Le 6 décembre 2017, Donald Trump, président des Etats-Unis,
a tout soudainement déclaré que Jérusalem était la capitale
d'Israël dans l'éternité et qu'il convenait d'installer
son ambassade dans la ville-phare de la planète de l'esprit.
Cent quarante-huit Etats, dont tous les Européens -
la Tchéquie exceptée - se sont aussitôt inscrits en
faux contre une allégation théologique, donc mythologique
par nature et par définition, qui ignorait l'existence
d'un milliard et demi de musulmans sur les lieux. Mais
rien n'y a fait, le Vatican a eu beau avoir aussitôt
proclamé hérétique un Israël calibré de cette façon
par un président américain tombé de la dernière pluie,
tout se passe comme si le pilotage cérébral d'une espèce
viscéralement onirique ne s'en trouvait nullement perturbé.
Il est devenu évident que l'animal d'origine forestière
qu'on appelle l'homme et longtemps condamné à sauter
d'une branche à l'autre, se trouve désormais soumis
aux hurlements et aux tonitruements de trois divinités
principales censées brandir un sceptre unique au-dessus
de sa tête. Mais sitôt que l'un de nos trois démiurges
mythiques empiète quelque peu sur l'empire de l'un des
deux autres, nos trois Ouranos se massacrent et s'égorgent
entre eux au nom de leurs rêves respectifs.
L'heure
a donc sonné de saisir le taureau par les cornes. Si
nous ne prenons pas vaillamment acte de ce que les trois
dieux sous le sceptre imaginaire dont nous les affublons,
n'existent que dans nos pauvres têtes, jamais nous ne
nous trouverons avec deux pieds dans la glaise et un
embryon de cervelle nichée dans notre boîte osseuse.
Devenons donc des anthropologues suffisamment éduqués
pour savoir que, pour l'heure, nous n'en avons rencontré
que quatre qui soient dignes d'élever cette discipline
au rang d'une science réelle - Swift, Shakespeare, Cervantès
et Kafka. Mais en réalité, ces quatre visionnaires du
genre dont l'animalité spécifique est celle de l'espèce
que nous appelons humaine, s'inscrivent dans le sillage
de Shakespeare qui seul ose dire que nous écrivons une
"histoire pleine de bruit et de fureur racontée par
un idiot". Swift, Cervantès, Shakespeare et Kafka
enseignent un regard de l'extérieur sur l'animal qui
se nourrit de songes délirants, c'est-à-dire que la
substance même de son délire doit être qualifiée d'onirique.
Et c'est précisément parce que nous nous trouvons davantage
menacés par les armes que nous avons placées dans nos
seules mains que par les enfers terrifiants des premiers
âges, qu'il nous faudrait doter nos trois dieux uniques
d'une cervelle véritable.
La vraie guerre de la France a toujours été celle de
la raison du monde. Dès le Moyen-Age, la théologie française
s'est voulue la plus intelligente de l'époque, celle
qui faisait "monter le pain de la foi dans le four
de la pensée". Puis, c'est grâce à la France que
la Renaissance eut un siècle de résurrection de l'esprit
logique. Le Siècle des Molière et des La Fontaine s'est
donc inscrit dans l'histoire de la pensée mondiale.
Puis, avec le XVIIIe les encyclopédistes ont pris en
main la première mondialisation d'une civilisation par
la philosophie. Le XXIe siècle verra la France tenter
de s'emparer du sceptre d'une pensée universelle face
au surgissement de la nouvelle divinité - le veau d'or.
On a entendu les inspirateurs du dieu- dollar déclencher
officiellement le 16 août 2018 une guerre financière
totale ontre la Russie: on attaquerait de front la bourse
de Moscou, donc sa monnaie, le rouble. Du coup, à la
surprise générale, le pape de la finance internationale,
Jacob Rothschild, représentant des Rothschild
de la City, décrivait, dans une lettre du 30juin
2018 adressée à ses principaux investisseurs,
les conséquences politiques de cette décision. Il écrivait
que "la probabilité de guerres commerciales
a augmenté" et que "les problèmes risquent
de se poursuivre sur les marchés émergents"
- ce qui signifiait que d'autres Etats seront également
victimes de la nouvelle forme de la guerre menée par
le dieu-dollar et par l'empire américain contre des
Etats souverains: une guerre financière sournoise destinée
à affaiblir, puis à ruiner les concurrents
par l'utilisation d'un privilège financier exorbitant
de la monnaie de l'empire américain. C'est ainsi
que les Etats-unis gèlent les avoirs des organismes
économique qui ont eu l'imprudence de commercer
avec des pays placés sous embargo par le dieu-dollar.
Sinon, ils soumettent les entreprises à un rackett
financier monstrueux, comme les banques européennes,
et notamment la BNP française, en ont fait la
douloureuse expérience.
C'est
donc à juste titre que Jacob Rothschild demeure
"préoccupé par les problèmes géopolitiques, y compris
le Brexit, la Corée du Nord et le Moyen-Orient",
car près de la moitié de la planète
est soumise à l'arbitraire spoliateur de l'empire.
La résistance est en train de s'organiser et
un retour du boomerang est prévisible.
La forme de la guerre que mène de nos jours l'empire
américain sous le drapeau du dieu-dollar, viole ouvertement
les trois traités de Westphalie de 1648 qui demeurent
à l'origine du droit international actuel. Négociés
par Mazarin, ces traités d'une grande modernité juridique
établissent que tout Etat, petit ou grand jouit du même
statut en droit sur la scène internationale et bénéficie
d'une souveraineté inattaquable à l'intérieur de ses
frontières. En conséquence, il est interdit à un Etat
d'en combattre un autre à l'intérieur de ses frontières
par quelque moyen que ce soit, de s'ingérer dans ses
affaires et de violer sa souveraineté. A l'instar des
trois dieux uniques, le dieu-dollar, prédateur et destructeur
de l'équilibre mondial, cherche à conserver son pouvoir
par la terreur et la guerre économique.
Autre exemple: depuis la découverte en 1543, sur le
lit de mort de Copernic, du texte imprimé de son ouvrage
De Revolutionibus, nous avions un peu
commencé de prendre l'habitude de moins nous étonner
du spectacle d'une poignée de quelques cerveaux informés
face à une masse immense de centaines de millions d'ignorants.
Mais nous allons bientôt retrouver le théâtre d'autrefois:
au début du XVIIe siècle, la nature éprouvait encore
des sentiments. Elle éprouvait notamment une "horreur
du vide" qui la contraignait à remplir les creux
qui lui tendaient leur béance.
C'est ainsi qu'au niveau de la mer, l'eau s'élevait
à neuf mètres environ au dessus du niveau du rivage.
On ne savait pas encore pourquoi cette hauteur diminuait
au fur et à mesure que la pression de l'air diminuait.
Seuls quelques cerveaux supérieurs, dont ceux de Torricelli
et de Pascal, évoquaient une logique des forces et du
poids de la masse d'air dont s'enveloppe le globe terrestre.
Trois
siècles plus tard, en 2018, pas un seul ministère de
la culture n'ose soulever, face aux masses soi-disant
laïcisées, la question du poids moyen du cerveau de
notre espèce et l'on voit des milliards de masses osseuses
se donner une puissance aspirante variable au gré de
l'altitude à laquelle elles se colloquent de leur propre
autorité.
Et
pourtant, à l'heure où l'humanité n'a des chances de
devenir pensante que si elle pousse son audace jusqu'à
peser sa propre matière grise, la question de la découverte
des moyens d'une telle pesée se situe au cœur de l'histoire
et de la politique réelle des descendants d'un certain
quadrume des forêts. Mais la question socratique de
se demander "qui es-tu?" s'est compliquée de
la manière que l'on sait puisque nous avons été spoliés
à jamais d'une connaissance rationnelle de l'espace
et du temps.
Car
la question politique et philosophique qui nous est
désormais posée est celle de savoir quel est l'avenir
de l'idée de "civilisation mondiale". Or, cette
interrogation se pose dans la postérité tumultueuse,
mais multiple, féconde et vivante de l'avenir de Darwin
et de Freud, mais également de Nietzsche et de Schopenhauer.
Or, cette recherche-là ne saurait appartenir à la classe
administrative et bureaucratique, mais exclusivement
aux individus isolés capables de se la poser. Ce n'est
pas au pouvoir bureaucratique des Etats, comme se l'imagine
Mme Nyssen, qu'il appartient de s'interroger sur l'avenir
de notre boîte osseuse et de s'ériger en "ministère
de la vérité" par l'établissement d'une censure
étatique officielle sur internet.
Le
28 août 2018