joug de
Washington, ni régiments à soumettre derechef au commandement
en chef d'un général d'outre Atlantique.
Et pourtant, cette France-là ne sera pas encore armée d'une avance
intellectuelle suffisante sur le reste de la planète pour rappeler
aux peuples asservis du Vieux Monde que la sujétion est une duperie
politique non encore décryptée par nos politologues. Pour en prendre
acte, il faut commencer par apprendre sur quoi porte la tricherie
tartuffique, celle qui s'enracine dans la psychobiologie de l'espèce
masquée. Que se serait-il passé si un Général de Gaulle dûment
aboubé par l'étranger avait obtenu de son souverain, le Président
des Etats-Unis, un certain Lindon B. Johnson, des patentes attestant
de son statut d'homme-lige hautement privilégié et auquel un rang
éminent aurait été accordé dans l'Alliance atlantique? Je rappelle
qu'à l'époque, l'OTAN était encore censée protéger l'Europe d'une
menace militaire réelle, de sorte que notre vassalisation physique
n'était qu'adventice et en quelque sorte collatérale à une protection
militaire effective. Question : si les troupes américaines avaient
néanmoins décampé de France avec armes et bagages, la partie dupée
aurait-elle été l'américaine ou la française?
12
- De la loyauté en politique

La réponse ne fait pas de doute: quand une nation réputée souveraine
se faufile spectaculairement dans un empire dont la puissance
militaire prend appui sur un réseau international d'un millier
de garnisons implantées pour toujours sur les cinq continents,
elle se rend objectivement complice d'un statu quo inacceptable
par nature et par définition. Admettre le retour officiel de la
France dans l'OTAN, c'est entacher à jamais l'histoire de la nation
d'un déshonneur que les historiens jugeront ineffaçable, puisque
la victime immolée sur l'autel de la servitude sera la dignité
d'un peuple, celle qui lui aurait permis de sauver à elle seule
et pendant près d'un siècle la fierté native du Vieux Monde et
de garder vivant le souvenir de sa souveraineté perdue tout au
long d'une douloureuse épreuve. C'est pourquoi le Général de
Gaulle n'était plus dans l'Alliance atlantique que pour la forme.
Le véritable échiquier de la France redevenue souveraine, c'était
déjà la Russie, la Chine, l'Inde, l'Amérique du Sud.
Mais,
dira-t-on, une France de retour dans l'OTAN ne pourrait-elle dire
à ses partenaires : "Regardez-moi bien. Ne voyez-vous pas que,
depuis quarante-trois ans, mon territoire n'est plus occupé par
les bases militaires d'une autre puissance ? Imitez-moi, demeurez
debout dans une alliance entre Etats souverains, devenez à votre
tour des de Gaulle de votre nation. Restez à mes côtés et sachez
que je ferai usage de mon droit de veto chaque fois que votre
ambition de retrouver, vous aussi, votre souveraineté aura besoin
de mon secours.
Mais cette forme de la duperie est la plus nocive de toutes,
celle qui ferait de la France une traîtresse par nature et par
vocation sur la scène internationale. Voyez comme la droiture
est l'âme de la politique, voyez comme la loyauté est la condition
de la victoire : à la veille de la bataille d'Arbèles, Parménion
conseillait à Alexandre d'attaquer l'ennemi en pleine nuit et
de l'écraser dans son sommeil. Alexandre lui répond : "Tu me
conseilles une astuce de brigand et de voleur dont la seule ambition
est de passer inaperçu. J'attaquerai en pleine lumière et à visage
découvert, parce que je préfère l'infortune à une victoire honteuse."
Mais Alexandre savait que Darius avait prévu cette ruse de guerre
et qu'il avait laissé sa cavalerie sellée et le mors aux dents
toute la nuit, multiplié les sentinelles et allumé des feux qui
éclairaient le camp comme en plein jour. Si M. Nicolas Sarkozy
s'appelait Alexandre, il saurait que les Etats-Unis tiennent éveillée
toute la cavalerie de leurs vassaux et qu'ils montent la garde
dans toute l'Europe occupée afin de faire échouer le Parménion
français.
A
l'heure des retrouvailles du Vieux Continent avec lui-même, ne
réservons pas une place à la France sur le banc des accusés de
demain, ne figurons pas au rang des Quisling de l'Europe, affrontons
Darius en plein jour, parce que le tribunal de la mémoire des
nations nous clouerait au pilori de la honte si nous nous rendions
complices d'une ruse de brigands et de voleurs. Mais quel sens
donnerons-nous au terme de duperie si nous sommes appelés
à présenter à Clio une balance à peser au plus secret de l'honneur
des nations?
23 février 2009