Regard panoramique sur une mer monétaire
sereine
Personne
n'ignore que dans les échanges entre Etats, la monnaie est le fléau
de la balance qui permet d'assurer l'équilibre entre ce qu'on vend et
ce qu'on achète . Les deux plateaux de la balance représentent
donc des richesses réelles et reposent sur des
productions concrètes.
Mais pour que ce " juge de paix " soit convaincant, il a fallu trouver
un intermédiaire aussi "impartial " et " fiable " que possible.
Un
métal précieux et inaltérable - l'or - s'imposa tacitement durant des
décennies afin de remplir ce rôle.
Cette première mondialisation financière qui dura une centaine
d'années et prit fin avec la guerre de 1914, peut être appelée l'ère
de l'étalon-or. Durant cette période les pièces de métal
précieux - or et argent - furent progressivement remplacées
par une monnaie fiduciaire . Cependant, la quantité de
métal précieux se révéla rapidement insuffisante
et les banques centrales furent autorisées à émettre,
en papier-monnaie , environ 10 fois le montant de leurs réserves
en or.
Mais
un prix fixe de l'once d'or garantissait la stabilité de chaque
monnaie par rapport à cet étalon.
Ce système
n'était le fruit ni d'une " conférence ", ni d'un " accord international"
laborieusement négocié. Il résultait de la sagesse d'expériences
séculaires qui s'étaient progressivement établies depuis qu'il existait
des échanges internationaux et il fut tacitement accepté par le monde
économico-financier pendant un siècle . Sa stabilité permit le spectaculaire
développement industriel du XIXe siècle sur tous les continents .
Première escale: La guerre de 1914-1918 et le premier cataclysme
monétaire
La première guerre mondiale fit exploser ce bel équilibre monétaire.
Elle fut financée par des emprunts émis par les belligérants des deux
camps - donc aussi bien par les alliés du Reich que par ceux de la France
et des Anglo-Saxons. Elle consacra un dérapage de la discipline monétaire
qui n'a fait que s'accentuer depuis lors.
L'effort
de guerre financé par du papier monnaie non gagé sur les réserves en
or fut le premier grand cataclysme monétaire. Il eut deux conséquences
immédiates calamiteuses : la première fut une dévaluation spectaculaire
des monnaies et la seconde celle de permettre à la guerre de se traîner
durant quatre interminables années et de saigner l'Europe à blanc par
les millions de morts qu'elle provoqua. Elle entraîna un affaiblissement
démographique et économique irréparables dont l'Europe ne s'est jamais
relevée.
En effet, les guerres du XIXe siècle ne pouvaient durer plus longtemps
que ne le permettait le financement réel - c'est-à-dire en monnaie couverte
par l'équivalent or - des dépenses militaires. C'est pourquoi, elles
s'arrêtaient en général au bout de quelques semaines ou de quelques
mois.
Cette catastrophe politique eut, entre autres conséquences politiques
néfastes, celle de permettre à une nation excentrée et provinciale ,
appelée les Etats-Unis d'Amérique, de prendre pied en Europe alors que
son expansion et son hubris impériales s'étaient jusqu'alors cantonnées
à son immédiat environnement.
L'empire
étatsunien pointait le bout de son nez
2ème
escale : L'entrée en scène discrète du dollar sur la scène
mondiale.
Pendant
que l'Europe préparait la guerre qui allait la ruiner , elle
omit de prêter attention à un événement monétaire
qui allait avoir des conséquences gigantesques pour l'économie
de la planète : la création le 23 décembre 1913
d'une banque centrale privée constituée par un
cartel de banques d'affaires dirigées par les groupes financiers
Rothschild , Rockefeller.
Actuellement,
les propriétaires de la FED (Federal Reserve Bank) sont :
Rothschild
Banks of London and Berlin
Lazard Brothers Bank of Paris
Israel Moses Sieff Banks of Italy
Warburg Bank of Hamburg and Amsterdam
Lehman Brothers Bank of New York
Kuhn Loeb Bank of New York
Chase Manhattan Bank of New York
Goldman Sachs Bank of New York
Je
reviendrai sur les circonstances de la naissance de cette institution
dont presque tout le monde s'imagine qu'il s'agit de la banque centrale
des Etats-Unis et donc de la propriété collective, publique
et inaliénable du peuple américain. Il n'en est rien .
Je démontrerai les ruses par lesquelles les financiers internationaux
se sont avancés masqués .
Il
s'agit d'une très classique tromperie sur la marchandise, d'un
camouflage et d'une grossière ficelle commerciale - mais qui
marche toujours. La finance internationale a utilisé cette escroquerie
sémantique dès
la naissance du nouvel Etat . En effet, sous la direction des Rothchild
d'Angleterre, les banquiers créèrent, dès 1791,
une banque qu'ils qualifièrent déjà de "nationale"
sous le nom de BanK of the United States, mais qui n'était
pas plus "nationale" que la FED n'est "fédérale"
. Dans les deux cas il s'agit de banques privées qui appartiennent
à leurs actionnaires
et pour le bénéfice privé desquelles elles opèrent.
Le
cartel de banques privées regroupées sous le nom
de Système fédéral de réserve (FED) acquit,
au détriment de l'Etat fédéral qui le lui abandonna,
le droit d'émettre sa propre monnaie . Garantie par le gouvernement
des Etats-Unis, cette monnaie - le dollar.
Il convient donc de conserver constamment présent à l'esprit
que la FED n'est pas fédérale, comme son nom officiel le laisserait
supposer et qu'elle est une société privée à but lucratif, même
si au début de son existence, sa monnaie, le dollar était
couverte , comme les autres monnaies de l'époque, par les réserves
d'or que ces banques privées rachetaient partout dans le monde
.
Un
des rares hommes politiques de l'époque à avoir compris
toute la perversité du sytème , Charles A.Lindberg (le
père du célèbre aviateur) déclara : "Cette
loi établit le plus gigantesque trust sur terre. Lorsque le Président
(Wilson) signera ce projet de loi, le gouvernement invisible du Pouvoir
Monétaire sera légalisé... le pire crime législatif de tous les
temps est perpétré par cette loi sur la banque et le numéraire."
Un
lien organique assez lâche était maintenu avec le pouvoir
politique: la nomination par le président des États-Unis des sept membres
placés à la tête du consortium des banques composant
la FED - et confirmés quasi automatiquement par le Sénat - ainsi que
par des dépositions de son gouverneur devant les Commissions
monétaires du Congrès. Mais chacune des banques privées
qui composaient l'ensemble gérait ses affaires à sa guise.
Ainsi dans les 9 000 tonnes d'or en dépôt comptabilisées en 2006,
98% appartiennent à des états étrangers, à des organismes
internationaux et à quelques particuliers .
Un
des promoteurs de cette funeste décision, Salmon P. Chase, Secrétaire
du Trésor sous Lincoln, comprit trop tard les conséquences calamiteuses
pour le pays - et aujourd'hui pour le monde - qui découlent de
cette loi des Banques Nationales: "Ma contribution au passage de
la loi des Banques Nationales fut la plus grande erreur financière
de ma vie. Cette loi a établi un monopole qui affecte chaque
intérêt du pays. Cette loi doit être révoquée, mais avant que cela
puisse être accompli, le peuple devra se ranger d'un côté, et les banques
de l'autre, dans une lutte telle que nous n'avons jamais vue
dans ce pays."
Rien
de tel ne se produisit et le système perdure jusqu'à nos
jours , ce qui fait que le dollar est toujours la monnaie privée
d'un cartel de banques d'affaire qui la gèrent en fonction de
leurs intérêts , c'est-à-dire du système
capitaliste dont elles sont les représentantes et les bénéficiaires
et pas du tout en fonction des intérêts de l'Etat où
elles opèrent et de ses citoyens - et aujourd'hui du monde entier
.
Aujourd'hui,
la FED n'a pas de réserves et le
système a atteint son apogée. Pendant que l'Etat US croule
sous les dettes, les banques sont quasiment étouffées
par l'abondance de leurs bénéfices . Ainsi, le
"World Investiment
Report 2006" de l'ONU constate un gigantesque accroissement des
acquisitions et des fusions . Une bonne partie de ces acquisitions sont
faites avec les dollars - qu'on peut assimiler à de la fausse
monnaie d'un jeu de monopoly - dont nous verrons que la FED n'a eu que
le mal de l'imprimer .
3ème
escale - La
conférence de Gênes en 1922
Ma
navigation circummonétaire m'amena à examiner les vertigineuses " réparations
de guerre " imposées à l'Allemagne vaincue qui aboutirent à une
non moins vertigineuse inflation et instaurèrent la misère et le chaos
dans un pays qui avait été un des plus prospères du monde au XIXè siècle.
Qui plus est, elles amenèrent au pouvoir un Hitler au départ résolu
à redresser un pays qui partait à vau-l'eau. Le système monétaire en
subit les plus violents contrecoups.
Une conférence internationale qui se tint à Gênes en 1922 essaya de
remettre de l'ordre dans la chienlit et tenta de rétablir l'étalon-or.
Mais les anglo-saxons étaient déjà assez puissants pour imposer également
leurs propres monnaies - le dollar et la livre sterling - comme monnaies
de réserve . Un relâchement monétaire et une inflation galopantes aboutirent
au crash de 1929 et à la perte de la valeur des monnaies. Ainsi, le
dollar d'aujourd'hui vaut moins de 1% de sa valeur d'avant 1914.
4 ème escale : Bretton-Woods en 1944 et
le dollar présent en majesté
La
fin de la seconde guerre mondiale marqua le début d'une ère monétaire
nouvelle avec l'apothéose de la puissance politique et économique d'un
pays qui, tout en manifestant toutes les apparences d'une démocratie
bénévolante, avait déjà entrepris de cimenter une grande partie des
murailles de la forteresse de l'empire avec des billets verts.
En effet, forts de leur victoire sur les nazis et face à une Europe
exsangue, les USA imposèrent en juin 1944, à Bretton-Woods dans le New-Hampshire,
la reconstruction du système capitaliste mondial, mais uniquement fondé
sur leur propre richesse industrielle et financière. Ils ressuscitèrent
le système de l'étalon-or mais en y adjoignant cette fois le seul dollar
comme monnaie de réserve, l'Angleterre et la livre sterling étant sorties
moribondes de la guerre .
Il
faut dire que la guerre de 1940 fut une considérable source d'enrichissement
pour les USA : pendant toute la durée des hostilités,
c'est en or qu'ils exigeaient le paiement des armes qu'ils vendaient
aux belligérants. Ils en profitèrent, à la fin
du conflit, pour mettre la main sur tout l'or des banques allemandes
, à titre, une nouvelle fois, de "réparations
de guerre" . Autrement dit, une masse de 30 000 tonnes d'or
récupérée en Europe fut purement et simplement
considérée comme un butin de guerre .
L'or
de l'Allemagne et celui que la FED possédait déjà
ont donc servi de couverture au dollar et ont largement contribué
à sa valorisation et à sa consolidation comme monnaie
de réserve .

Bretton-Woods marque le début du règne du Roi-Dollar qui dura jusqu'à
la fin des années 1960.
Ce
fut néanmoins une naissance prudente. En effet, il existait encore quelques
garde-fous . Ainsi la valeur du dollar était définie par rapport à l'or
: elle était 35$ pour une once d'or, ce qui garantissait une stabilité
et une certaine équité dans les échanges commerciaux.
De plus, les USA jouissaient alors d'une suprématie industrielle immense
et possédaient maintenant à Fort Knox les plus grosses réserves d'or
- 80% de l'or de la planète . De plus, leur balance commerciale était
largement excédentaire et représentait 40% de la production mondiale.
Le monde entier, en pleine reconstruction, achetait force biens et services
américains et les dollars étaient ainsi rapatriés en grande partie.
Ce système fonctionnait donc sur une suprématie monétaire et
économique incontestées des Etats-Unis .
A cette époque, la réserve d'or couvrait encore à peu près les sommes
que les banques centrales du " Rest of the World " pouvaient
réclamer. Mais la domination économique américaine a diminué progressivement
du fait que les pays européens et le Japon s'étant redressés n'ont plus
importé autant de produits manufacturés américains .
Comme les appétits intérieurs de l'empire s'étaient aiguisés en même
temps que ceux des financiers , il fallut, afin de satisfaire les uns
et les autres , faire fonctionner de plus en plus intensivement la planche
à billets - métaphore qui désigne la création de monnaie par les banques
sous forme de crédits divers aux particuliers et aux entreprises. Les
dettes des particuliers, ajoutées à celles de l'Etat sous forme de dépassements
budgétaires ont alors considérablement augmenté la masse de dollars
en circulation .
Mais en 1965, le Général de Gaulle put encore exiger des Etats-Unis
le remboursement en or d'une dette de 300 millions de dollars. Cinq
ans plus tard, au moment de la guerre du Vietnam, la couverture or n'était
plus que de 55% et elle est tombée à 22% un an plus tard en 1971.
Or, à cette date les Etats-Unis avaient dépensé 500 milliards de dollars
dans leur effort de guerre au Vietnam alors qu'ils ne possédaient plus
qu'une réserve de 30 milliards de dollars en or.
5
ème escale : Le dollar flottant et la mise en place de l'escroquerie
monétaire du millénaire par un empire devenu une puissance militaire
De nombreux citoyens du Rest of the World (Reste du Monde), emboîtèrent
le pas au Général de Gaulle et des demandes de conversion en provenance
de diverses banques centrales étrangères provoquèrent un vent de panique
si bien que le 15 août 1971, acculé, le Président en exercice de l'empire,
Richard Nixon , fut contraint de demander à la FED de prendre
une décision en forme de coup de poker : abandonner purement et simplement
la convertibilité du dollar en or . N'ayant plus les moyens de racheter
ses billets, la FED, en accord avec le pouvoir exécutif de l'empire,
décida que le cours du dollar flotterait au gré
de l'offre et de la demande.
Cette
décision signifiait:
1° - Que le dollar n'avait plus de couverture-or.
2° - Qu'il avait également perdu la garantie de l'Etat
Ce
fut le premier gigantesque coup de force des Etats-Unis, un véritable
coup d'Etat monétaire et un coup de pied dans la fourmilière
de l'économie mondiale. Il marque leur entrée dans l'ère ouvertement
militaro-impériale . Il fut précisément décidé à la suite
du déclenchement d'une guerre déjà fondée, elle aussi, sur un mensonge
et une manipulation médiatique de l'opinion intérieure et des opinions
mondiales, celui d'une attaque , totalement inventée, de la flotte américaine
par
le Vietnam du Nord dans
la baie du Tonkin .
Ce fut la première manifestation spectaculaire d'un mépris pour
le Reste du monde , pudiquement appelé unilatéralisme
qui allait croître et embellir au fil du temps.
En
effet, les Etats-Unis décidèrent tout seuls, et en fonction des aléas
de leur politique militaire et des contraintes économiques qu'elle leur
imposait , de changer les règles du jeu monétaire international. Le
dollar, détaché d'une valeur-or stable, devint une monnaie dite flottante,
c'est-à-dire à la valeur variable au gré de la demande.
Du
coup, tous les biens produits par le Rest of the World et destinés
à l'exportation, donc libellés en dollars, devenaient,
eux aussi, des bouchons flottants .
L'or,
démonétisé, était déchu de son statut d'étalon monétaire et n'était
plus qu'une matière première banale comme le zinc ou le cuivre.
Depuis
1971, il n'existe plus de système monétaire international.
En effet, la décision unilatérale de l'empire entraîna
ipso facto la perte de valeur de toutes les monnaies du monde
puisque les deux étalons monétaires sur lesquels elles
étaient fondées s'étaient écroulés.
Toutes les monnaies se sont donc mises à flotter, elles aussi.
N'ayant plus, à l'instar du dollar, aucune valeur par elles-mêmes,
elles sont devenues des moyens de paiement en forme de papier imprimé
légal.
En
conséquence, l'économie mondiale devenait un bateau sans pilote ni gouvernail
et, pour continuer de filer la métaphore maritime, la hauteur des vagues
sur lesquelles voguait l'économie mondiale dépendait de l'humeur
des financiers et
des aléas de la politique
du seul Etat émetteur de
dollars.
Cette
décision impériale présentait un autre immense
avantage aux yeux des financiers de l'empire : sans effet désagréable
sur leur propre économie, elle
mettait, en revanche, toutes les autres économies mondiales à leur merci.
Problème
: comment faire avaler cette décision au " Rest of the Wold"
?
6
ème escale : Vérification de la démonstration d'Etienne
de la Boétie sur la servitude volontaire
Ce
grand esprit dirait aujourd'hui que l'Amérique n'est puissante
que parce que nous sommes à genoux.
Bien plus que sur des courbes et des équations mathématiques, l'économie
repose sur la psychologie des peuples et des Etats . L'étalon or-dollar
supposait une vertu et une rigueur économiques séraphiques et surhumaines
de la part de l'Etat dont la monnaie-papier devenait l'équivalent de
la référence-or et qui se trouvait donc être à la fois juge et partie
dans la compétition économique.
Quant
aux Etats utilisateurs du dollar-étalon, ils devaient soit manifester
une allégeance aveugle à l'empire et accepter une soumission passive
à ses décisions, soit croire en l'existence d'un Etat
à la vertu miraculeuse qui n'aurait jamais la moindre tentation
de créer fictivement de la monnaie et d'arrondir ses fins de mois en
achetant au Reste du Monde beaucoup plus de marchandises et d'équipements
divers que ce qu'il aurait pu le faire grâce à la richesse réelle
produite par son économie.
Mais
l'histoire révèle que rien n'est plus facile à
imposer qu'un miracle, comme le
prouvent les dogmes des diverses religions de la planète.
Et le miracle, somme toute modeste par rapport à ceux véhiculés
par les croyances comme la naissance virginale ou la résurrection
, que l'empire a réussi à répandre, fut la croyance
en sa vertu , en son honnêteté et en son désir d'agir
pour le bien de l'humanité. De plus l'irrationalité
de ce qu'on appelle "les marchés financiers" n'est
plus à démontrer, surtout lorsqu'on leur présente
l'appât de bénéfices immédiats .
Avec
le dollar flottant, toutes les digues étaient rompues et, comme le disait
le sapeur Camenbert, " quand les bornes sont franchies, il n'y a
plus de limites " . Les Etats-Unis pouvaient dorénavant créer autant
de monnaie que le supporterait leur prestige et celui de leur économie
. Sans couverture, ce n'était rien d'autre que de la fausse monnaie,
ou monnaie de singe.
C'est
bien ce qui est arrivé, puisque depuis 1971, la richesse produite
par l'économie de l'empire a quadruplé , alors
que la masse monétaire qu'il a déversée sur le
globe a été multipliée par quarante .
Les habitants des banlieues du Rest of the World ont beau être
d'un naturel crédule et soumis, notamment les Européens, et béer
d'admiration devant leurs " libérateurs " de 1944, il n'aurait
peut-être pas été si facile d'inciter leurs banques centrales à continuer
d'accorder au dollar flottant, donc devenu aussi consistant qu'un caramel
mou, un statut privilégié et à utiliser ce pseudo étalon comme
monnaie unique des échanges entre eux et comme monnaie de réserve
de leurs propres banques centrales. Le mark allemand et le franc suisse
jouissaient à l'époque d'une solidité et d'un statut enviables .
L'empire a donc trouvé un stratagème particulièrement efficace
et contraignant pour que la vassalisation des économies mondiales puisse
se poursuivre à son bénéfice exclusif par le truchement d'un
système qui n'avait plus rien de concret ou de scientifique.
Reposant sur la confiance des utilisateurs , il ressortissait exclusivement
à la psychologie .
7
ème escale : Le grand complot et la création du pétro-dollar
C'est
là qu'intervient la soif de pétrole de l'empire que j'ai
présentée dans le chapitre
II des Aventures mirobolantes de l'empereur Picrochole
. Le pétrole, hier comme aujourd'hui, n'est pas un produit ordinaire.
Il est le moteur de toute l'économie mondiale. Ce que les Etats-Unis
ne pouvaient plus faire avec la seule arme d'un dollar affaibli, ils
tenteront de le réaliser par l'alliance du dollar avec le pétrole.
L'opération connut une belle réussite pendant trente ans
.
Pour
cela, il leur fallait un comparse complaisant - un complice - qui trouverait
également son propre intérêt dans cette alliance. Ce fut le royaume
de la famille Saoud, appelé Arabie Saoudite qui accepta de jouer ce
rôle.
Le
cadeau sans prix que le royaume saoudien fit à l'Amérique au début des
années 1970 , en échange d'une "protection militaire"
et de divers "avantages économiques", fut de libeller
et de vendre son pétrole exclusivement en dollars . Comme
il s'agit du plus gros producteur et du membre le plus influent de l'OPEP
, les autres monarchies du Golfe, en bons moutons de Panurge pro-américains,
suivirent le mouvement, si bien que l'habitude, puis une sorte de
loi tacite s'imposèrent : pour acheter du pétrole, il fallait des
dollars. Et pour obtenir des dollars, il fallait , soit acheter des
produits américains , ce qui dopait l'industrie de l'empire et procédait
en quelque sorte au blanchiment d'une monnaie fictive créée par un simple
jeu d'écriture - une variante d'un " argent sale " - soit n'utiliser
que les dollars dans les échanges internes entre Etats.
On
faisait ainsi entrer dans un circuit commercial classique à l'extérieur
des USA des billets de banque qui, à l'origine étaient simplement du
papier imprimé . Du coup, une monnaie fictive créée ex-nihilo
par des institutions financières privées de l'empire, trouvait
par la magie de ce mécanisme un statut officiel de monnaie réelle.

Comme cette masse flottante de monnaie circulait en dehors de l'Etat
émetteur puisque, de fil en aiguille, elle était devenue l'étalon international
des échanges de toutes les marchandises, la créance n'était jamais
présentée au débiteur. Celui-ci pouvait d'autant mieux continuer
à créer de la monnaie que la demande de pétrole était de plus en plus
importante. La quantité de monnaie augmentait donc parallèlement
à l'augmentation de la demande de pétrole dans le monde .
Ainsi
la monnaie privée des financiers américains est devenue,
de fil en aiguille, la monnaie mondiale dominante : 75% de la monnaie
mondiale sont des dollars. De plus,tantôt par des pressions, tantôt
par des menaces, tantôt tantôt par suivisme, lâcheté
, indifférence ou ignorance des utilisateurs, les dollars représentent
80% des fonds détenus par les banques étrangères.
Je reviendrai ultérieurement sur les liens entre l'invasion de
l'Irak et la décision de Saddam Hussein de vendre son pétrole
en euros.
En
attendant, la martingale fonctionnait à la perfection et
il est avéré que l'empire américain en faux monnayeur efficace,
jouissait du statut
exceptionnel de pouvoir acquérir, comme il a été décrit précédemment
(voir
chapitre III) , des biens
considérables tant à l'étranger qu'à l'intérieur,
du pétrole, un armement phénoménal, un équipement spatial, une infrastructure
universitaire, des laboratoires et des centres de recherche performants
avec une monnaie fictive appelée dollar, mais non gagée par des actifs
réels.
Depuis la dérèglementations
du système bancaire mondial en 1994 par les accords de l'OMC (Organisation
mondiale du commence) les puissantes sociétés financières
de Wall Street , les fonds de pensions et les trusts bancaires de l'empire
ont pris d'assaut la planète et mettent la main sur tout ce qui
offre une rentabilité juteuse : des usines, des sociétés
contre du papier imprimé à gogo appelé dollars
. *
Ce mécanisme s'apparente à une escroquerie pure et simple puisque
les
richesses de l'empire sont financées par des "emprunts"
, qui s'accumulant deviennent des dettes vertigineuses et donc impossibles
à rembourser.
Quand l'escroquerie est aussi gigantesque elle en devient invisible
.
De
même que l'empire romain imposait aux provinces ou aux Etats qu'il
avait vaincus un tribut annuel sous forme d'un impôt ou de la
fourniture de marchandises (par exemple, le blé d'Egypte), le
monde entier paie aujourd'hui à l'empire américain un
tribut évalué à 700 milliards de dollars qui représentent
la différence entre ce qu'il produit et ce qu'il dépense.

Cette
situation ubuesque dont le monde commençait à éprouver
les conséquences néfastes mais sans en mesurer vraiment l'ampleur et
le danger , fut acceptée volens nolens par la planète tout entière,
faute d'une coalition politique assez puissante, assez lucide et assez
déterminée à y mettre un terme, malgré quelques grincements de dents
ici ou là.
8
ème escale : Le bord du gouffre et le dérapage avant
la chute
Déjà
quelques glissades dangereuses avaient donné des sueurs froides aux
plus prudents et aux plus perspicaces, hantés par le crash de
1929. Une crainte de plus en plus perceptible commençait de troubler
les institutions monétaires du Rest of the World de ce qu'à force
de creuser le trou des déficits et des dettes, une gigantesque implosion
finisse par ébranler la planète.
La
panique devant un 11 septembre 2001 financier - ô combien plus catastrophique
pour l'économie mondiale que l'écroulement, plus ou moins accompagné
officiellement des deux tours jumelles du WTC et de la voisine qui leur
faisait face et qui n'ayant pas même été effleurée, s'est visiblement
effondrée par compassion - préoccupait de plus en plus d'esprits
pendant que la fête battait son plein sur les ponts du Titanic
et que l'euphorie régnait chez les boursiers.
Cet
épisode est d'autant plus troublant que les sous-sols des deux
tours principales du WTC contenaient une gigantesque réserve
d'or et que seule une faible quantité de lingots soigneusement
empilés dans un semi remorque abandonné dans un conduit
souterrain reliant les tours jumelles à la troisième,
a été récupérée . Les trois tours
appartenaient à M. Silverstein. Il se peut que ce fait, qui semble
avoir été jugé anecdotique , prenne un jour une
importance insoupçonnée.
Deux
événements majeurs sont venus troubler le jeu de cartes
des magiciens du dollar flottant : la naissance d'une monnaie commune
européenne, l'euro,et la fin de la publication régulière
de l'agrégat M3 qui révélait au monde entier l'importance de
la gloutonnerie dépensière de l'empire.
Car
il existait une dernière petite butée rassurante pour les utilisateurs
du dollar avant la chute dans l'abîme : toutes les données monétaires
disponibles étaient publiques, aussi bien les liquidités - pièces, billets,
comptes courants, livrets, comptes épargne, sicav - que l'ensemble des
moyens de paiement. Les monétaristes les désignent sous le nom d'" agrégats
" et les ont classés en quatre types : M0, M1, M2 et M3. Le plus important
de ces agrégats est le M3 parce qu'il contient les précédents. C'est
celui qui nous intéresse car c'est celui qui pilote la politique monétaire
globale. Il est l'indicateur le plus fiable de la quantité totale de
dollars en circulation à l'intérieur des USA et dans le monde. Il permet
donc de calculer le rapport entre la richesse réelle de l'Etat et son
train de vie.
L'entrée
en scène de l'euro en 1999 offrait au monde l'alternative d'une nouvelle
monnaie internationale . L'empire, sentant le danger, avait vainement
jeté toutes ses forces dans la bataille pour essayer d'en empêcher le
débarquement .

Accueillie
d'abord prudemment, cette météorite creusa néanmoins un gros cratère
dans les sables bitumineux du pétro-dollar et remit en cause la superbe
construction monétaire qui avait imposé au monde l'utilisation
d'un dollar même flottant et dévalué comme seule monnaie
de réserve au bénéfice de l'économie des USA.
Mais
le coup de grâce vint de l'intérieur même du système . Le 23 mars
2006 un événement capital se produisit dans l'histoire économico-monétaire
de la planète, dont
la presse quotidienne, le
nez sur le guidon du quotidien et complètement myope, n'a pas
tout de suite mesuré l'importance : la décision de la Réserve
fédérale de l'empire américain (FED), émettrice privée
des dollars, d'arrêter la publication de l'agrégat monétaire M3
ainsi que la parution de divers autres indicateurs secondaires qui,
par des moyens détournés permettaient aux autres Etats de la planète
de se faire une idée globale de la masse monétaire en circulation.
Continuant de collationner les données, le cartel de banques privées
composant la FED rompait le contrat de confiance qui le liait aux utilisateurs
de sa monnaie, et gardait pour son usage exclusif les données recueillies,
considérant avec le mépris et l'indifférence propres à
l'empire, que les banques centrales et les citoyens du Reste du Monde
n'avaient qu'à se débrouiller dans le brouillard ou à faire aveuglément
confiance aux maîtres du monde , c'est-à-dire aux financiers
de la FED.
En
réalité, il s'agissait d'une opération de camouflage honteux
d'une dette exponentielle, officiellement évaluée à 8.000 milliards
de dollars , mais qui serait en fait de 42 000 milliards - et même
de 55 000 milliards selon d'autres calculs - si l'on y intégrait les
dépenses de santé et les retraites, ce qui représente dix-huit à
plus de vingt fois le budget annuel de ce pays.
Si
un particulier doit deux mille euros à une banque, c'est un problème
pour lui, mais s'il doit deux millions d'euros à cette même banque,
c'est un problème pour la banque. La situation est transposable à la
dette américaine, dont le montant colossal des dettes privées
et publiques continuant d'augmenter dans le plus grand secret, ne sera
évidemment jamais remboursé et constituera à l'avenir un problème
majeur pour tous les Etats de la planète .
Quid
du comportement à venir des pays qui détiennent de pleins coffres de
créances en dollars ? Quid de l'avenir de l'économie de l'empire ? Mais
surtout, quid de l' économie des autres pays des autres pays de la planète?
Quel sera l'avenir de l'euro ?
On peut, au sujet de la situation monétaire actuelle, appliquer à l'empire
la métaphore qui disait que la roche tarpéienne est proche du Capitole.
Il n'est pas nécessaire d'être un grand prophète pour affirmer avec
une quasi certitude que le Capitole américain penche dangereusement
, qu'il est sur le point de s'effondrer et de s'écraser dans le gouffre
de la dette et de la gloutonnerie impériales comme la traîtresse Tarpeia
s'était écrasé dans le gouffre qui s'étendait au pied de la roche à
laquelle le Capitole des Romains était adossé et du haut de laquelle
elle avait été précipitée, donnant son nom au célèbre rocher.
Seule la date précise reste à déterminer , même si les financiers
de Wall Street susurrent que la chute sera assez lente et qu'ils maîtrisent
la situation. Il est d'autant plus important d'éviter une panique
dévastatrice qu'ils espèrent avoir le temps de mettre
leurs billes à l'abri et de trouver un stratagème afin
d'obliger le Reste du Monde à assumer les conséquences
du fardeau de leur dette. Traduit en langage de l'empire cela donne
: "La FED espère un atterrissage en douceur de l'économie
américaine..." .

Les privilèges monétaires dont jouit l'empire depuis 1945 sont les
sources de sa puissance et de son expansion. Ils sont si faramineux
qu'on devine que les USA sont prêts à tout pour en assurer la pérennisation
.
*
Voir l'excellente étude
de Eberhard Hamer, professeur à l’institut des classes moyennes de Hanovre
http://www.horizons-et-debats.ch/31/31_21.htm
15 décembre 2006