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LETTRES A LA GENERATION DE LA LIBERTE

XV - Qu'est-ce qu'une religion?

Le discours de Latran et le Dieu de l'Amérique


I - Une révolution du droit international public - Réflexions sur la destitution du Président de la République en vertu de l'art. 68 de la Constitution du 23 février 2007, 15 octobre 2007
II - La pesée du cerveau du Président de la République conduit au coeur de l'histoire du monde, 18 octobre 2007
III - La Constitution de la Vème République et la vocation morale de la France, 22 octobre 2007
IV - L'histoire narrative et l'histoire comprise - Guy Môquet et le problème de la vérité historique, 30 octobre 2007
V - Comment définir la vérité ? L'Europe et l'avenir de la raison, 5 novembre 2007
VI - Aux sources de l'étonnement philosophique , 8 novembre 2007
VII - Comment apprendre à la jeunesse à juger un chef d'Etat ?, 13 novembre 2007
VIII - Les démiurges de l'humanité, 19 novembre 2007
IX - Une imposture culurelle validée par la justice française, L'anthropologie critique et le marché de l'art,
26 novembre 2007
X - Le naufrage intellectuel du parti socialiste,
3 décembre 2007
XI - Un village Potemkine de la diplomatie mondiale, Annapolis,10 décembre 2007
XII - Jean-François Kahn et le thème de la folie en politique. Une psychanalyse de la condition humaine est-elle possible?
17 décembre 2007
XIII - Le naufrage de la culture française, 2 janvier 2008
XIV - L'Institut international de simianthropologie - Esquisse d'une légitimation de cette science, 7 janvier 2008
XV - Qu'est-ce qu'une religion? Le discours de Latran et le Dieu de l'Amérique, 14 janvier 2008
XVI - Le corps de Nicolas Sarkozy et le corps de la France,

*

1 -La démocratie et la raison
2 - La théologie de Nicolas Sarkozy
3 - La sous-conversation de M. Nicolas Sarkozy avec le Saint-Siège
4 - L'inconscient infernal de l'histoire
5 - L'anthropologie des théologies
6 - Le nouveau Graal de l'univers
7 - La géopolitique du Saint Esprit
8 - La sous-conversation de Moscou avec l'Europe vassalisée
9- L'avenir de la guerre de la raison
10 - Suite de l'itinéraire de la raison française
11 - Suite de l'itinéraire de la raison française
12 - Suite de l'itinéraire de la raison française

*

1 - La démocratie et la raison

Si une délégation d'intellectuels débarquait de la planète Mars sur notre astéroïde hébété, sa première surprise serait de découvrir que notre espèce se divise entre des croyants et des incroyants, mais que ni nos philosophes , ni nos Etats ne se posent la question première, qui devrait se formuler en trois mots : " Qu'est-ce qu'une religion ? "

Le 20 décembre 2007, M. le Chanoine honoraire Nicolas Sarkozy a prononcé en la basilique Saint Jean de Latran de Rome un discours pastoral qui marquera d'une pierre noire l'histoire des relations jusqu'alors globalement socratiques que les démocraties avaient entretenues avec la pensée rationnelle depuis Périclès ; car, ce jour-là , la nation qui a fondé la politique du monde sur la voix retrouvée du suffrage populaire et qui a scellé l'alliance du régime démocratique avec le concept de civilisation aura tenté de légitimer la capitulation d'un Etat moderne devant le sacré. La France de Descartes épaulera donc désormais la guerre intraitable à la science et à la philosophie à laquelle l'Eglise catholique a vocation de se livrer depuis deux millénaires. Mais cette offensive d'un vieux mythe cosmologique contre l'empire devenu intercontinental, lui aussi, de la connaissance du réel pourra également contribuer à tirer la France copernicienne de son sommeil ptolémaïque, parce que la mobilisation des légions de la foi au sein de tous les peuples et de toutes les nations galiléens de la terre ne fera que donner un élan nouveau et plus actuel à la guerre entre les autels de la foi et ceux de la connaissance, parce que Platon a plongé à jamais la philosophie dans l'eau de baptême de l'" esprit critique " .

A première vue, il semble donc qu'il ne s'agisse que d'un arrangement de circonstance entre deux paresses cérébrales aussi sommitales qu'ennemies l'une de l'autre, celle de l'Etat pseudo-philosophique de 1905, d'une part, qui a laissé la pensée mondiale en panne d'inspiration , donc de sacrilèges, et celle de l'Eglise de Benoît XVI, d'autre part.

- Le christianisme et l'avenir de la raison européenne , Le Monde, 29 décembre 1999

Si une alliance morbide entre ces deux tranches d'une demi raison devait conduire la France à une prise de conscience accélérée des secrets anthropologiques de la crise intercontinentale d'identité de la philosophie contemporaine, la renaissance de " l'esprit d'examen " de Voltaire trouverait enfin son vrai tremplin, parce que nous assisterions au trépas de la sotte croyance selon laquelle les Etats auraient vocation à devenir un jour réellement et entièrement pensants - depuis Athènes, cette illusion tenace est la cause principale de la paralysie de toute connaissance en profondeur de l'évolution cérébrale du genre simiohumain.

C'est donc dans la postérité logique de la cécité anthropologique du siècle des Lumières que l'Eglise et la République se sont avancées en aveugles sur le terrain miné qui les condamne désormais à révéler - à leur corps défendant - combien leurs fantasmes respectifs sont incompatibles entre eux, parce qu'ils renvoient à deux types de cerveaux de fabrication différente. Aux yeux de l'Eglise, le " sens de la vie " est de nature mythique, donc également " l'espérance ", la " transcendance " et la définition même du " bien " et du " mal " ; car toutes ces valeurs sont censées avoir été dictées du haut du ciel à une créature livrée pieds et poings liés à un souverain absolu du cosmos, ce qui rend sa servitude universelle et immuable par définition , tandis que, par un effet de leur nature, tous les Etats du monde opèrent la mutation inverse : les croyances et les vertus se changent en proies de leur renommée et en instruments de leur puissance. Là où l'ambition des Eglises immobilise l'histoire à la gloire d'un maître vaporisé dans les nues et hiératise les sociétés au profit d'une idole ambitieuse de régner sans partage, la pensée et la science se fondent à nouveau, mais depuis cinq siècles seulement, sur la raison grecque fécondée , depuis deux siècles sur la sociologie née avec Diderot, depuis un siècle et demi sur les premiers pas d'une connaissance des origines simiennes d'une humanité que la lente maturation de son encéphale semi animal n'a pas encore conduite aux funérailles de ses sorciers .

2 - La théologie de Nicolas Sarkozy

Depuis Socrate, les semi évadés de la zoologie tentent péniblement de connaître la nature des chaînes que la terre et leurs songes s'appliquent à entrelacer - ce qui, depuis Pinel, Charcot et Freud a placé l'étude de la folie proprement cérébrale de cette espèce sur l'enclume de la philosophie occidentale, donc mondiale. Certes, l'Eglise s'attache également à se forger une pastorale de la finitude, donc de la folie de la créature , mais seulement afin d'exalter la puissance de la boîte osseuse d'un despote céleste dont elle refuse obstinément de scruter les infirmités intellectuelles et politiques, tandis que la science tarde à découvrir qu'on s'élève à scruter la boîte osseuse de l'animal qui se regarde dans le miroir de ses dieux. C'est ainsi que, dans la postérité de Descartes, puis de Kant, la philosophie moderne est devenue une anthropologie un peu plus ascensionnelle , donc plus lucide et plus éveillée que celle qu'illustrait la catéchèse craintive et vénératrice des Eglises .

Je vous convie donc, mes chers congénères, à vous réjouir aux côtés de l'homme à la ciguë ; car il appartient à votre génération de regarder l'heure à deux horloges de l'espèce schizoïde, celle de la science et celle du sacré. Quelle est la place que vous occupez sur ce double cadran ? Depuis les origines, les insectes de l'autel et les insectes de la philosophie feignaient de penser d'un commun accord et s'exerçaient à la vaine entreprise d'apporter leur pierre à l'édifice de la sagesse politique de l'humanité. Je vous convie à observer comment les maçons des idoles cachaient les ruses qui leur permettaient de passer muscade sur leurs désaccords avec les maçons du savoir.

Le discours semi rationnel et semi religieux de la France contemporaine est-il la chatte sur un toit brûlant de Tennessee Williams ? Quels sont les alibis , les faux-fuyants, les dérobades, les subterfuges et les mascarades communs à l'Etat et à Rome ? La République et le Saint Siège vont-ils abattre leurs cartes et révéler au monde stupéfié qu'elles ont toujours joué dans une seule et même cour, celle de la politique ? Les deux lévites vont-ils confesser à la planète ahurie que l'habillage théologique de " Dieu " d'un côté et la vêture terrestre des idéalités de la démocratie de l'autre n'ont jamais présenté à l'histoire ébahie que les parures artificielles sous lesquelles le simianthrope semi pensant cache à ses congénères et à lui-même les vrais secrets de la cuisine célestiforme qu'il sert à ses convives ?

3 - La sous-conversation de M. Nicolas Sarkozy avec le Saint-Siège

Gardez-vous bien de rendre grâces à un chef d'Etat suffisamment roué pour faire semblant de tomber le masque et de ficeler la science et la pensée modernes aux chaînes rouillées de la théologie du Moyen-Age. Dans ce cas , voyez comme ils se tirerait une balle dans le pied . Car la Renaissance est née de l'invalidation parallèle de l'Eglise de l'époque et des Etats chrétiens qui s'étaient attachés à son char. M. Nicolas Sarkozy ne va-t-il pas affaiblir en catimini la République à révéler à une planète qui n'en croira pas ses yeux et ses oreilles que Rome et Paris se sont toujours entendus , l'une pour appeler le ciel des anges à la rescousse de sa musculature politique, l'autre pour imposer au ciel les lois de ce monde?

Observez donc plutôt comment la sainte alliance du glaive et de la mitre s'était secrètement fissurée avec la Réforme et comment M. Nicolas Sarkozy tente de la sceller à nouveaux frais; car, se dit l'habile homme, la République a terrassé l'autel, la République a disqualifié les rites et les liturgies sur toute la terre habitée, la République a réduit l'Eglise à réciter ses patenôtres et à égrener son chapelet, la République a contraint l'Eglise à lever au ciel ses bras inutiles, la République assiste en solitaire, désormais au triste spectacle de la folie et de la barbarie du simianthrope : l'heure n'aurait- elle pas sonné pour la France de 1905, se dit le Machiavel du ciel républicain, de tendre la main au vaincu et de lui dire sans afficher trop de superbe, mais en souverain sûr de son sceptre: " Relève-toi, Pierre, et saluons d'un cœur pur la nouvelle alliance de la foi des chrétiens avec la démocratie victorieuse. Tes écoles religieuses sont contraintes d'enseigner la politique et l'histoire à la lecture des manuels scolaires qu'ont rédigé nos savants à nous ; nos professeurs sont seuls autorisés à former tes ouailles jusque dans l'enceinte de ton système éducatif et les épreuves de notre baccalauréat sont exclusivement corrigées à l'école de nos têtes. Qu'attends-tu pour reconnaître ta défaite et pour collaborer plus étroitement avec notre République au lieu de ressusciter tes exorcistes et ta banque des indulgences ? Puisse ce jour de gloire autoriser ton ciel et celui de la France à combler ensemble les plus riches de nos citoyens de présents somptueux et à rendre nos pauvres plus taillables et corvéables à merci que jamais ! Il fut un temps où la République avait pris la relève de tes bénédictions et de ta charité. Mais n'est-il pas temps de mettre fin à la malencontreuse folie de tenter de porter remède à la loi de fer qui régit le monde d'ici bas ? Tu as démontré , par l'expérience de vingt siècles de l'histoire et de la politique de ton Eglise, que les riches sont nés pour s'enrichir et les pauvres pour s'appauvrir. Souviens-toi de l'un de tes saints prédécesseurs, Innocent IV , qui avait étalé ses richesses aux yeux du futur saint Thomas d'Aquin, souviens-toi des pieux gémissements de ce successeur de Saint Pierre, qui ne pouvait, disait-il, égaler la pauvreté du Seigneur. Mais souviens-toi également de la réponse de l'auteur de la Summa contra gentiles: " Et vous ne pouvez dire non plus : Lève-toi et marche. " Eh bien, très Saint Père, mettons fin à vingt siècles de notre différend sur les droits respectifs des riches et des pauvres et marchons d'un pas résolu vers le monde tel qu'il est. Si nous le gérons la main dans la main, nous laisserons à Dieu seul le soin de reconnaître les siens. "

4 - L'inconscient infernal de l'histoire

J'attire l'attention de votre génération sur la nature singulière des relations que la pensée anthropologique moderne entretiendra avec l'Eglise et avec l'Etat quand la théologie sarkozyste de la République aura enraciné la foi chrétienne dans l'économie mondiale de marché. Car une République qui aura renoncé à la guerre confessionnelle contre la pauvreté aura également renoncé à celle qui lui avait fait rompre les ponts de la raison politique mondiale avec la théocratie monarchique. Du coup, la démocratie française rencontrera à la fois des difficultés catéchétiques insurmontables et des difficultés pratiques sans remède; et elle courra le risque de perdre sur les deux tableaux . Car si elle tente de sceller un pacte nouveau avec le sacré d'autrefois, elle se débilitera de se trouver contaminée par des dogmes et des orthodoxies tellement fatigués que personne ne parvient plus à les faire seulement tenir debout quelques instants au cours des cérémonies censées leur rendre les derniers honneurs . Songez également que la science et la philosophie mondiales poursuivront toutes seules leur chemin et qu'elles passeront au large d'un ciel fier, de son côté, de l'inaltérabilité cérébrale qu'il affiche depuis le Concile de Nicée en 325 et, de l'autre, d'une France saisie in extremis par l'ambition d'épauler un Mathusalem ecclésial.

Qu'adviendra-t-il alors des chances de la nouvelle Renaissance ? Elle se réjouira, certes, de se trouver plus solitaire et plus seule en lice qu'au XVIe siècle, puisqu'elle aura brisé davantage que les Erasme et les Budé les entraves de la raison infirme que la France avait affichée au cours de sa longue alliance avec le Saint Siège. Mais, dans le même temps, il appartiendra aux intellectuels du XXIe siècle de refonder la politologie sur une connaissance anthropologique de l'alliance des autels avec les sacres du meurtre et du sang qui ont écrit l'histoire du monde depuis que l'encéphale du simianthrope s'est scindé entre le ciel et la terre. Si vous n'avez pas d'anthropologie en mesure de spectrographier le pacte du séraphisme cultuel avec l'égorgement payant d'une victime offerte à une idole, votre révolution ne sera pas d'une profondeur et d'une violence auprès desquelles celle de 1789 paraîtra une convulsion locale des Gaulois ; car votre combat d'humanistes plus avertis que vos ancêtres des ressorts politiques de la théologie de l'assassinat d'un prophète sur les propitiatoires de la sainteté du monde et de l'Eglise ne sera pas un arbitrage benoît et de tout repos entre une République des prières relativement désensanglantées de la démocratie et les liturgies d'une Eglise que Jean-Paul II et Benoît XVI ont pieusement réarmée de l'arsenal des indulgences du Moyen-Age, afin de permettre aux fidèles d'acheter aux guichets de la foi un raccourcissement bienvenu de leurs tortures posthumes.

5 - L'anthropologie des théologies

Ne vous laissez pas tromper par la façade fleurie des théologies. Comme tous les Etats, elles se divisent entre leurs geôles et leurs auréoles, comme tous les Etats, elles répandent les effluves de leurs brûle-parfums et attisent la flamme sous leurs marmites infernales. Mais vous remarquerez qu'aucun commentaire théologique ou philosophique du pieux discours que M. Nicolas Sarkozy a prononcé en l'église Saint Jean de Latran n'a seulement abordé le vrai sujet, à savoir l'examen du contenu psychobiologique et politique des trois monothéismes . Chacun s'est contenté de comparer le séraphisme qui imprègne les valeurs laïques avec l'angélisme qui imprègne les vertus catéchisées par une orthodoxie, tout le monde s'est seulement rangé dans un camp ou dans l'autre. Mais une Eglise, c'est un corps de doctrine, un traité des dogmes et des prodiges, un précis des félicités et des tortures qui attendent un simianthrope tour à tour sanctifié et damné pour l'éternité ; et un Etat , ce n'est pas un édénisme politique, mais une auréole et un code pénal, une nuée d'angelots voletant autour du trône de la liberté et une police musclée, un autel des valeurs d'où monte l'odeur des sacrifices du prince à une politique du chiffre .

Mais votre époque ignore le contenu concret des credos et les variations de leur température au cours des siècles . Une science historique et politique qui n'a jamais ouvert le sarcophage d'une théologie et qui demeure incapable de décrypter des documents anthropologiques aussi focaux qu'une armature du ciel jamais les sciences humaines qu'attend la postérité temporelle de Darwin . Si vous ne lisez les deux mille huit cent soixante trois propositions practico-mythologiques du Catéchisme officiel que l'Eglise catholique a publié au début du second millénaire et qui donnent leur assise politique aux trois monothéismes, comment connaîtriez-vous davantage la mythologie chrétienne que la cosmologie d'Isis et d'Osiris ?

6 - Le nouveau Graal de l'univers

Vous aurez donc à traiter de l'inconscient nauséabond de l'histoire que les idoles mettent pieusement à l'école de leur encens et enveloppent des senteurs de leur foi. L'étude anthropologique du camp de concentration malodorant que la sainte Eglise met en scène sous la terre rendra la révolution intellectuelle qui vous attend plus odoriférante que celle de 1789 ; car le ciel parfumé que vous aurez autopsié à l'échelle de la planète aura réduit l'Europe sublimée par la démocratie américaine à une servitude armée des ailes de séraphins d'une occupation militaire soutenue par les armées des dévots de la liberté. Apprenez donc à vous rendre olfactifs au lieu de vous boucher le nez et les oreilles ; car le salut de l'Europe que la Constitution de Lisbonne a fondé sur l'assujettissement perpétuel du Vieux Continent au sceptre d'un empire étranger aura dûment institutionnalisé une vassalité dont la détection demandera un affinement de votre organe nasal . Quand vous aurez visité les souterrains de la théologie franco-ecclésiale et exploré les chemins secrets de la sainteté politique qui conduisent les deux sceptres à se rejoindre sous le drapeau américain de l'OTAN, vos yeux s'ouvriront sur l'enjeu géopolitique du discours apostolique du 20 décembre 2007 qui a fait du Président de la République le missionnaire du nouvel édit de Nantes, celui qui fera de la finance internationale le nouveau Graal de l'univers. Alors votre regard portera sur une France devenue pieusement obéissante à la fois sous l'oriflamme des bénédictions démocratico-pontificales et sous le joug de son maître d'outre-Atlantique.

7 - La géopolitique du Saint Esprit

Pourquoi le Vatican et Paris gardent-ils un silence complice sur soixante ans d'une théologie de l'occupation dévote de l'Europe par les saintes garnisons du Nouveau Monde ? Parce que toute la politique de M. Nicolas Sarkozy vise à faire consommer l'hostie de l' OTAN à la France . Pour obtenir cet agenouillement, il a créé une Commission composée de néocons français et de quelques modérés à ranger parmi les marionnettes ; mais la politique de la prosternation devant le sceptre de la guerre contre l'Iran a subi un revers retentissant avec le schisme de tous les services secrets américains, qui se sont unanimement coalisés pour la circonstance contre le locataire de la Maison Blanche .

XIV - L'Institut international de simianthropologie - Esquisse d'une légitimation de cette science, 7 janvier 2008

Face à cette hérésie inattendue des justes de l'empire américain, il ne reste plus à l'orthodoxie de M. Nicolas Sarkozy que la carte du " projet méditerranéen " , dont l'ambition est d'élever le pape au rang de coadjuteur de la flotte de guerre de Washington en Méditerranée et de caution catholique du gigantesque porte-avion américain qu'on appelle encore quelquefois l'Italie. On sait que le pont de ce seul bâtiment suffit à porter cent trente sept bases militaires américaines dont les lointains descendants de Cincinnatus sont devenus les valets ; et puisque le port de Naples demeurera la forteresse inexpugnable de la marine de guerre du Nouveau Monde en Europe, on comprend que la fille aînée de l'Eglise rende un fier service au souverain de Washington à jeter Saint Pierre dans l'escarcelle de l'empire ; mais comme ce pape porte en outre dans sa hotte l'Allemagne catholique de l'ouest , quelle puissante tête de pont américaine en Europe qu'une France et une Allemagne unies autour d'une même messe !

Telle est la raison profonde, me glissent deux cardinaux à l'oreille, M. de Mazarin et M. de Richelieu, la raison profonde, dis-je, pour laquelle le seul thème politique que M. Nicolas Sarkozy ait abordé avec le Saint Siège est celui du " projet européen " de la France . Par bonheur, la Russie n'est pas dupe : comment ne verrait-elle pas clair comme le jour que la poursuite de la politique de vassalisation de l'Europe qui inspire le Président de la République française n'est autre que l'aile Sud d'un rééquilibrage destiné à se substituer définitivement à l'alliance entre Moscou, Berlin et Paris qui aurait donné à l'Europe son élan vers l'Inde et la Chine et constitué l'Occident en un pôle de la puissance mondiale en mesure de contrebalancer celle de l'empire américain.

8 - La sous-conversation de Moscou avec l'Europe vassalisée

Aussi la Russie a-t-elle envoyé une partie impressionnante de sa flotte de guerre parader en Méditerranée afin de rappeler à l'Europe asservie qu'elle est décidée à combattre l'expansion de l'OTAN du Maroc à l'Egypte et à Israël . Le contenu symbolique de cette expédition a été soigneusement caché à l'opinion publique européenne : il s'agissait de rééditer la démonstration de force de la " Grande Flotte blanche " américaine qui , en 1907 , avait réalisé l'exploit de faire le tour du monde à la barbe de toutes les puissances . Après avoir contourné l'Amérique du Sud , l'armada avait traversé le Pacifique en direction de l'Australie, était remontée jusqu'au Japon, pour franchir l'Océan Indien et pénétrer en Méditerranée par le canal de Suez avant de rentrer en Amérique par l'Atlantique Nord après un périple de quinze mois. Cette flotte était entièrement peinte en blanc, afin de signifier que le futur empire démocratique du monde serait immaculé. La flotte russe a donc battu pavillon haut tout au long des côtes de l'Europe avant de pénétrer en Méditerranée par le détroit de Gibraltar ; et les portes d'Hercule ont salué sa grandeur.

Tels sont les couloirs secrets qui relient la théologie de la nouvelle démocratie française à l'école américaine d'apprentissage de la servitude politique de l'Europe ; tels sont les souterrains qui conduisent les civilisations domestiquées dans les caves du Vatican. Mais cette domestication ne vous deviendra intelligible que si vous vous initiez aux secrets anthropologiques de la débâcle de la raison laïque d'une France qui n'a pas su féconder la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat .

Je vous convie donc à prendre conscience de la navigation de la flotte pantagruéline, celle d'une raison qui évitera les pièges dans lesquels la démocratie acéphale de M. Nicolas Sarkozy voudrait faire tomber la France.

9 - L'avenir de la guerre de la raison

La nouvelle catéchèse de la France ex-républicaine tentera de métamorphoser à vos yeux d'enfants les dogmes religieux en l'expression inoffensive d'une culture démocratique auréolée par le sacré. Comment ce prodige va-t-il s'opérer ?

L'immolation des exigences de rigueur de la science et de la pensée occidentales sur l'autel d'une sorte de théologie confuse de la Liberté universelle se trouvera consommée par le sacrifice de la logique philosophique sur l'offertoire lénifiant de toutes les orthodoxies. Celles-ci auront été subrepticement auto-sacralisées par le détour d'un panculturalisme acéphale à seule fin qu'il vous soit vigoureusement et à jamais interdit de peser des dogmes bénisseurs sur la balance d'une réflexion anthropologique de nature à vous éclairer sur le meurtre " sauveur " dont la démocratie et la foi se trouvent toutes deux habitées. Vous devrez ignorer que le sacré est scindé entre le sanglant et le séraphique par le politique qui l'inspire en secret . Alors seulement, il sera à portée de main de la République de M. Sarkozy de légitimer le divin à un tout autre titre que le sien - à celui de la sainte innocence qu'affichera l'éthique littéraire, picturale , musicale ou poétique des démocraties " tolérantes " à l'égard du religieux. A ce compte, Zeus sera proclamé siéger réellement sur l'Olympe pour le saint motif que la littérature grecque a fourni des témoignages incontestables de la vitalité culturelle de cet Immortel.

A partir d'un postulat aussi dangereux , comment le passage de la théologie grecque à celle du christianisme ferait-il difficulté ? Le pain et le vin de la messe seront censés se changer effectivement en la chair et le sang jetés à dévorer sur l'offertoire du Golgotha par l'assassinat réputé réel à son tour de Jésus-Christ sur l'autel de la foi, puisque la victime réputée trucidée en chair et en os par le glaive des paroles de la consécration - celles que le prêtre prononce dévotement face au propitiatoire - s'offrira à une idole non moins avide que les précédentes de boire l'hémoglobine de l'humanité et de manger cette viande. Comprenez-vous maintenant pourquoi la République française et l'Eglise interdiront d'un commun accord de décrypter une théologie et une démocratie aussi trompeusement séraphiques l'une que l'autre ? Mais aux yeux d'une raison française que vous remettrez en marche, les doctrines religieuses d'origine anthropophagique présenteront un intérêt sans égal , puisque leurs auréoles et leurs geôles éclaireront les arcanes de l'alliance bi-millénaire de l'histoire avec le sang des sacrifices. Alors vous connaîtrez les secrets des offrandes - les hosties - que les sociétés offrent à l'idole qu'elles sont devenues à elles-mêmes ; et vous serez initiés au meurtre à la fois réel et symbolique réputé les " sauver ".

C'est dire que si vous ne vous armez pas d'une anthropologie capable de pénétrer dans les souterrains politiques et psychobiologiques de l'immolation d'un homme ou d'un animal vivants à un grand sacrificateur installé en maître dans le cosmos, la civilisation occidentale n'acquerra jamais la connaissance de l'enracinement du genre simiohumain dans un meurtre religieux tenu pour le moteur politique des nations. Alors le mâle - l'Etat moderne - et l'Eglise, qui est femme, persévèreront, comme au Moyen-Age, à se voiler la face ensemble ; et vous ignorerez la nature et le sens de l'exécution dite " salvatrice " et "libératrice " perpétrée sur l'autel d'Adam , alors que le sacre du divin se récolte sur les champs de bataille ; car la guerre met en scène, elle aussi, un meurtre sanctifié par une collectivité conviée à boire son propre sang dûment métamorphosé en nectar du ciel. Les théologies sont nées de l'expérience des combats et elles en reproduisent le modèle à l'école des alchimies de l'autel.

Mais qu'adviendrait-il de la spectrographie des deux champs d'honneur du simianthrope - le ciel et la patrie - si cette espèce ouvrait un jour les yeux sur les tributs de chair et de sang qu'elle présente sans relâche à l'idole chargée de reproduire sa propre effigie politique dans le ciel ? " Aucun Français, dira M. Nicolas Sarkozy , n'est resté indifférent au mystère de la conversion du Cardinal Lustiger ". Mais justement, Monsieur le Chanoine honoraire, aucun progrès réel de la connaissance scientifique des portraits de lui-même que le simianthrope colloque dans ses empyrées ne sera possible si ce " mystère " n'est pas éclairci à une tout autre école du savoir qu'à celle des ostensoirs du langage angélique que la République et le Saint Siège balancent pieusement sous les yeux de l'humanité.

10 - Suite de l'itinéraire de la raison française

Vous avez compris à quel personnage la victime est offerte sur l'offertoire à propre histoire d'Adam et Eve - celle que l'évolution du cerveau du chimpanzé a rendue à la fois séraphique et sanglante. Aussi tout progrès de la connaissance anthropologique des auto-bénédictions à la fois ailées et meurtrières qui permettent à l'encéphale simiohumain de sanctifier les tributs qu'il s'offre à lui-même dans les nues et sur la terre passera-t-il par une politologie capable d'accéder à la radiographie des idoles mi tueuses, mi bénédictionnelles. Pourquoi les fuyards de la nuit animale acquittent-ils une rançon inépuisable aux créanciers qu'ils installent dans les nues et auxquels ils mettent un couteau entre les dents? Parce que les tueurs magnifiés qu'ils colloquent dans le ciel les symbolisent en retour et les représentent sur la terre avec la plus sûre éloquence .

On châtrera donc la laïcité de tout contenu scientifique et philosophique réels, alors que la philosophie est née de la migration de la Grèce myope - celle d'une monarchie sacralisée par la terre - à une démocratie spatialisée par la mer et capable de se distancier des dieux . Mais voyez comme la République de M. Nicolas Sarkozy expulsera de l'arène de la démocratie française toute réflexion sur le sacré : quand il ne s'agira plus de distinguer clairement le vrai du faux, mais seulement d'acheter des "convictions " à la carte, comme on choisit chez le pâtissier des friandises qui flattent le palais, la théologie doctrinale de l'Eglise feindra de courber le dos un instant, parce qu'elle aura momentanément le plus grand intérêt à marcher du même pas que la République et à passer à ses côtés pour une forme parmi d'autres de l'universalité indistincte de la culture, plutôt que d'afficher le terrible credo du meurtre de l'autel qui la branche sur l'histoire réelle du simianthrope .

Mais tout s'enchaîne sur le chemin de la logique interne des sacrifices " rédempteurs ": la civilisation mondiale se trouvera plongée dans un chaos cérébral sans remède quand des propositions en contradiction entre elles se changeront en tests de la "vérité démocratique " et des " valeurs républicaines ". " C'est pourquoi , dira M. Nicolas Sarkozy, nous devons tenir ensemble les deux bouts de la chaîne : assumer les racines chrétiennes de la France, et même les valoriser, tout en défendant la laïcité enfin parvenue à maturité. Voilà le sens de la démarche que j'ai voulu accomplir ce soir à Saint-Jean de Latran." Tel sera également le nouveau laboratoire du sacré : dès lors qu'on déclarera vrai ce qui aura été jugé tel au banc d'essai de l'ex-France de la pensée cartésienne, on se verra conduit à l'extinction pieuse des prérogatives de feu la raison scientifique, tellement il s'agira seulement de valoriser les profits politiques que l'Etat et l'Eglise retireront d'un commun accord d'une sanctification à la fois niaise et retorse des valeurs de la démocratie.

Ecoutez le chant de triomphe de la pensée mythologique: " Aujourd'hui encore, la République maintient les congrégations sous une forme de tutelle, en refusant de reconnaître un caractère cultuel à l'action caritative, en répugnant à reconnaître la valeur des diplômes délivrés dans les établissements d'enseignement supérieur catholique, en n'accordant aucune valeur aux diplômes de théologie, considérant qu'elle ne doit pas s'intéresser à la formation des ministres du culte. " Mais ouvrirez-vous toute grande la porte de la folie qui substituera l'intérêt politique des Etats aux intérêts supérieurs de la méthode scientifique ? "Un homme qui croit, c'est un homme qui espère. Et l'intérêt de la République, c'est qu'il y ait beaucoup d'hommes et de femmes qui espèrent. La désaffection progressive des paroisses rurales, le désert spirituel des banlieues, la disparition des patronages, la pénurie de prêtres, n'ont pas rendu les Français plus heureux. C'est une évidence." Et si "l'intérêt de la République ", comme nous dit le chanoine honoraire de Saint Jean de Latran, était d'apprendre à penser dès les bancs de l'école?

11 - Suite de l'itinéraire de la raison française

Voyez maintenant comment les vocabulaires respectifs de la foi et de la pensée vont se confondre et s'entre-mêler dans un chaos cérébral définitif. Ainsi , le terme de vocation, qui renvoie au latin appeler , et qui ressortit au discours mystique par définition, se confondra avec la vocation politique dûment mythifiée de M. Nicolas Sarkozy en personne . "Sachez que nous avons au moins une chose en commun : c'est la vocation. On n'est pas prêtre à moitié, on l'est dans toutes les dimensions de sa vie. Croyez bien qu'on n'est pas non plus président de la République à moitié. Je comprends que vous vous soyez sentis appelés par une force irrépressible qui venait de l'intérieur, parce que moi-même je ne me suis jamais assis pour me demander si j'allais faire ce que j'ai fait, je l'ai fait. Je comprends les sacrifices que vous faites pour répondre à votre vocation, parce que moi-même je sais ceux que j'ai faits pour réaliser la mienne. "

Mais quand les mots changent de sens , de portée, de couleur et de calibre sous le feu nourri d'une Eglise et d'une République de l'inculture, l'Occident sera renvoyé à une philosophie et à une histoire de la morale antérieures aux conquêtes scientifiques du XVIe siècle, lorsque la civilisation occidentale croyait encore à la canonnade d'un Bien et d'un Mal réputés universels et définis à jamais par la métaphysique théologique chrétienne. " Dans la transmission des valeurs et dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur, même s'il est important qu'il s'en approche, parce qu'il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d'un engagement porté par l'espérance. "

Cette ultime régression de la raison et de la pensée mondiales sera dévastatrice, parce que la civilisation européenne sait, , depuis Christophe Colomb, que les préceptes de la morale publique et privée varient avec les siècles, les climats et les lieux , mais que la science et la pensée ne sauraient, pour autant, se passer d'une hiérarchisation sévère et réfléchie des valeurs qui ont fait d'une éthique le baromètre de toutes les grandes civilisations. Si la République vous dit que toutes les cultures seront désormais tenues pour égales entre elles du seul fait de leur existence à telle époque et sur tel lopin du globe terrestre, approuverez-vous la culture des pitanjaras, chez lesquels la mère tue et mange un nouveau né sur deux, parce qu'elle a été convaincue par les sorciers de l'endroit que le suivant en sera rendu deux fois plus fort ? Approuverez-vous la culture des Trobriandais, chez lesquels le mâle n'est intronisé parmi ses pairs qu'après avoir tué un congénère ?

Mais si les sauvages et les civilisés cessaient de passer pour confusibles sous le goupillon du panculturalisme d'aujourd'hui, la souveraineté absolue des cultures s'effondrerait ; car les civilisations sanctifiées par leur pseudo égalité entre elles interdisent d' offenser la dignité du genre humain et d'insulter l'universalité des " droits de l'homme " par l'hérésie de distinguer la raison de la sottise. Vous placerez donc la musique de Mozart aux côtés de celle des Papous, des Hottentots ou des Pygmées. Voyez, à ces exemples, à quel point l'apologie irraisonnée des cultures protège ensemble la République et l'Eglise du sacrilège de percer le secret des autels : comment la raison scientifique occidentale revendiquerait-elle non seulement le droit de distinguer le vrai du faux, mais l'hégémonie cérébrale de Socrate sur la religion de la potence puisque les trois idoles dites uniques sont armées d'un camp de concentration souterrain dont il est interdit, au siècle de la psychanalyse, d'ignorer l'éloquence. Comme je l'ai rappelé plus haut, l'autel du Golgotha est un offertoire qui demande qu'on y dépose de la chair et du sang. Comment la philosophie de la culture de M. Nicolas Sarkozy ne nous reconduirait-elle pas tout droit à l'ignorance et à la barbarie communes à tous les sorciers? Du coup, l'espérance politique du monde se trouvera à nouveau validée de se nourrir des fantasmes d'une magie religieuse avide de chair fraîche ; car, dit M. Nicolas Sarkozy, " la situation géographique de la Méditerranée , comme son passé, conduisent naturellement cette région du monde à l'union ; mais les religions et les traditions culturelles s'y exacerbent souvent ".

12 - Suite de l'itinéraire de la raison française

Voilà qui fait désordre : comment la raison française va-t-elle expliquer que les religions conduisent à la fois " naturellement" à l'union et "naturellement" à leur exacerbation ? Quelles sont les raisons viscérales pour lesquelles les "religions et les traditions culturelles" entrent nécessairement en conflit et qu'est-ce que la "passion religieuse " dès lors que nulle autre n'est plus sanglante que celle-là? Que signifiera le " choc des civilisations " si les mythes sacrés seront tout subitement qualifiés de fantasmes collectifs quand ils auront chu dans le tragique et de vérités révélées quand elles se tiendront tranquilles un instant? Mais comment leur demanderez-vous de se montrer respectueuses des hérésies d'en face, alors qu'elles sont condamnées à les juger suicidaires, et comment se partageraient-elles gentiment leur folie si les " convictions profondes " ne sauraient reposer indifféremment sur des raisonnements solides et sur des billevesées ? Décidément le Président de la République française a pris autant de retard sur l'anthropologie de son siècle que l'Eglise du XVIe siècle sur l'astronomie de Copernic : il ignore tout des relations que la schizoïdie religieuse du simianthrope entretient avec l'histoire du monde !

Mais si vous prenez acte de ce que jamais aucun Etat ne deviendra réellement pensant, au sens abyssal où penser, c'est peser la boîte osseuse du simianthrope sur une balance sans cesse à construire et si vous prenez acte, de surcroît, de ce que la politique du monde se révèlera toujours et nécessairement aussi viscéralement rebelle à la connaissance rationnelle de l'encéphale dichotomique des fuyards de la zoologie que les Eglises, pendant combien de temps les guerriers de la raison de la France profiteront-ils de la chute parallèle de Rome et de Paris dans les ténèbres d'un second Moyen-Age ? Pendant combien de temps courront-ils sans entraves vers un royaume de la connaissance ouvert, le temps d'un clignement de paupières, à la réflexion sur la véritable postérité de Darwin , alors qu'une République alliée à la foi partagera à nouveaux frais avec l'Eglise romaine le besoin incoercible de brider, puis d'interdire résolument tout progrès de la connaissance rationnelle ? Car, aux yeux de tout Etat comme de toute Eglise, l'essentiel est seulement de trouver un " sens à la vie ", quel qu'en soit le prix intellectuel . M. Sarkozy se veut le pasteur de la France de demain; mais sa catéchèse de la décapitation de la République montre déjà le bout de l'oreille . La censure n'est pas loin quand on écrit : " La République a intérêt à ce qu'il existe aussi une réflexion morale inspirée de convictions religieuses. D'abord parce que la morale laïque risque toujours de s'épuiser quand elle n'est pas adossée à une espérance qui comble l'aspiration à l'infini. Ensuite et surtout parce qu'une morale dépourvue de liens avec la transcendance est davantage exposée aux contingences historiques et finalement à la facilité. "

Qu'est-ce que la " facilité " aux yeux d'un obscurantisme d'Etat fièrement démocratique et français? Comment éviterez-vous la pire des facilités au sein de la République , celle de renoncer à penser sérieusement , si vous n'osez commettre le sacrilège de passer une " espérance " frelatée au scanner du "Connais-toi" de demain? Comment éviterez-vous de comparaître devant le tribunal d'une laïcité superficielle, mais que l'Etat aura déclarée " positive ", au sens américain de " positiver ", parce qu'elle se voudra fièrement branchée sur une " liberté de penser " tellement souffreteuse qu'elle se réduira à la liberté indifférenciée de " croire et de ne pas croire " ? L'essentiel d'une civilisation de la platitude sera de " reprendre le dialogue avec les grandes religions de la France ".

Quel dialogue ? Qu'est-ce que dialoguer avec la foi dans une civilisation qui n'a pas encore conquis les armes d'un dialogue pensant avec les religions ? M. Nicolas Sarkozy le dit : " Ce sera d'avoir pour principe de faciliter la vie quotidienne des grands courants spirituels plutôt que de chercher à la leur compliquer ".

Voilà le pain de la médiocrité intellectuelle : le quotidien, devenu le maître, déclare qu'il serait décidément bien fâcheux qu'il fût compliqué de penser vraiment. Etes-vous équipés pour marcher vers la potence d'un pas ferme ? La croix vous tend-elle ses bras ? Sait-elle que la raison doit s'y trouver clouée ?

Je vous souhaite un destin de crucifiés sur la croix de la raison ressuscitée de la France .

Le14 janvier 2008