"
Il
y a deux histoires: l'histoire officielle, menteuse, et l'histoire secrète,
où sont les véritables causes des évènements." Honoré
de Balzac
*
La religion du
Veau d'Or - que l'on appelle aujourd'hui Globalisation ou Mondialisation
- est vieille comme le monde , même si les formes de son pouvoir et
ses manifestations ont varié au cours des siècles avec
les conditions politiques et surtout avec les moyens techniques de son
exercice.
*
1
- Origine et préhistoire du culte du Veau d'Or
2
- Le Veau d'Or des temps modernes
*
1
- Origine et préhistoire du culte du Veau d'Or 
"
Fais-nous un dieu qui marche devant nous … "
Lorsque , dixit le mythe biblique, Moïse revint parmi les siens
après avoir passé quarante jours et quarante nuits suspendu à un rocher,
sans boire ni manger, à écouter son dieu dicter, puis inscrire sur des
morceaux de rocher, les commandements destinés à régir le plus harmonieusement
possible la vie de la tribu dont il était le guide, il eut la désagréable
surprise de débarquer au milieu d'une fête.

On célébrait dans la plaine le nouveau dieu que des nomades fugitifs
d'Egypte, lassés d'attendre le retour de leur chef, avaient fabriqué
de leurs mains . Ils avaient en effet sacrifié leurs bijoux , et notamment
les anneaux d'or, symboles de l'écoute du divin , que tous, hommes,
femmes, enfants portaient aux oreilles, et ils les avaient fait fondre.

Aaron,
leur chef en second, avait pris les choses en main en l'absence de Moïse
et avait réussi le tour de force particulièrement remarquable au vu
des conditions matérielles dans lequelles se déroulait
la scène, de construire un moule en forme de bœuf et d'y verser
l'or fondu. La figurine qui en est sortie était de taille modeste
, mais brillait de mille feux.
"Aaron leur dit: Otez les anneaux d'or qui sont aux oreilles de vos
femmes, de vos fils et de vos filles, et apportez-les-moi. Et tous ôtèrent
les anneaux d'or qui étaient à leurs oreilles, et ils les apportèrent
à Aaron. Il les reçut de leurs mains, jeta l'or dans un moule, et fit
un veau en métal fondu. " (Exode 32)
La
parabole a donné lieu à des interprétations d'autant
plus diverses qu'elle a été rédigée vers
le VIè siècle avant notre ère, alors qu'elle relate
des événements censés s'être produits
un millénaire auparavant. La solitude est lourde à
tous les hommes et plus encore à un groupe de fuyards perdus dans un
désert et orphelins de leur guide. Apeurés, ils en appellent à un protecteur
bien visible . " Fais-nous un dieu qui marche devant nous… "
auraient dit les fugitifs à leur nouveau guide !
La
petite troupe s'est donc spontanément tournée vers le dieu qu'elle venait
de quitter, le dieu solaire égyptien, le grand taureau fécondateur Apis,
coiffé du disque d'or qui rayonne entre ses cornes.

Mais
un millénaire plus tard, lorsque les lévites inventèrent
un nouveau dieu et rédigèrent les textes fondateurs de leur nouvelle
religion, leur intention n'était évidemment ni de magnifier un dieu
rival, ni de s'interroger sur les états d'âme des fuyards d'Egypte.
Le monothéisme hébreu naissant s'est établi en dévalorisant les symboles
des dieux étrangers - notamment des dieux égyptiens - et cela d'autant
plus férocement qu'il voulait faire oublier à quel point il s'en était
inspiré.
La
nouvelle religion n'avait rien d'universel, puisqu'elle ne s'adressait
qu'au petit groupe ethnique des Hébreux, le fameux "peuple élu
" . Apis, réincarnation d'Osiris et d'Isis, symbole du soleil , de la
lune et de la terre nourricière, donc de la vie rayonnante, de la lumière
et de la fécondité, devint sous leur stylet vengeur un dérisoire et
méprisable "veau " .
Avec
le temps, son sens lumineux et universel s'effaça et il se métamorphosa
en signe de l'idolâtrie et de la barbarie cupide dans laquelle serait
retombé le groupuscule qu'un dieu, aujourd'hui appelé Jahvé,
était censé s'être choisi . C'est ainsi que, par extension " l'adoration
du veau d'or " devint la manifestation de la stupidité de bédouins
crédules , idolâtres et avides de biens matériels.

L'Adoration
du Veau d'or, par Nicolas Poussin.
Sur le plan symbolique, le Veau d'or est donc associé pour l'éternité
à la soif de pouvoir, à la jouissance immédiate de biens matériels,
à l'opulence et à la puissance de l'argent . Il est la manifestation
de la vénération pour l'or, c'est-à-dire pour une richesse qui pervertit
les âmes et les cœurs . Il symbolise également la tentation toujours
présente et toujours renouvelée d'élever l'or et l'argent au rang de
divinité - mais de divinité maléfique.
C'est dans cet esprit que, dans son opéra Faust, Gounod
fait chanter à son Méphistophélès :
MEPHISTOPHÉLÈS:
"Le veau d'or est toujours debout;
On encense Sa puissance
D'un bout du monde à l'autre bout!
Pour fêter l'infâme idole,
Rois et peuples confondus,
Au bruit sombre des écus
Dansent une ronde folle Autour de son piédestal!
Et Satan conduit le bal!
TOUS: Et
Satan conduit le bal!
MEPHISTOPHÉLÈS:
Le veau d'or est vainqueur des dieux;
Dans sa gloire Dérisoire
Le monstre abjecte insulte aux cieux!
Il contemple, ô rage étrange!
A ses pieds le genre humain
Se ruant, le fer en main,
Dans le sang et dans la fange
Où brille l'ardent métal!
Et Satan conduit le bal!
TOUS: Et Satan conduit le bal! "
Le
Bouddha de Bangkok 
Mais il n'en a pas toujours été ainsi. Dans de nombreuses civilisations,
des Incas aux Egyptiens en passant par l'Orient et les 5,5 tonnes d'or
massif de la grande statue de plus de 3 m de haut du grand Bouddha de
Bangkok, l'or a uniquement symbolisé la gloire et la puissance des dieux
.

Le
temple du roi Salomon 
Un
des rois mythiques de la bible hébraïque, Salomon, l'utilisa
également dans cet esprit-là. Il est supposé avoir
fait venir l'or du lointain royaume d'Ophir appartenant à la reine de
Saba - probablement l'Ethiopie actuelle - et en aurait abondamment usé
dans la décoration du temple qu'il est supposé avoir érigé
en l'honneur de son dieu et conformément aux instructions qui auraient
été communiquées surnaturellement à ses prêtres
par le dieu lui-même .

Le
temple de Salomon
Jahvé n'étant pas insensible à la beauté et à l'éclat de ce métal, le
Salomon légendaire n'aurait pas lésiné sur les fastueuses
décorations en or de la maison de son dieu. Le premier temple qui aurait
été achevé vers le Xème siècle avant notre ère et détruit
par les Babyloniens en -586 était, dit le texte rédigé
par les lévites, presque entièrement recouvert de feuilles d'or.
"Le
Saint des Saints fut revêtu d'or fin. Il [Salomon] fit un autel
de cèdre et le revêtit d'or. (…) Tout le temple il le revêtit d'or,
absolument tout le temple. Dans le Débir il fit deux chérubins en bois
d'éléagne (...). Il revêtit d'or les chérubins. (…) . Il couvrit d'or
le plancher du temple à l'intérieur et à l'extérieur. " (Rois
1, chap.6)

L'arche
du temple de Salomon
Mais ce roi, dont les écrits bibliques louent autant la sagesse que
la richesse et l'abondance de son harem, aurait rompu avec la tradition
qui consistait à n'utiliser l'or que pour le service des dieux. Il fut
un grand jouisseur et un adorateur des richesses ostentatoires . Le
Midrach apprend que son trône ruisselait d'or et de pierreries
et qu'il rivalisait de sompuosité avec le Temple.

Le
sceau du roi Salomon
Dans la description mythologique qui en est faite, l'or est partout
et les joyaux les plus précieux font de ce trône une sorte d'autel à
la gloire du roi . Salomon , en potentat oriental, sorte de Gatsby le
magnifique des temps bibliques, aurait été en même
temps prêtre de son dieu et prêtre du veau d'or, le second
confortant le premier. Le faste et les richesses visibles exercent d'ailleurs
un pouvoir fascinatoire sur la grande majorité des esprits :
" Le roi Salomon fit deux cents grands boucliers d`or battu, pour chacun
desquels il employa six cents sicles d`or battu, et trois cents autres
boucliers d`or battu, pour chacun desquels il employa trois cents sicles
d`or; et le roi les mit dans la maison de la forêt du Liban. Le roi
fit un grand trône d`ivoire, et le couvrit d`or pur. Ce trône avait
six degrés, et un marchepied d`or attenant au trône; il y avait des
bras de chaque côté du siège; deux lions étaient près des bras, et douze
lions sur les six degrés de part et d`autre. Il ne s`est rien fait de
pareil pour aucun royaume. Toutes les coupes du roi Salomon étaient
d`or, et toute la vaisselle de la maison de la forêt du Liban était
d`or pur. Rien n`était d`argent: on n`en faisait aucun cas du temps
de Salomon. "

Rome
L'Eglise
catholique officiellement " épouse " mystique d'un Christ prêchant
la pauvreté et l'humilité, mais en réalité héritière et continuatrice
des Césars romains, se livra, elle aussi, tantôt ouvertement, tantôt
en tapinois au fameux culte du Veau d'Or. Durant de nombreux siècles,
la croix et les pièces d'or , le pouvoir spirituel et le pouvoir
temporel, Jésus et le Veau d'or firent bon ménage dans
tout l'Occident chrétien.
Lorsqu'en
1260, Thomas d'Aquin rendit visite au pape Innocent IV, celui-ci voulut
l'éblouir et lui présenta toutes les richesses de la papauté. Après
avoir admiré ces trésors, Innocent déclara:
" Voyez-vous, mon brave Thomas, je ne peux pas dire comme le premier
pape [l'apôtre Pierre] : "Je n'ai ni argent, ni or."
Thomas d'Aquin acquiesça et ajouta:
- Et vous ne pouvez pas dire non plus: "Au nom de Jésus-Christ, lève-toi
et marche!"
La
condamnation des fabuleuses richesses d'une papauté dévergondée, jouisseuse
et avide de plaisirs, d'évêques et de cardinaux ignorants et arrogants
, vivant dans une pompe ostentatoire , figure en bonne place parmi les
griefs des Réformateurs allemands. Luther et tous les protestants allemands
s'élevaient d'abord contre le luxe des dignitaires de l'Eglise et dénonçaient
violemment le commerce des indulgences , véritable pompe à finances
du Vatican.
La
pratique des indulgences, abandonnée depuis le concile Vatican II (1962-1965)
a été remise sporadiquement à l'honneur par le pape Jean-Paul II, notamment
lors du jubilé de l'an 2000 . Mais le pape Benoît XVI semble manifester
davantage de goût pour cette pratique qui allie si heureusement
les dévotions et les rentrées d'argent . Il y recourt
pour la troisième fois depuis le début de son pontificat. Il vient ,
en effet, de se porter garant de la " certitude du pardon de Dieu
" pour leurs péchés accordée à tous les pèlerins qui se rendront
à Lourdes entre le 8 décembre 2007 et le 8 décembre 2008 à minuit et
qui effectueront "avec dévotion" la visite des lieux du sanctuaire
marial, dans l'ordre prescrit par les autorités religieuses,
l'Eglise n'osant plus monnayer directement " l'indulgence plénière
". La procédure par laquelle Benoît XVI a obtenu l'accord et les
garanties de " Dieu " est demeurée secrète.
Le 9 décembre 2008 au matin, les péchés seront ineffaçables et les pécheurs
seront justiciables de l'enfer ou au mieux du Purgatoire. Amen.
*
2
- Le Veau d'or des temps modernes
D'un
dieu à l'autre... 
""La
politique, c'est l'art d'empêcher les gens de se mêler de ce qui les
regarde", disait Paul Valéry.
Le
dieu visible de l'ancienne religion du Veau d'Or, celui "qui marche
devant nous " au grand soleil du jour, symbole d'un pouvoir hiérarchique
pyramidal, est mort. Mais, c'est bien connu, un dieu ne meurt jamais
tout à fait. A côté de l'évolutionnisme biologique, un darwinisme
théologique régit la succession des théologies dans
les cerveaux. C'est pourquoi un
dieu moribond se réincarne ou glisse doucement en tout ou en partie
dans le corps de son successeur.
Et l'empire américain vint, qui prit le globe terrestre dans ses
serres…

Contrairement au faste de Salomon ou des rois de Babylone, les nouveaux
prêtres de la religion du Veau d'or n'affichent ni leurs richesses,
ni leurs personnes sur le devant de la scène. Leur coquetterie principale
est précisément d'être invisibles. Derrière de hautes palissades d'
abstractions, de chiffres et de graphiques , les seigneurs du grand
capital se protègent des hommes en chair et en os . Leurs sujets ignorent
souvent jusqu'au nom des maîtres qui tiennent leurs destinées entre
leurs mains. "Le monde est gouverné par de tout autres personnages
que ne se l'imaginent ceux dont l'œil ne plonge pas dans les coulisses"
disait déjà Disraëli (1804-1881), dans Coningsby.
La
prise du pouvoir par les financiers internationaux et les grands banquiers
anglo-saxons s'est opérée en tapinois, tout au long du XIXe siècle.
Elle a pris corps avec l'expansion de l'empire colonial britannique
qui, à son apogée, a commandé un quart de la planète. A l'aube du XXè
siècle , les colonies anglaises d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et d'Amérique
composaient encore "l'empire sur lequel le soleil ne se couche
jamais" . Je reviendrai ultérieurement sur le rôle des banquiers
anglais dans la mise sur orbite du nouveau dieu au XIX è siècle .
La
guerre des dieux 
Mais le Veau d'or financier naissant eut fort à faire pendant la cinquante
d'années durant laquelle il fut en butte à la concurrence d'un puissant
dieu rival , infiniment plus séducteur que lui, puisqu'il promettait
rien moins que le paradis sur la terre. L'idéologie communiste représentait
un contre-pouvoir idéologique puissant à la poussée du
libéralisme . Durant un demi siècle, elle a coupé l'appétit aux
représentants du capital , freiné leurs ardeurs et limé les dents des
loups cerviers dont parlait déjà Balzac dans La Comédie humaine.

Voraces et patients, les financiers attendaient leur heure. Après
quelques dizaines d'années, le messianisme du prolétariat mondial
s'est flétri feuille par feuille et a fini par sombrer dans le marécage
d'un marasme économique et social. Il acheva de pourrir définitivement
dans les camps de concentration, ces dépotoirs du paradis marxiste dans
lesquels furent envoyés les hérétiques de la nouvelle religion. L'effondrement
définitif de ce messianisme en 1989 fut si spectaculaire et si sonore
qu'il provoqua une onde de choc dont la sismicité pulvérisa le mur qui
le symbolisait. Mais l'espérance est un chiendent tenace et elle n'a
pas été étouffée sous les gravats du mur.
Depuis
une vingtaine d'années, enfin
décomplexé et libre
de toute entrave éthique , le nouveau dieu de l'adoration du
Veau d'Or économico-financier, débarrassé du rival qui lui donnait mauvaise
conscience, a pu se déployer dans toute sa puissance.
Petit
résumé des trois épreuves surmontées par
le nouveau dieu 
Mais
le nouveau dieu a dû successivement triompher de trois épreuves initiatiques
avant d'accéder au statut d'unique divinité mondiale qui est le sien
aujourd'hui.
Il s'agissait d'abord de d'imposer la puissance de ses muscles et donc
de montrer sa force militaire. Après une première mise
en jambes à la fin de la première guerre mondiale - puisque
les USA n'entrèrent dans la mêlée qu'en 1917, soit
trois ans après le début des hostilités - la seconde
guerre mondiale offrit à l'arsenal militaire américain
un champ de démonstration si déterminant qu'il fit à
l'empire en expansion le cadeau d'une victoire par KO sur toutes les
autres puissances militaires de la planète .

Ensuite, il a fallu à la nouvelle divinité consolider son prestige en
étalant bijoux et trésors sous la forme d'un gigantesque tapis de billets
de banque . Un flot ininterrompu d'argent sorti de rien a alors émerveillé,
puis fasciné toutes les nations de la terre. L'envoûtement fut tel que
le reste du monde lui accorda, les yeux fermés, le statut enviable de
Dieu unique, c'est-à-dire de seul référent universel.
Le
monothéisme capitalistico-libéral anglo-saxon flottant sur un mer de
dollars s'est alors lancé à la conquête de la planète et, dans
un troisième mouvement, tel un tsunami irrésistible, il
renversé les frontières qui s'opposaient à son
expansion. La mondialisation était née. Comme le
fait dire l'apôtre Jean au crucifié : "Tout est
accompli " et le règne sans entraves de l'argent-roi
a pu débouler sur la planète entière.

Le
stade politico-militaire de l'expansion du nouveau dieu 
La
première épreuve passée avec succès par le dieu naissant fut donc politique.
C'est
la victoire sur les armées du IIIe Reich et ses alliés
de l'Axe qui donna aux USA le rang prestigieux de superpuissance que
la planète entière lui a reconnu pendant toute la seconde moitié du
XXe siècle. " Depuis Rome, il n'y a jamais eu une nation qui ait
autant éclipsé les autres " proclamait urbi et orbi dans
un grand cri de victoire Joseph S. Nye Jr., recteur de la Kennedy
School of Government à l'université Harvard et secrétaire d'Etat
à la défense sous M. William Clinton. Il exprimait, par ce cri du coeur,
l'auto-jubilation dans laquelle barbotait la classe politique de l'empire
auto-fascinée par sa propre idéologie et les miracles bien visibles
qu'elle produisait chez ses grands prêtres . Dans la patrie du capitalisme
florissant, c'est Noël tous les jours pour les protégés
du dieu, puisque 1% des plus riches gagnent plus que le total des revenus
des 40% les plus pauvres.
Le
stade monétaire 
La seconde épreuve à laquelle le Veau d'Or fut confronté afin de passer
du stade de nourrisson confiné dans les frontières du nouvel Etat en
gestation au plein épanouissement de sa puissance, fut monétaire
. La multiplication des dollars est un miracle qui soutient la comparaison
avec le miracle de la multiplication des pains rapporté par l'apôtre
Jean dans les Evangiles.
Avant
1913 , date de la naissance officielle de la machine à produire
des dollars, les financiers qui s'étaient enrichis par des spéculations
douteuses durant la guerre de Sécession - et qu'on appelle depuis lors
les " barons voleurs " - étaient à plusieurs reprises sortis
des coulisses où ils rongeaient leur frein . On les vit opérer de fructueux
rezzous sur les marchés boursiers . Ainsi, au début du siècle, ils purent
piller allègrement les imprudents qui avaient cru rivaliser avec eux
et accumuler en toute impunité un considérable magot.
Ils orchestrèrent, en effet, quelques paniques spectaculaires à la bourse
de New-York en déclenchant, comme ce fut le cas en 1907, une ruée sur
les actions de quelques grosses sociétés. Ils procédèrent
ensuite à une vente massive de manière à créer
la panique, puis rachetèrent ces mêmes actions à la baisse en
se présentant en sages sauveurs du bien public.

1907:
Le banquier John Pierpont Morgan "sauve" la bourse
Mais
l' invention la plus géniale des nouveaux loups-cerviers est indiscutablement
la poule aux œufs d'or que fut la création de la FED (le Système
fédéral de réserve) durant la nuit du 23 décembre
1913. Depuis lors, les financiers anglo-saxons chantent Alléluia du
matin au soir.
Voir
: Voyage
circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte de la caverne
d'Ali-Baba …2 ème
escale
Un
de leurs exploits particulièrement célèbre se situe
en 1929 lorsqu'ils accompagnèrent et surent gérer en catimini à leur
avantage la panique boursière et le joli crash auxquels il prêtèrent
la main en ruinant sans vergogne et
une fois de plus les petits porteurs.

De nouveau, le même petit gang de "barons voleurs" racheta en
masse les titres dévalués et amoncela de colossales fortunes en faisant
remonter les cours pendant que les malheureux ruinés se suicidaient
en grand nombre.

Forts
de la puissance militaire et économique de l'Etat qui les hébergeait,
les banquiers anglo-saxons consolidèrent leur empire financier durant
l'entre-deux guerres.
La deuxième guerre mondiale qui les vit prêter à un taux usuraire
les sommes qui permirent aux belligérants des deux camps de mettre sur
pied leur arsenal militaire, puis de s'entre-tuer pendant de longs mois,
fut pour eux une période exceptionnellement faste . Prudents
, ils exigeaient d'être payés en or. C'est ce pactole juteux qui leur
permit,
lors des accords de Bretton Woods en
juillet 1944 , d'imposer comme
unique monnaie de réserve la
monnaie-dette privée qu'ils avaient inventée en 1913 .
Voir
: Voyage
circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte de la caverne
d'Ali-Baba……4ème
escale
C'était déjà là un bel exploit ; mais la machine infernale à
produire des dollars atteignit une perfection inespérée
le 15 aout 1971. Ce jour-là les banquiers touchèrent en
effet le jack-pot et dépassèrent les rêves les plus
fous des alchimistes lorsqu'ils réussirent - qui plus est à la
faveur d'opérations militaires désastreuses au Vietnam,
qui avaient outrageusement déséquilibré la balance
commerciale des Etats-Unis et qu'ils surent exploiter à leur
avantage - à transformer en or un papier imprimé non gagé et à créer
à partir de rien une monnaie dite "flottante", c'est-à-dire
dont la valeur oscillait au gré des aléas de leur propre
politique.
Voir
: Voyage
circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte de la caverne
d'Ali-Baba… 5ème
escale
Ces
décisions monétaires eurent pour les financiers anglo-saxons propriétaires
de la FED, des conséquences en chaîne plus heureuses les unes que les
autres durant trois décennies. Elles furent même momentanément
hautement profitables à l'expansion impériale états-unienne,
puisque le tour de passe-passe monétaire qui transformait une monnaie
privée et nationale en monnaie de réserve internationale équivalente
à l'or permettait à l'Etat émetteur, en quelque sorte en compte à demi
avec les nouveaux " barons voleurs ", de faire financer par l'étranger
son commerce, ses déficits budgétaires sans fond et surtout les guerres
qu'il menait en vue de s'approprier les hydrocarbures dont il était
assoiffé. De plus, il aurait été impossible à cet Etat de payer la construction
et l'entretien de ses 737 bases militaires à l'étranger sans la complaisance
intéressée de ses banquiers faux-monnayeurs.
La religion du Veau d'Or a été de tous temps adossée
au triomphe des armes, que ce soit à l'époque mythique
du roi Salomon, au temps de l'empire perse ou à celui de la puissance
temporelle de la papauté triomphante, qui a culminé avec
les vagues successives des croisades . L'alibi théologique des
uns et les motivations mercantiles des autres avaient alors abouti à
des guerres de pillage et à une occupation de la "Terre
Sainte" durant un siècle . Il en fut de même de la
domination de l'actuel Veau
d'Or mondialisé adossé à la
monnaie-dette fictive après la campagne victorieuse contre les
armées de l'Axe. L'escroquerie avait été si astucieusement
montée qu'elle a duré pratiquement sans accrocs de 1913
à 2007.
Voir
: Voyage
circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte de la caverne
d'Ali-Baba… 7ème
escale
La
mort des frontières 
La troisième épreuve a laquelle le nouveau Veau d'Or impérial avait
été confronté fut celle de renverser d'un coup d'épaule décidé les barrières
douanières des Etats-nations. La fameuse main invisible du marché
a d'abord mis à mal, puis abattu purement et simplement les frontières
afin de permettre au système économique né outre-Atlantique de se répandre
sur la planète entière avec l'avantage inestimable de disposer à gogo
d'un flux ininterrompu de capitaux .
Voir
Premiers
pas sur les traces du Roi-Dollar
L'empire
américain et le Veau d'Or financier mondialisé sont les deux faces d'une
même médaille , l'empire étant le bras armé des financiers.
Afin
de se répandre hors de leurs frontières, ils utilisèrent d'abord les
points d'ancrage que leur offrait la fameuse Alliance de l'Organisation
de l'Atlantique Nord (OTAN) mise sur pied par le vainqueur après
la victoire sur le Reich en 1945 pour fédérer ses vassaux directs, avant
de faire quasiment main basse sur la planète entière après la chute
du mur de Berlin en 1989. Mais, tout en affirmant le contraire et en
se faisant les chantres d'un libéralisme débridé,
l'empire et ses financiers conservaient soigneusement un nombre important
de leurs propres privilèges et de leurs protections douanières.
Ils étaient même parvenus à soumettre tous les autres
Etats de la planète à leur législation commerciale interne . Aussi pouvaient-ils
interdire la vente de tel ou tel matériel dès lors qu'un
seul élément entrant dans sa composition était
qualifié souverainement par leurs soins de "matériel
sensible" .
C'est
ainsi qu'ils purent affaiblir l'industrie des armements des Européens
qui avaient imprudemment inclus dans leurs armements quelques éléments
et boulons qui se sont trouvés , a posteriori, relever
de cette législation. L'Espagne n'a pas pu vendre ses avions
au Venezuela tandis que la France et l'Allemagne n'ont pas réussi
à lever l'embargo des ventes d'armes que l'empire a imposé
à la Chine.
Les
ruses sémantiques du Veau d'Or 
Habile
passe-muraille, le Veau d'or impérial s'est discrètement lové dans des
vocables anodins et neutres . Le capitalisme international vilainement
vilipendé par son rival messianique sentait le soufre et avait besoin
de retrouver une nouvelle virginité. De nos jours, aussi confortablement
installé dans le paysage économique et politique que dans les esprits
de la quasi totalité des habitants de la planète, de la Chine à la Papouasie,
de Mayotte à Los Angeles et de la Perse au Pérou, il a revêtu la tunique
de lin blanc d'un alléchant Libéralisme, d'une innocente Globalisation
et d'une benoîte Mondialisation . Devenu l'horizon idéologique
indépassable de l'univers , il libère peu à peu ses poisons et se révèle
une redoutable tunique de Nessus.
Mais
un esprit aussi lucide que celui du Général de Gaulle n'a jamais
été dupe du puissant système financier et politique qui s'était discrètement
abrité dans les vocables bénins destinés à
endormir la méfiance des ignorants. Il a flairé et démonté le piège
. Puis il a crié que le roi est nu et révélé urbi et orbi que
ce grand meccano était simplement un avatar de l'expansion de l'empire
américain . Il avait parfaitement compris le mécanisme de ce pillage
et ses fondements politiques :
" Le marché n'est pas au-dessus de la nation et de l'Etat. C'est
la nation, c'est l'Etat qui doivent surplomber le marché. Si le marché
régnait en maître, ce sont les Américains qui régneraient en maîtres
sur lui ; ce sont les multinationales, qui ne sont pas plus multinationales
que l'OTAN. Tout ça n'est qu'un simple camouflage de l'hégémonie américaine.
Si nous suivions le marché les yeux fermés, nous nous ferions coloniser
par les Américains. Nous n'existerions plus, nous Européens . "

D'ailleurs l'empire ne cache plus sa volonté hégémonique. Il la proclame
même à haute et intelligible voix. Mais la vassalisation sécrète un
virus mortel pour la vérité et les libertés publiques.
" Seuls les plus petits secrets ont besoin d'être protégés. Les plus
gros sont gardés par l'incrédulité publique " écrivait Marshall
McLuhan Auteur et chercheur canadien (1911-1980).
La vénération craintive est l'un des symptômes les plus prégnants de
cette pathologie . Elle entraîne une surdité et une mutité universelles
dans les organes de presse, si bien que le Reste du Monde et notamment
les Européens continuent de parler de Globalisation là où il
a vassalisation et de Mondialisation là où
il y a domination :
"Ni la Pax Britannica, ni la France napoléonienne, ni l'Espagne de
Felipe II, ni l'empire de Charlemagne, ni l'empire romain ne peuvent
se comparer à l'actuelle domination américaine. Jamais il n'a existé
une telle disparité de pouvoir dans le système mondial. " écrit
en toutes lettres l'historien Paul Kennedy
Main-mise
sur la planète 
Le
Veau d'or appelé Mondialisation est donc l'expression de la main
mise de l'empire américain et de l'armée de ses financiers et
de ses multinationales sur la planète.
Après
avoir abattu les frontières des Etats-nations, le Veau d'Or a entrepris,
avec une persévérance digne d'admiration et en usant de toutes les formes
de pressions, de chantage et de menaces sur ses vassaux, ses clients
ou ses débiteurs, d'affaiblir, de dissoudre et même de détruire totalement
les principes sur lesquels se sont construites les nations . Il s'emploie
à saper les fondements de toutes les institutions économiques et sociales
qui se voient qualifiées de rétrogrades. Ses serviteurs
appellent rupture et adaptation la destruction des protections
sociales et du code du travail. Les institutions policières et militaires
nationales n'échappent pas au grand bond en arrière et
sont remplacées par des structures de gestion supra nationales
et mondiales .
Voir:
: Il
était une fois la mondialisation ... Vue d'ensemble sur la nouvelle
religion planétaire
La
rapidité foudroyante de l'expansion du nouveau Veau d'or a été favorisée
par les progrès des communications terrestres ou aériennes ; mais
elle a surtout profité de l'essor des télécommunications et du miracle
des communications instantanées rendues possibles grâce à internet.
La Mondialisation, ce sont , en effet, des transactions transfrontières
de biens et de services, des flux croisés de marchandises et la diffusion
accélérée et généralisée des nouvelles technologies . Mais c'est également
une spéculation monétaire échevelée qui a métamorphosé le capitalisme
économique en financiarisme anonyme sans foi ni loi.

Dans
les coulisses de l'empire 
Derrière
la façade de la puissance politique et militaire de l'empire, le Veau
d'or Mondialisation exprime, en effet, les intérêts politiques
et financiers d'un très petit nombre de groupes très puissants
et très concentrés et d'organisations qui aujourd'hui conduisent et
pilotent l'économie de la planète dans la direction qui leur rapporte
les profits les plus faramineux. Comme l'écrivait déjà Walter Rathenau
(1867-1922), dans le journal autrichien Wiener Freie Presse du
, 24 décembre 1912, "Trois cents hommes, dont chacun connaît tous
les autres, gouvernent les destinées du continent européen et choisissent
leurs successeurs dans leur entourage."
En
changeant les mots " continent européen " par " empire américain
", la citation s'applique à la lettre à l'actuelle situation de la planète.
C'est aux pieds de ce nouveau Veau d'Or que les fidèles, appelés tantôt
travailleurs, tantôt consommateurs, sont priés de déposer
leurs anneaux d'or et leurs bijoux, c'est-à-dire leur force de travail
; c'est en son honneur qu'ils obéissent aux nouveaux commandements de
leur l'idole : travaillez, prenez de la peine... ou travaillez
plus pour gagner plus... La fameuse réhabilitation de la
"valeur travail" , comme le clame un célèbre
politicien de l'hexagone, prend tout son sens dans ce contexte.

Le
poulailler de la Mondialisation 
Car le libéralisme mondialisé n'est que la variante d'une fable qui
aurait pour titre : La liberté du renard dans le poulailler.
Il y près d'un siècle, Jaurès avait déjà décrit le sort des poules
dans le poulailler du libéralisme :
"
D'abord, et à la racine même [de la lutte des classes], il
y a une constatation de fait, c'est que le système capitaliste, le système
de la propriété privée des moyens de production, divise les hommes en
deux catégories, divise les intérêts en deux vastes groupes, nécessairement
et violemment opposés. Il y a, d'un côté eux qui détiennent les moyens
de production et qui peuvent ainsi faire la loi aux autres, mais il
y a de l'autre côté ceux qui, n'ayant, ne possédant que leur force de
travail et ne pouvant l'utiliser que par les moyens de production détenus
précisément par la classe capitaliste, sont à la discrétion de cette
classe capitaliste. "
Le
nouveau Veau d'Or est en effet une idole gourmande. Les salaires vertigineux
des dirigeants des grandes entreprises côtoient une misère de plus en
plus visible, y compris dans les sociétés industrialisées depuis plus
d'un siècle. Le Veau d'or réclame des rendements de plus en plus élevés
: 10% est jugé méprisable , l'idole exige 15% et même 20%. En conséquence,
la survie des entreprises appelle des plans sociaux et des restructurations
avec à la clé des licenciements et des délocalisations dans les pays
émergents, là où des salaires de misère et une protection sociale inexistante
rendent le coût du travail momentanément plus faible - en attendant
que ces peuples se réveillent.
"Vouloir
conserver le pouvoir exige le sacrifice du plus grand nombre pour le
bénéfice de quelques-uns" , écrivait Mao Tsé-toung, qui
en connaissait un rayon en matière de "sacrifiés"
. Quel que soit le régime, le sacrifice des pauvres est le moteur
des sociétés .
Les
poules ne sont pas les seules victimes des renards. Car la guerre fait
également rage en sous-main entre les renards eux-mêmes
. En effet, le Veau d'or mondialisé est un Janus .
Amasser
de l'argent est l'un de ses objectifs et l'une des faces de l'idole.
La seconde face est la lutte pour le pouvoir . Les renards ne
se satisfont pas de la chair des poules. Une guerre permanente et sans
merci est déclarée entre eux. Les plus puissants éliminent ou avalent
les plus faibles comme l'a encore montré récemment la " guerre de
l'acier " entre Arcelor et Mittal. Les tournois ne se déroulent
plus sur le pré, mais dans le secret des institutions bancaires et à
coups d'OPA amicales ou prédatrices. Dans un système construit sur l'appât
du gain, le pouvoir s'achète et se vend au plus offrant. Une OPA dite
" amicale " est celle dans laquelle les mangeoires des actionnaires
sont le plus abondamment garnies de sorte que ceux-ci se rangent spontanément
dans le camp du plus offrant.
Le
rêve d' un gouvernement mondial 
Les multinationales et les institutions internationales qui pilotent
la mondialisation aux côtés des responsables politiques aux Etats-Unis,
en Israël ou en Grande Bretagne , rêvent d'un nouvel ordre mondial
. Le mélange entre des intérêts privés, des hommes politiques , des
groupes de pression et des institutions officielles aboutit à une forme
de pouvoir inédit dans l'histoire humaine, une manière de privatisation
du pouvoir à l'échelle mondiale. Ce groupe en arrive même à imaginer
qu'il pourrait parvenir à imposer un gouvernement mondial unifié comme
le proclame sans complexe un des plus riches et des plus puissants hommes
d'influence de la planète :
" Certains croient que nous (la famille Rockefeller)
faisons partie d'une cabale secrète travaillant contre les intérêts
des États-Unis. Ils nous traitent d'internationalistes, nous accusent
de conspirer avec d'autres de par le monde pour construire une structure
politique et économique mondiale intégrée - un gouvernement mondial,
si vous préférez. Si c'est là l'accusation, je plaide coupable, et avec
fierté ! " - David Rockefeller, Mémoires,
2002

Si
M. Rockefeller prend ses désirs pour des réalités et tient pour acquise
la bienveillance ou la soumission de l'Europe et du Japon, il semble
ignorer qu'il existe des contre pouvoirs , que la Chine, la Russie,
l'Inde et une coalition d'Etats en
Amérique du Sud qui résistent
efficacement à l'idéologie du Veau d'or financiarisé n'ont pas
l'intention de plier l'échine devant un Veau d'Or tapissé
de billets verts , mais si mité de l'intérieur qu'il ne
tient plus debout que par habitude.
Il
n'en demeure pas moins vrai que notre super financier se félicite ouvertement
de la complaisance et même de la complicité des organes de presse dont
la mission aurait dû être de révéler au public l'existence, les manifestations
et les implications de ce qu'il déclare lui-même être un " complot
mondial ". Il démontre s'il en était besoin que la liberté de la
presse et l'existence d'un " quatrième pouvoir " aux côtés des
pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, est une pure chimère .
Une
fois de plus, il est prouvé que tout s'achète et tout se vend , qu'il
suffit d'y mettre le prix en sauvant les apparences. Dans le système
politique adossé au Veau d'Or mondialisé, la morale et les principes
éthiques deviennent à leur tour des marchandises .
"Il
aurait été impossible de développer notre projet pour le monde, si nous
avions été victimes des éclairages crus de la publicité au cours de
ces années. Mais notre oeuvre est maintenant à un stade beaucoup plus
sophistiqué et nous sommes prêts à entamer la marche vers un gouvernement
mondial. La souveraineté supranationale d'une élite intellectuelle
et des banquiers mondiaux est certainement préférable à l'autodétermination
nationale pratiquée lors des siècles passés. " - David Rockefeller,
au cours d'une réunion du Groupe Bilderberg, à Baden en Allemagne Rapport
Hilaire DuBerrier, 1991
La
cavalerie financière internationale et la mort programmée
du Veau d'Or mondialisé 
Comme
le disait le sapeur Camenbert : " Quand les bornes sont dépassées,
il n'y a plus de limites ." Des facilités monétaires
aussi exceptionnelles que celles permises par le
système monétaire actuel ne pouvaient que déchaîner
les appétits, si bien que, très logiquement, un
laxisme budgétaire catastrophique en chaîne s'ensuivit qui menace
aujourd'hui d'emporter dans un maelström imminent la quasi totalité
des économies occidentales.
Le
mécanisme était pourtant tellement simple qu'il était
impossible de ne pas voir qu'il portait inscrite sa propre perte dans
ses gènes. En effet, chaque fois que l'Empire a besoin d'argent
il s'adresse à la FED , autrement dit au consortium de banques
privées qui en sont les propriétaires. Celles-ci s'empressent
de le créditer du montant désiré mais moyennant
un intérêt qui enrichit automatiquement ces mêmes banquiers .
D'où
ces banquiers tirent-ils leur argent? De nulle part. Ils se contentent
d'imprimer une ligne dans un bilan. C'est bien là qu'est le véritable
miracle : l'argent est créé à partir de rien et
il produit un bénéfice. [1]
Une
fois le robinet ouvert et le flux amorcé, les bénéfices
s'écoulent quasi automatiquement dans l'escarcelle des financiers.
L'Etat emprunteur se trouve donc dans l'obligation d'emprunter à nouveau
afin de rembourser le premier emprunt et ainsi de suite.
Voir
: Voyage
circummonétaire à la recherche du Roi Dollar et découverte de la caverne
d'Ali-Baba……
8ème escale
Comme ce système pervers fonctionne également au niveau du Fonds monétaire
international censé aider les pays émergents, alors qu'il amorce un
mécanisme de vis sans fin de l'endettement , il transforme les pays
pauvres en vaches à lait des banquiers internationaux.
L'empire
est donc à la fois bénéficiaire et victime du Veau
d'or monétaire. Mais il a pensé pouvoir sortir de la spirale
de l'endettement en inventant à son profit un autre mécanisme
pervers par lequel il espérait desserrer l'étau de la
voracité de ses propres financiers et qu'il a pudiquement appelé
monétarisation de la dette. Il a donc entrepris de vendre
ses propres dettes colossales à
des banques étrangères et à des institutions internationales
sous la forme de " bons du trésor ". Il lui fallait pour cela
offrir un appât intéressant, donc un intérêt attractif. Mais afin d'honorer
le paiement des nouveaux intérêts, l'Etat était de nouveau contraint
d'emprunter et d'ajouter ce montant aux dettes déjà existantes.
On
voit que ce mécanisme génère automatiquement des
dettes à l'infini et que l'ensemble ressemble au jeu bien connu
de la patate chaude, l'essentiel étant de ne pas se trouver au
bout de la chaîne.
Mais
une fois amorcée, la roue de la cavalerie monétaire internationale décrite
par Balzac dans sa pièce Le faiseur, s'est mise
à tourner à une vitesse de plus en plus folle, si bien qu'aujourd'hui
, elle s'est tellement emballée et le montant des "avoirs
négatifs " - c'est-à-dire des dettes impossibles à rembourser -
est si colossal qu'il met en péril l'Etat émetteur et tous les intermédiaires
gloutons et alléchés par les taux attractifs offerts pour les bons
du trésor . Il fragilise également les Etats imprudents qui
avaient fait confiance à la loyauté et à la solidité financière de "
la plus grande puissance de la planète ", comme elle se dénommait
elle-même en se tapant du poing sur la poitrine, tel un gorille courant
tout autour des frontières du lopin qu'il a conquis à la force de ses
biceps.
La
goinfrerie des financiers avec, à leur tête, l'homme qui
rêvait d'un gouvernement mondial, est en passe de faire exploser
le système tout entier et de tuer la poule aux œufs d'or. Car ce mécanisme
a ensuite été appliqué en cascade par toutes les banques face aux emprunts
généreusement offerts aux particuliers notamment aux USA.
Il émerge aujourd'hui au grand jour sous le nom barbare de titrisation
des emprunts [2]
et met en péril l'équilibre bancaire international, puisque les titres
pourris des emprunts qui ne seront jamais remboursés plombent les bilans
des banques. Celles-ci se trouvent dans l'obligation de les transférer
plus ou moins discrètement des colonnes de crédit, où
ces titres donnaient une allure si fringante aux bilans , aux colonnes
des débits , si bien que même les banques internationales les
plus prestigieuses annoncent désormais des pertes colossales.
C'était
uniquement la confiance dans les divers intervenants de ce grand
meccano qui servait de ciment et de garantie du fonctionnement harmonieux
de l'ensemble du système . Or, à partir du moment où
la méfiance est devenue la norme des relations entre les
financiers et entre les banques, le système monétaire
international est en voie d'implosion et le Veau d'Or mondialisé
sous sa forme actuelle est en passe de finir dans les poubelles de l'histoire.
Et
pendant ce temps-là... un très petit groupe de banquiers, de
gestionnaires de fonds spéculatifs, de directeurs de capitaux d’investissement
et de gros investisseurs ont engrangé des sommes phénoménales . Des
institutions parallèles au système bancaire officiel s'étaient
créées . Elles avaient offert des crédits à
très court terme qui avaient alimenté la spéculation
et les fraudes . L'ensemble a abouti à un système si complexe
que les plus grandes banques elles-mêmes, et parmi elles Morgan
Stanley, City Group ou UBS y ont perdu leur latin . Piégées
par des "crédits pourris" , elles ont été
obligées de vendre des actifs à de gros détenteurs
de capitaux à Abou Dhabi , à Singapour, ainsi qu'à
des investisseurs anonymes en Chine et au Moyen-Orient.
C'est
pourquoi le petit sourire en coin du principal pontife aux commandes
de la machine du Veau d'Or permet d'imaginer que les grands maîtres
de la Mondialisation sauront , comme ils l'ont toujours fait
jusqu'alors, tirer un bénéfice supplémentaire de
l'effondrement de leur monnaie , pendant que le reste du monde pansera
ses blessures et comptera ses morts.
*
[1]
Voir l'excellente et très complète analyse de Rudo
de Ruijter sur le fonctionnement des banques , Secrets
d'argent, intérêts et inflation 
[2]
Voir Frédéric Lordon : Quand
la finance prend le monde en otage (http://w41k.com/11508
)
*
A
suivre: Pontifes
et cardinaux de la mondialisation